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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 4)

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Saint-Raymond, Edmond: Exposition historique de l'art ancien, [3]: Les grandes collections au Trocadéro. Collections de MM. les barons de Rothschild
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https://doi.org/10.11588/diglit.16911#0132

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,,2 L'ART.

une bande jaune : le milieu est occupé par un médaillon en losange à fond bleu semé de fleurs et
d'oiseaux ; les angles sont à fond vert brodés d'oiseaux et d'arabesques. Le troisième est à fond
bleu avec une bordure semblable couverte d'arabesques et séparée du tapis par une étroite bande
blanche coupée de jaune et de rouge par intervalles. Le milieu est occupé par un médaillon rond
polylobé à fond rouge avec dessins verts ; les angles sont à fond vert ; le reste du fond est plein
de fleurs d'un dessin très-recherché, au milieu desquelles sont disposés symétriquement quatre
animaux. Le quatrième tapis est à fond bleu avec bordure à fond rouge entourée extérieurement
d'une petite bande verte et ornée de caractères d'écriture brodés d'argent sur des arabesques de
couleur; elb est séparée du tapis par une étroite bande blanche avec des caractères d'écriture noirs.
Le centre du tapis est occupé par un petit cercle blanc avec ornements rouges et verts : les
angles sont à fond jaune avec extrémité grise; le reste du fond est couvert d'arabesques en losange
et en spirales d'un dessin très-large brodées d'argent, garnis dans les intervalles de branches
d'arbres très-finement tracées en rouge avec des fleurs blanches, rouges et vertes.

Cette description un peu sèche était nécessaire pour faire comprendre le système de
l'association des tons et la combinaison de la décoration ornementale, mais rien ne saurait rendre
le prestige obtenu par ces savants calculs, suivant lesquels des nuances de la plus grande variété
et du plus doux éclat se soutiennent, se ravivent ou se tranquillisent dans une gamme d'harmonie
des plus sûres et des mieux ménagées. Rien n'est indifférent, en effet, dans cette accumulation
de toutes les ressources d'une palette brillante, et rien n'a été laissé au hasard dans l'emploi des
moyens qui ont conduit à ces étonnants résultats. Ils supposent la connaissance la plus profonde
des lois de la couleur. Il n'y a qu'à voir comment la juxtaposition de deux tons complémentaires
est toujours employée pour obtenir leur intensité d'éclat; avec quel bonheur l'intercalation d'une
nuance neutre en sépare deux autres qui se seraient nui par leur voisinage ; dans quelle mesure
discrète, mais juste et pleine d'à-propos, sont distribués les rappels de tons, et le rôle si
important que joue même, au point de vue de la couleur, la combinaison de ces arabesques si
variées, semées avec tant de prodigalité dans le champ de l'étoffe; tantôt elles fortifient un ton
trop pâle en lui apportant le secours d'une note nouvelle qui le soutient sans l'absorber; tantôt
elles font vibrer le fond par l'intervention d'une valeur plus claire; tantôt elles le reposent en
produisant, par la superposition d'un ton qui le complète et qui l'assourdit, un mélange optique
qui caresse les yeux, et fait flotter devant eux des ondes colorées d'une douceur inexprimable.

Après avoir vu et étudié tant d'ceuvres du premier ordre dans l'art décoratif, on ne peut
s'empêcher de réfléchir sur tout ce que nous devons à ces collections auxquelles on ne rendra
jamais assez de justice. Elles ont sauvé les plus beaux types à l'époque où les bonnes traditions
étaient perdues, elles nous en ont conservé la vue et l'exemple salutaire, plusieurs d'entre elles
sont devenues des musées tout nouveaux par leur but et leur composition, toutes ont ouvert aux
arts industriels de nos jours les larges voies dans lesquelles ils marchent aujourd'hui avec tant de
confiance. N'oublions donc jamais ce que nous devons à ces simples particuliers qui, devançant
l'initiative de l'État, font tous les jours tant de sacrifices pour retrouver les épaves des arts
d'autrefois. Souvenons-nous surtout, puisqu'ils nous ont servi de sujet pendant de si longues
pages, des services rendus par cette grande famille, qui, tenant depuis si longtemps en Europe,
en plein épanouissement des prospérités modernes, la place que les Médicis y tinrent à l'aurore
de notre civilisation, songe à les rappeler par le goût des arts comme elle les rappelle déjà par
l'éclat de la fortune, et reprend si noblement les traditions de tous ces grands protecteurs si
éclairés, si généreux, qui firent tant pour l'art clans les siècles passés en Italie et en France.
Mais pour tirer du profit de tant de trésors accumulés, sachons y voir ce qu'ils nous montrent.
Apprenons par leur exemple à fuir la correction froide, l'exécution contrainte et servile, les
puérilités de l'outil et du métier; sachons enfin comprendre l'art décoratif en véritables artistes,
et nous trouverons, sous l'inspiration féconde des maîtres du temps passé, une foule de richesses
nouvelles , que jusqu'ici nos petites préoccupations ou nos préjugés nous ont empêchés de
reconnaître et de recueillir.

Edmond Saint-Raymond.
 
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