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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 4)

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Véron, Eugène: Le musée céramique de Limoges et les écoles municipales gratuites des Beaux-Arts appliqués à l'industrie
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https://doi.org/10.11588/diglit.16911#0272

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LE MUSEE CERAMIQUE DE LIMOGES

et ",..''!

LES ÉCOLES MUNICIPALES GRATUITES DES BEAUX-ARTS APPLIQUÉS A L'INDUSTRIE.

Les articles de notre excellent collaborateur, M. A. Dubou-
che', sur la céramique contemporaine à l'Exposition universelle,
ne sont pas complets 1. Il n'a pas dit un mot du Musée céra-
mique de Limoges, et à peine mentionné les Écoles municipales
gratuites des beaux-arts appliqués à l'industrie. C'est sans doute
parce que c'est lui qui les a fondées. Cela ne nous paraît pas
une raison suffisante pour les passer sous silence. Ce n'est pas
leur faute si leur succès offense la modestie de leur fondateur.
Les Écoles avaient d'ailleurs un droit officiel à paraître dans ce
compte rendu de l'Exposition, puisque le jury international leur
a décerné une médaille d'or.

Nous ne devons pas d'ailleurs oublier que l'école c'est l'ave-
nir. Les amateurs de céramique ont bien le droit de savoir ce
que l'on fait pour le développement de cette belle industrie.
Nul plus que M. Dubouché n'était à môme de leur donner ces
renseignements, et nous espérions qu'il le ferait.

On sait que, si un hasard non encore expliqué a fait de
M. de Pourceaugnac un Limousin, Limoges compte au nombre
de ses enfants authentiques un nombre très-respectable d'artistes
illustres, à commencer par le bon saint Éloi, pour finir à
Nardon Pénicaut, Léonard Limosin, Courteix, Pierre Rey-
mond, Jehan Court. Ses industries principales ont toujours été
des industries artistiques. A côté de l'École d'orfèvrerie que saint
Éloi y avait établie, et d'où est sorti le calice de Chelles, Limoges
avait, dès le rx" siècle, sa ferronnerie, ses fabriques d'armes et
ses précieux tissus de soie brodés, qu'on appelait des limogia-
tures. C'est aussi à Limoges que se fonda, au xic siècle, cette
École d'orfèvrerie entaillée au champlevé, qui a produit jusqu'à
la fin du xv" siècle tant de chefs-d'œuvre dont on peut encore
voir des spécimens glorieux en maint endroit. Aux émailleurs il
faut joindre les peintres-verriers, les enlumineurs, les impri-
meurs, et enfin, au xvic siècle, apparaissent les grands émaux
peints qui délient toute rivalité.

A ces arts plus ou moins disparus, succéda un art nouveau,
l'art de la porcelaine peinte. Il prit entre les mains de Massié,
Grellet et Fourneyras, un développement brillant et rapide. Des
fabriques nombreuses furent fondées; mais à partir de la fin
du xviii" siècle, elles déclinèrent rapidement.

Cette décadence rencontra, en 1858, un obstacle imprévu.
L'Exposition du centre de la France, qui eut lieu cette année à
Limoges, ouvrit, sur les défauts de la fabrication limousine, les
yeux de quelques hommes vaillants et généreux, et en particu-
lier de M. Adrien Dubouché. Il se promit, dès lors, de relever la
gloire de Limoges, et il s'est tenu parole. M. Dubouché n'occu-
pait pas une de ces situations officielles qui confèrent une puis-
sance spéciale; il n'était ni préfet, ni ministre, ni député, ni
même candidat ; c'était un simple particulier, mais un particu-
lier armé de deux privilèges, qui donnent une force singulière à
ceux qui les possèdent. D'un côté, il est animé, pour la gloire et
la prospérité de la patrie et de sa ville, d'une passion vive et per-
sévérante, qui incline naturellement en ce sens toutes ses pen-
sées et tous ses efforts ; de l'autre, il a reçu de la nature le don
d'inspirer à toutes les personnes qui se trouvent en relation avec
lui un sentiment complexe qui se compose de respect, d'estime
et d'affection, et qui en fait parla même des collaborateurs actifs
et dévoués de tous les efforts qu'il tente dans l'intérêt général.
Il entreprit donc de faire de Limoges la capitale de la por-

