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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
savons-nous de lui ? Tobias Stimmer est né à SchafThouse, en 1539 ;
il était portraitiste, décorateur, dessinateur pour les libraires. Il
était assurément doué d’une grande habileté, comme peintre de
fresques, et il couvrit de sujets, suivant l'usage de l’Allemagne et
de la Suisse du nord, un certain nombre de façades de maisons,
pour lesquelles on recherchait une ornementation élégante et opu-
lente. Il peignit à SchafThouse la maison du Chevalier, dont la
décoration subsiste encore. Peintre de fresques, peintre de façades —
Fassadenmaler, pour user du mot allemand, — il a montré, en effet,
dans les portraits du Musée de Bâle, le large coup de pinceau du
décorateur h
La réputation de Tobias Stimmer se répandit assez pour qu’il
fût recherché dans l’Allemagne du sud et en Alsace. Il fut chargé,
à Strasbourg, où il vint s’établir, des peintures de l’horloge de la
cathédrale. Le margrave de Bade l’appela à sa cour, pour peindre
les portraits des anciens souverains de sa famille, dont une galerie
avait été formée ; Stimmer en fut le continuateur.
Quelques autres portraits sont conservés à l'hotel de ville de
SchafThouse et à la bibliothèque de Zurich. Stimmer a composé des
esquisses de vitraux qu’on croit retrouver dans les verrières qui dé-
corent Tlnthurneum de SchafThouse. Dans les collections de Bâle nous
avons sous les yeux des dessins curieux et vivants, des compositions
souvent surchargées d’une profusion de détails, dans le goût de la
Renaissance. Notre artiste travaillait fréquemment avec ses deux
frères, Hans Cristoph et Abel. En tant que dessinateur, son chef-
d'œuvre est une Bible, qui a été récemment rééditée à Munich2.
Notez que cette bible fut très estimée de Rubens; Mariette lui-même,
dans son Abec'edario, a enregistré ce renseignement, qu’il avait, au
reste, emprunté à Sandrart. Nous pouvons conclure de cette men-
tion que Stimmer ne fut pas ignoré en France ; l'abbé de Marolles
l’a cité dans son Livre des Peintres, en l’appelant Stymer de Schafuse.
Quant à Mariette, il s’exprime ainsi : « Ce que Rubens estimait
en lui, c’était le génie et la partie de la composition. On fait cas, et
avec raison, d’une suite d’histoires de l’Ancien Testament, gravée en
bois sur ses dessins. Je dirai plus, je ferai remarquer que Rubens
n’a pas fait difficulté d’y puiser... » Mariette nous apprend encore
que Rubens, par suite de l'estime qu’il portait à ce peintre suisse,
1. M. Vogelin a publié en Suisse un travail tout spécial sur la peinture de
façades (Anzeiger für schweizerische Altertumskunde, t. IV).
2. Georges Hirth, éditeur.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
savons-nous de lui ? Tobias Stimmer est né à SchafThouse, en 1539 ;
il était portraitiste, décorateur, dessinateur pour les libraires. Il
était assurément doué d’une grande habileté, comme peintre de
fresques, et il couvrit de sujets, suivant l'usage de l’Allemagne et
de la Suisse du nord, un certain nombre de façades de maisons,
pour lesquelles on recherchait une ornementation élégante et opu-
lente. Il peignit à SchafThouse la maison du Chevalier, dont la
décoration subsiste encore. Peintre de fresques, peintre de façades —
Fassadenmaler, pour user du mot allemand, — il a montré, en effet,
dans les portraits du Musée de Bâle, le large coup de pinceau du
décorateur h
La réputation de Tobias Stimmer se répandit assez pour qu’il
fût recherché dans l’Allemagne du sud et en Alsace. Il fut chargé,
à Strasbourg, où il vint s’établir, des peintures de l’horloge de la
cathédrale. Le margrave de Bade l’appela à sa cour, pour peindre
les portraits des anciens souverains de sa famille, dont une galerie
avait été formée ; Stimmer en fut le continuateur.
Quelques autres portraits sont conservés à l'hotel de ville de
SchafThouse et à la bibliothèque de Zurich. Stimmer a composé des
esquisses de vitraux qu’on croit retrouver dans les verrières qui dé-
corent Tlnthurneum de SchafThouse. Dans les collections de Bâle nous
avons sous les yeux des dessins curieux et vivants, des compositions
souvent surchargées d’une profusion de détails, dans le goût de la
Renaissance. Notre artiste travaillait fréquemment avec ses deux
frères, Hans Cristoph et Abel. En tant que dessinateur, son chef-
d'œuvre est une Bible, qui a été récemment rééditée à Munich2.
Notez que cette bible fut très estimée de Rubens; Mariette lui-même,
dans son Abec'edario, a enregistré ce renseignement, qu’il avait, au
reste, emprunté à Sandrart. Nous pouvons conclure de cette men-
tion que Stimmer ne fut pas ignoré en France ; l'abbé de Marolles
l’a cité dans son Livre des Peintres, en l’appelant Stymer de Schafuse.
Quant à Mariette, il s’exprime ainsi : « Ce que Rubens estimait
en lui, c’était le génie et la partie de la composition. On fait cas, et
avec raison, d’une suite d’histoires de l’Ancien Testament, gravée en
bois sur ses dessins. Je dirai plus, je ferai remarquer que Rubens
n’a pas fait difficulté d’y puiser... » Mariette nous apprend encore
que Rubens, par suite de l'estime qu’il portait à ce peintre suisse,
1. M. Vogelin a publié en Suisse un travail tout spécial sur la peinture de
façades (Anzeiger für schweizerische Altertumskunde, t. IV).
2. Georges Hirth, éditeur.