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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Per. 19.1898

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Nr. 1
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Fidière, Octave: Alexandre Roslin, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24683#0069

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

sacra un article qui ne tient pas moins de cinq pages dans l’édition
in-8° de ses œuvres. Bien que le morceau soit connu, je ne puis ré-
sister au plaisir d’en donner quelques extraits :

« Une idée folle, dont il est impossibte de se défendre au pre-
mier aspect de ce tableau, c’est qu’on voit le théâtre de Nicolet et la
plus belle parade qui s’y soit jouée. On se dit à soi-même : voilà le
père Cassandre ; c’est lui, je le reconnais à son air long, sec, triste,
enfumé et maussade. Cette grande créature qui s’avance, en satin
blanc, c’est Mademoiselle Zirzabelle ; et celui-là, qui tire sa révé-
rence, c'est le beau M. Léandre; c’est lui. Le reste, ce sont les bam-
bins de la famille.

» Jamais composition ne fut plus sotte, ni plus plate, ni plus
triste... Les laquais, les valets de pied, les paysans, les enfants, le
carrosse, durs et secs tant qu’on veut... Ici il n’y a ni âme, ni vie, ni
joie, ni vérité... Ce rare morceau coûte 15.000 francs et l’on donne-
rait toute chose à un homme de goût pour l’accepter qu’il n’en vou-
drait pas... »

Après avoir ainsi épuisé, sur le tableau du Suédois, toute la mé-
chanceté de sa plume, Diderot imagine ce que son ami Greuze aurait
fait si le tableau lui avait été confié : « Greuze proposait de rassem-
bler la famille dans un salon, le matin, d’occuper les hommes à de la
physique expérimentale, les femmes à travailler, et les enfants turbu-
lents à désespérer les uns et les autres. Il proposait quelque chose
de mieux, c’était d’amener au château du bon seigneur les paysans,
pères, mères, frères, sœurs, enfants, pénétrés de la reconnaissance
de secours qu’ils en avaient obtenus dans la disette de 1757... »

Ce que Greuze eût tiré d’un pareil sujet, il est facile de l’imaginer ;
il en eût fait une de ces compositions attendrissantes, dans le goût du
Fils ingrat ou de La Mère, bien-aimée, que Diderot jugeait sublimes
et qui, je le confesse bien bas, ne sont pas ce que je préfère dans
l’œuvre du charmant peintre de La Cruche cassée. Quant au tableau
de Roslin, je ne puis le juger, ne l’ayant jamais vu. Ces grandes
compositions n’étaient évidemment pas son affaire. Toutefois, l’ar-
tiste avait assez de goût pour que l’on puisse au moins taxer d’exa-
gération les critiques du salonnier. Roslin n’était pas incapable de
grouper plusieurs personnages dans une même toile. Je n’en veux,
comme preuve, que le charmant tableau appartenant à M. Porgès, et
qui représente le salon de Mme Martineau, la tille aînée du peintre. La
jeune femme est représentée assise, en élégant costume de satin
blanc décolleté, et achève sa toilette devant une glace. Derrière elle
 
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