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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 4)

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Piat, Adolphe: Exposition universelle de 1878, [2]: Les beautés du catalogue oficiell
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Véron, Eugène: Louis Navatel, dit Vidal
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https://doi.org/10.11588/diglit.16911#0115

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LOUIS NAVATEL, DIT VIDAL.

M. Krantz a été indignement trompe' par l'employé qu'il a
charge de la rédaction du Catalogue Officiel, mais c'est le public
qui est la véritable victime, lui qui paye fort cher ce détestable
travail.

Il y a six semaines que vous avez signalé le mal, et il n'y a
pas été apporté le moindre remède. Il est désolant de penser que
de ce glorieux triomphe pacifique que vient de remporter la [
France, il ne restera pas, comme souvenir durable à consulter
dans l'avenir, un catalogue d'ensemble fait avec savoir et avec
conscience.

Veuillez agréer, monsieur, l'expression de mes sentiments
les plus distingués.

Guillaume Van Hamme.
Réponse à M. Guillaume Van Hamme.

Votre lettre reçue, Monsieur, il était de mon devoir de
m'informer si une quatrième édition du Catalogue Officiel n'avait
point succédé à la troisième et si elle brillait, elle aussi, par les
mêmes lacunes, par les mêmes incorrections. Cette édition a

paru et elle figure sur les rayons de ma bibliothèque comme
une preuve de plus des méfaits du rédacteur qui a si scandaleu-
sement massacré ce travail depuis six mois entiers.

Tout ce que vous me signalez se rapporte très-exactement
aux trois premières éditions et vous avez mille fois raison. Dans
la quatrième, on a rectifié ce qui concerne votre pays, mais
toutes les grossières erreurs commises au préjudice des exposants
anglais subsistent plus que jamais, telles que je les ai indiquées '.
Puis si M. Eugène Guillaume figure enfin au Catalogue Officiel -,
si l'on a en grande partie corrigé les fautes relatives aux États-
Unis, à l'Italie et au royaume de Hongrie, on n'a rien modifié
pour la Norwége, et les innombrables âneries dont l'Espagne a
si fort à se plaindre émaillent cette fois encore les pages de cette
quatrième édition. Le rédacteur qui a si indignement rempli
l'importante mission que lui avait confiée M. Krantz a tenu à
ce que l'on fût volé jusqu'au dernier jour en achetant le Cata-
logue Officiel.

Recevez, je vous prie, Monsieur, l'expression de ma consi-
dération la plus distinguée.

Adolphe Pjat.

LOUIS NAVATEL, DIT VIDAL

Le Temps, un des journaux qui honorent le plus la presse
française, a pour chroniqueur M. Ad. Lereboullet, qui met
infiniment de talent au service de toutes les nobles causes et se
fait un devoir de prêter l'appui de sa plume à toutes les grandes
in fortunes ; il pouvait difficilement en signaler de plus digne que
celle de l'élève de Barye à qui il vient de consacrer sa Chronique
du /.¥ octobre. Comme peu de personnes collectionnent un jour-
nal, nous avons cru devoir reproduire le très-excellent et très-
intéressant article de notre éminent confrère afin de lui assurer
une publicité plus durable et de contribuer à appeler l'attention sur
le vaillant artiste dont il s'occupe si dignement :

« Je vais raconter une histoire invraisemblable, mais d'une
vérité scrupuleuse et dont beaucoup de Parisiens pourraient
attester la réalité. Il s'agit d'un sculpteur, frappé depuis de
longues années d'une cécité complète, et qui n'en pétrit pas
moins la terre avec ses doigts, qui crée des figures d'animaux
pleines de mouvement et de vie, dignes de rappeler les œuvres
de son maître Barye.

« C'est à la suite de mes premières causeries sur les aveugles
que j'ai fait cette découverte. Dans le grand nombre de commu-
nications que j'ai reçues revenait de temps à autre cette ques-
tion : « Pourquoi ne nous parlez-vous pas du sculpteur aveugle? »
Un beau jour un de mes amis —■ et pourquoi ne le nommerai-je
pas?—■ c'est le sculpteur Oliva, prit le parti de venir me trouver,
et me représenta qu'il y avait là un sujet d'observation, vérita-
blement de nature à compléter et à confirmer ces rapides études.

