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DES PIERRES GRAVÉES.
293
L É A N D R E.
L’aventure de Léandre & de Hdro est-elle vraie ou fabu-
leuse ? Cette question, souvent agitée, n5a pas encore été résolue.
On a peine à concevoir comment un jeune homme , quelque
vigoureux & quelque pasÏÏonné qu’il pût être , auroit pendant quel-
que temps traversé, deux fois chaque nuit, le détroit de l’Hellespont.
A la vérité ce détroit n’a, selon Strabon , que sept stades ; ( 1 )
mais ce Géographe ajoute que ceux qui passoient d’Abydos à Sestos
étoient obligés de côtoyer le rivage l’espace de cent neuf stades
ôc ensuite de traverser obliquement le canal pour éviter la force du
courant de l’eau ; or un pareil trajet à faire , comme 011 va le voir 9
deux fois par nuit à la nage nous semble une tâche au-defîus des
forces humaines.
Ceux qui tiennent pour la vérité du fait aïïéguent que l’homme a
toujours la force de faire ce qu’il veut fortement, que Famour ne
calcule point les dangers, ôc qu’il a fait de plus grands miracles.
Comme il faïïoit que Ies deux Amans cachassent à tous les yeux
les faveurs qu’ils se prodiguoient, jamais l’Aurore ne surprit Léandre
près de Héro ; avant que le jour pût éclairer leurs caresses 5 Léandre
s’arrachoit des bras de son amante, ôc c’étoit surtout alors que ses
forces se trouvant diminuées ôc par l’usage qu’il en avoit fait , ôc
par la douleur de s’éloigner d’une maîtresse adorée, le trajet deve-
noit pénible. Aussi ce commerce ne fut-il pas de longue durée :
Léandre, s’étant jeté à la mer malgré un violent orage qui étoit
lùrvenu, périt malheureusement dans les ssots. Le lendemain, Héro
apperçut son amant étendu sans vie sur le rivage ôc se précipita sur
lui du haut de la Tour.
Pluïïeurs Poëtes anciens ont célébré les amours de Léandre ÔC
(1) Lib. XIII. pag. 5pi.
Tome /.
Cccc
DES PIERRES GRAVÉES.
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L É A N D R E.
L’aventure de Léandre & de Hdro est-elle vraie ou fabu-
leuse ? Cette question, souvent agitée, n5a pas encore été résolue.
On a peine à concevoir comment un jeune homme , quelque
vigoureux & quelque pasÏÏonné qu’il pût être , auroit pendant quel-
que temps traversé, deux fois chaque nuit, le détroit de l’Hellespont.
A la vérité ce détroit n’a, selon Strabon , que sept stades ; ( 1 )
mais ce Géographe ajoute que ceux qui passoient d’Abydos à Sestos
étoient obligés de côtoyer le rivage l’espace de cent neuf stades
ôc ensuite de traverser obliquement le canal pour éviter la force du
courant de l’eau ; or un pareil trajet à faire , comme 011 va le voir 9
deux fois par nuit à la nage nous semble une tâche au-defîus des
forces humaines.
Ceux qui tiennent pour la vérité du fait aïïéguent que l’homme a
toujours la force de faire ce qu’il veut fortement, que Famour ne
calcule point les dangers, ôc qu’il a fait de plus grands miracles.
Comme il faïïoit que Ies deux Amans cachassent à tous les yeux
les faveurs qu’ils se prodiguoient, jamais l’Aurore ne surprit Léandre
près de Héro ; avant que le jour pût éclairer leurs caresses 5 Léandre
s’arrachoit des bras de son amante, ôc c’étoit surtout alors que ses
forces se trouvant diminuées ôc par l’usage qu’il en avoit fait , ôc
par la douleur de s’éloigner d’une maîtresse adorée, le trajet deve-
noit pénible. Aussi ce commerce ne fut-il pas de longue durée :
Léandre, s’étant jeté à la mer malgré un violent orage qui étoit
lùrvenu, périt malheureusement dans les ssots. Le lendemain, Héro
apperçut son amant étendu sans vie sur le rivage ôc se précipita sur
lui du haut de la Tour.
Pluïïeurs Poëtes anciens ont célébré les amours de Léandre ÔC
(1) Lib. XIII. pag. 5pi.
Tome /.
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