1. Voir l'Art, 41 minée, tome I.I, pages 49 et 7;.

celaine. Il fallait pour cela commencer par rallumer dans les
esprits l'amour de l'art. En 1862, fut fondée la Société des Amis
des Arts de Limoges. La première exposition réussit au-delà
de tout espoir. Les Limousins allèrent en foule admirer les
tableaux, et leur admiration se traduisit en fait par l'achat de
60,000 francs d'oeuvres d'art. En 1864, ce fut mieux encore; les
achats montèrent à 80,000 francs, plus que dans bien des villes
de population double ou triple.

Une fois le terrain ainsi préparé, on remit en avant une idée
déjà ancienne, celle de fonder un Musée céramique, afin de
placer à la portée de la fabrique de Limoges les plus beaux
spécimens de l'art de la poterie ; et les fonctions de directeur du
Musée futur furent conférées à M. A. Dubouché. On savait que,
dans ces mains, l'embryon ne pouvait manquer de grandir, et
que les ressources ne lui feraient pas défaut, attendu que la for-
tune personnelle du directeur se trouverait, par le fait seul de
cette nomination, mise au service du Musée. Du moment que
M. Dubouché consentait à veiller aux destinées de la collection
naissante, son avenir paraissait donc assuré, et cela suffisait pour
qu'il le fût en effet. Entre les mains de tout autre, l'institution
fût restée plus ou moins longtemps dans cet état de formation et
d'incertitude qui s'impose à toute création humaine, et pendant
lequel les sceptiques, c'est-à-dire la grosse masse du public, se
contentent de regarder, en calculant les chances pour ou contre.

Ici, presque dès- le premier jour, on a considéré la chose
comme faite, parce qu'on a été convaincu que M. Dubouché,
fondateur et directeur, ne la laisserait certainement pas se défaire,
et que, par conséquent, on ne risquait rien à se déclarer haute-
ment pour la fondation nouvelle.

A propos de l'Exposition universelle de 1867, le conseil muni-
cipal et le conseil général votèrent tous deux à l'unanimité une
subvention en faveur du Musée. Une souscription particulière
produisit 9,000 francs, qui furent remis au directeur pour faire
des achats. On ne pouvait pas, avec cela, acheter grand'chose.
Les chefs-d'œuvre de la céramique coûtent cher. Eh bien, avec
ces ij.ooo francs, M. Dubouché trouva moyen d'acheter pour
150,000 francs d'objets. Il communiqua aux fabricants de Paris,
de toute l'Europe, sa foi et son ardeur. Tous tinrent à honneur
de participer à l'enrichissement du Musée de Limoges, parce que,
en entendant son fondateur, ils furent convaincus que ce Musée
avait devant lui un brillant avenir, et que ce serait pour eux un
avantage certain d'avoir là une vitrine qui serait pour leurs pro-
duits une exposition permanente. Ce qu'ils auraient vendu à tout
autre, ils le donnèrent à M. Dubouché. Aussi le directeur se
trouva-t-il, à son retour, fort embarrassé de ses richesses. La
place manquait déjà dans son Musée après quelques mois d'exis-
tence. Le conseil municipal, émerveillé de cet accroissement,
donna au Musée un local splendide ; et cette collection, qui,
en 1867, comptait ?oo numéros, présente aujourd'hui l'admirable
spectacle de plus de quatre mille pièces choisies de faïence et de
porcelaine, européennes ou orientales, anciennes ou modernes.

« D'où vient cette rapide fortune de votre Musée ? » deman-
dions-nous à M. Dubouché. — « Notre Musée, nous répondit-il,
a fait sa fortune tout seul, rien qu'en vieillissant. Tout le monde
nous donne et nous comble de faveurs. Le Comité de perfection-
nement de la manufacture de Sèvres vient encore de nous pro-
mettre les pièces du Musée de Sèvres qui s'y trouvent en double.
 
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