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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
que, d’ordinaire, on commandait à la fois aux artistes de ce temps le
portrait du Roi et celui de la Reine. La somme de 15.000 livres don-
née à l’auteur de ce portrait s’accorde bien avec les habitudes de
Duplessis, qui était en situation de se faire payer fort cher et n’y
manquait pas. Enfin, et surtout, ce tableau, malgré les repeints qu'il
a subis, rappelle la facture de ce peintre excellent, le premier de son
temps et a un certain air de ressemblance avec celui qu’il fit de la
Reine en buste en 1775.
Ce fut le dernier portrait que Marie-Antoinette donna à sa mère;
depuis le mois de février 1779 jusqu’à la mort de l’Impératrice, sur-
venue le 29 novembre 1780, il n'est plus question d’envois de ce
genre dans les diverses correspondances du comte de Mercy. Le
buste en marbre de la Reine, signé : Fernande, 1779, qui est à
Schœnbrunn, doit avoir été exécuté, sur l’ordre direct de Marie-
Thérèse, pendant un voyage que fit à Paris, en 1779, cet artiste
brugeois, qui avait reçu, de 1772 à 1774, une pension du gouver-
nement des Pays-Bas autrichiens pour achever ses études à Paris et
à Rome1 et avait été nommé, en 1777, statuaire de la Cour de Bru-
xelles. Pour le récompenser de ce buste de sa fille, dont elle fit le
plus grand éloge lorsqu’il lui fut présenté, Marie-Thérèse donna à
Fernande six cents ducats. C’est une fort belle œuvre, dont la res-
semblance laisse bien peu à désirer ; tout en osant rester vrai et
sincère, le sculpteur a su donner à la jeune souveraine un air impo-
sant de grandeur et de majesté.
Mrae Lebrun dit bien, dans ses Soitvenirs, que ce fut en l’année
1779 qu’elle fit pour la première fois le portrait de la Reine, alors
dans tout l’éclat de sa jeunesse et de sa beauté ; mais elle écrivait ses
mémoires fort longtemps après la Révolution et on y trouve de nom-
breuses contradictions. Par exemple, dans le cours du livre, elle
déclare que ce portrait en grand était destiné à l’empereur Joseph II
1, Cette pension lui fut accordée au mois de septembre 1771, à la demande du
comte de Mercy, qui s’intéressait vivement à ce sculpteur. Dans la correspondance
de l’ambassadeur avec le prince de Starhemberg sur les affaires des Pays-Bas, con-
servée aux Archives de Vienne, on trouve à cette même date une supplique de Fer-
nande, dans laquelle il dit qu’il est âgé de vingt-huit ans et que, depuis six ans, il
esta Paris pour se perfectionner dans son art; il énumère les ouvrages qu'il a faits
et les prix qu’il a remportés dans les concours ouverts par l’Académie de Saint-
Luc et l’Académie Royale de Peinture et de Sculpture. A ce document est joint un
certificat autographe, délivré le 2 septembre 1771 par l’académicien Vassé, sculp-
teur ordinaire du Roi, pensionnaire et dessinateur de l’Académie des Inscriptions
et Belles-Lettres, à son élève Joseph Fernande, dont il fait grand éloge.
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que, d’ordinaire, on commandait à la fois aux artistes de ce temps le
portrait du Roi et celui de la Reine. La somme de 15.000 livres don-
née à l’auteur de ce portrait s’accorde bien avec les habitudes de
Duplessis, qui était en situation de se faire payer fort cher et n’y
manquait pas. Enfin, et surtout, ce tableau, malgré les repeints qu'il
a subis, rappelle la facture de ce peintre excellent, le premier de son
temps et a un certain air de ressemblance avec celui qu’il fit de la
Reine en buste en 1775.
Ce fut le dernier portrait que Marie-Antoinette donna à sa mère;
depuis le mois de février 1779 jusqu’à la mort de l’Impératrice, sur-
venue le 29 novembre 1780, il n'est plus question d’envois de ce
genre dans les diverses correspondances du comte de Mercy. Le
buste en marbre de la Reine, signé : Fernande, 1779, qui est à
Schœnbrunn, doit avoir été exécuté, sur l’ordre direct de Marie-
Thérèse, pendant un voyage que fit à Paris, en 1779, cet artiste
brugeois, qui avait reçu, de 1772 à 1774, une pension du gouver-
nement des Pays-Bas autrichiens pour achever ses études à Paris et
à Rome1 et avait été nommé, en 1777, statuaire de la Cour de Bru-
xelles. Pour le récompenser de ce buste de sa fille, dont elle fit le
plus grand éloge lorsqu’il lui fut présenté, Marie-Thérèse donna à
Fernande six cents ducats. C’est une fort belle œuvre, dont la res-
semblance laisse bien peu à désirer ; tout en osant rester vrai et
sincère, le sculpteur a su donner à la jeune souveraine un air impo-
sant de grandeur et de majesté.
Mrae Lebrun dit bien, dans ses Soitvenirs, que ce fut en l’année
1779 qu’elle fit pour la première fois le portrait de la Reine, alors
dans tout l’éclat de sa jeunesse et de sa beauté ; mais elle écrivait ses
mémoires fort longtemps après la Révolution et on y trouve de nom-
breuses contradictions. Par exemple, dans le cours du livre, elle
déclare que ce portrait en grand était destiné à l’empereur Joseph II
1, Cette pension lui fut accordée au mois de septembre 1771, à la demande du
comte de Mercy, qui s’intéressait vivement à ce sculpteur. Dans la correspondance
de l’ambassadeur avec le prince de Starhemberg sur les affaires des Pays-Bas, con-
servée aux Archives de Vienne, on trouve à cette même date une supplique de Fer-
nande, dans laquelle il dit qu’il est âgé de vingt-huit ans et que, depuis six ans, il
esta Paris pour se perfectionner dans son art; il énumère les ouvrages qu'il a faits
et les prix qu’il a remportés dans les concours ouverts par l’Académie de Saint-
Luc et l’Académie Royale de Peinture et de Sculpture. A ce document est joint un
certificat autographe, délivré le 2 septembre 1771 par l’académicien Vassé, sculp-
teur ordinaire du Roi, pensionnaire et dessinateur de l’Académie des Inscriptions
et Belles-Lettres, à son élève Joseph Fernande, dont il fait grand éloge.