— « Des accordeurs de piano, des fabricants de filets, tout
cela est fort intéressant sans doute. Mais imaginez-vous la cécité,
la cécité absolue chez un sculpteur? Voyez-vous ces doigts aussi
perspicaces que des yeux se promener sur la glaise, adoucir les
angles, dessiner les contours, modeler les formes ! Le voyez-vous
interroger avec ces mêmes doigts vivants les oeuvres de ses col-
lègues, leur donner son sentiment, et parfois même se permettre
des critiques, presque toujours justifiées ! L'artiste n'est pas heu-
reux, mon cher ami ; vous compléterez vos recherches et vous
ferez en même temps une bonne action. Il est bien connu de
nous autres : chacun vous indiquera le 22 de la rue Denfert; il
n'y a pas de petites jalousies, il n'y a pas de petites rivalités de
métier qui tiennent devant une semblable infortune. »

« J'ai suivi cet obligeant conseil, et bien m'en a pris. M. Vidal
est né à Nîmes, en 1851 ; il est aveugle depuis l'âge de vingt et
un ans. Le mal qui l'a frappé est incurable ; il a été atteint d'une
paralysie du nerf optique. A la suite de cruelles souffrances, il
a dû subir l'extraction de l'iris; il est donc plongé dans une nuit
complète.

« Cette terrible infirmité s'est déclarée tout à coup; la veille,
le malade y voyait comme tout le monde, il s'est réveillé privé
de la lumière du jour. On imagine mieux qu'on ne saurait dé-
crire la consternation qui doit suivre une telle catastrophe.
Vidal avait vécu jusque-là dans un milieu d'artistes, dans la fa-
miliarité de Barye et de Pradier. Il avait poussé très-loin ses
études; il sut résister au découragement. Après quelques se-
maines d'essais et de tâtonnements, il reprit l'œuvre interrom-
pue : ses doigts avaient remplacé ses yeux.

« Mais on pense par quelles alternatives d'espoir et de dé-
faillance il dut passer. Ne plus voir, ne plus étudier que par des
à peu près la nature vivante, demander à d'incessantes recher-
ches, à des comparaisons nécessairement vagues, la sûreté de la
ligne et du relief! Et avec cela l'isolement, le besoin; n'est-ce
pas que cette existence qui compte déjà vingt-six années mérite
d'être racontée ?

« Avant d'interroger l'artiste, j'ai voulu m'assurer si ce cas
exceptionnel n'avait pas des précédents. L'antiquité fournit un
exemple de sculpteur aveugle, mais cet artiste se bornait à co-
pier; il interprétait la nature déjà modelée par un autre. Anne
de Bretagne se fit présenter un sculpteur, atteint lui aussi de
cécité, et comme elle éprouvait des doutes sur l'étendue de son
infirmité, elle soumit à son examen une pièce de monnaie ;
l'aveugle, au toucher, devina l'effigie, ce qui lui valut une pen-
sion sur la cassette royale.

« Au rebours de ses ancêtres, Vidal produit des créations
originales. Il n'a pas cessé d'exposer de 1855 à 1875; il a été
médaillé en 1861. Panthères, lions, cerfs mourants, chèvre et
bicot, ânes et chevaux, tigres à l'affût et en chasse, taureaux,
chiens, tels sont ses sujets de prédilection. L'Etat a acquis plu-
sieurs de ses marbres et de ses bronzes.

« Avant de le voir, je n'étais pas sans connaître la subtilité
que l'expérience donne aux aveugles. J'ai raconté ici même l'his-

1. Voir l'Art, 4e année, tome III, pages 21; et 214.

2. Quatrième édition, page 98, les œuvres de M. Eugène Guillaume sont intercalées sous les numéros 1271 A à 1271 K.
 
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