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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 4)

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Dubouché, Adrien: La céramique contemporaine à l'exposition universelle de 1878, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.16911#0076

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58 L'ART.

Un autre gros industriel, Schippo Kaïcha, de la province d'Owari, fabrique des émaux
cloisonnés, des faïences et des porcelaines. Les jardinières de cet exposant sont riches et
monumentales, les vases et les pots à fleurs d'une fière tenue, les plaques rondes et carrées d'un
bleu décoratif superbe. Tous ces produits bien équilibrés se recommandent et s'imposent.

Sur les grandes potiches exposées par Hiotiyen, tous les personnages sont historiques, et dans
ces jardins merveilleux, où le soleil se lève à toute heure, deux figures nous ont frappé. Un
mandarin mal vêtu oublie de cacher son ventre pendant que sa bouche grande comme un four
jette des cris de rire à crever les murailles; c'est peut-être un dieu du pays qui s'enflamme et
qui boit le poison dans les yeux de la plus étrange déesse. Un regard noir et des lèvres rouges
sur un visage d'une blancheur de morte, cela fait peur. Une laide adorable, souveraine dans sa
structure,, pliée dans sa robe noire avec la grâce et l'effroi d'une sensitive qui replie ses feuilles,
cela ravit. Elle marche comme une statue; son bras plein de langueur et toujours trop blanc
s'abandonne aux baisers du monstre; l'autre main aux ongles pointus fait doucement respirer à
ce dieu grotesque un bouquet d'absinthe et d'oeillets, parfum doux et parfum amer, toutes les
griseries de l'amour.

Que dire encore qui ne soit cent fois répété ! L'imagination de ce peuple est sans cesse en

ébullition et nous montre ce que peut enfanter cette
gymnastique de l'œil qui perçoit partout l'élément
constitutif d'un art fertile en surprises, quoi qu'il
exprime. Géométral ou fantaisiste, le regard se délecte
à la vue de ces productions. Raisonnées ou folles,
la séduction et le charme qu'elles exercent sur nous
ont la même puissance, ce qui nous contraint pour
longtemps encore à l'admiration de cet art curieux.

La Chine est plus que jamais gardée par sa
muraille; cette étrange nation représente l'immobilité;
. ses porcelaines anciennes et magnifiques mêlées à

~* ses nouveaux produits par trop ordinaires nous
aiguière et bassin montrent l'état de santé de ce pays malade. Beaucoup

Fonds gris, filets bleu foncé, blanc sur blanc, reflets métalliques. H. 0,2;. c|e bruit et peu de beSOgne , Voilà la devise deS
Dessin d'Ulysse d'après sa faïence, - . . . , .

, „ ■ .,,„', », .• ", ., c; exposants chinois. La Lnine a le sommeil dans les

achetée par le Musée céramique de la Manufacture Nationale de sevrés. -i

^position universelle de 1878.) yeux comme dans l'esprit, et le sommeil trop prolongé

conduit à l'inertie, conduit à la mort. Nous avons
beau mettre dans nos litanies nos vœux pour la résurrection du Céleste Empire, le Céleste
Empire est sourd à nos prières. 11 nous reste à offrir notre adoration aux reliques du bon vieux
chine, à ces revenants doux et tristes d'un monde disparu, et à pleurer un de profundis sur cet
art qui agonise et qui, demain, ne sera plus.

II

En voulant patronner les artistes et pousser les femmes aux recherches élevées de l'art pur,
on a créé une salle où le génie des demoiselles sans emploi donne le spectacle navrant de ce que
peuvent les mauvais conseils des âmes trop tendres ou les encouragements d'amis trop flatteurs.
L'idée est honorable, le résultat mauvais; c'est un ballon qu'il faut dégonfler.

Maintes fois nous nous sommes élevé contre cette facilité inhumaine ou trop humaine
d'accepter au Salon — sous prétexte de l'encourager — l'œuvre d'une débutante qu'on détourne
de la vraie route en compromettant son avenir. Être reçue au Salon, voyez-vous l'honneur! Avoir
dans son carton son diplôme d'artiste et la fortune au bout de son pinceau, tout comme la fille
de votre concierge a cent mille francs dans son gosier, quel mirage ! Mais à vingt ans, tout est si
rose et l'art est si beau!

Vivre des choses de l'intelligence, être remarquée, applaudie, voir son nom imprimé, quelle
 
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