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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 4)

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Carr, J. Comyns: La saison d'art à Londres, [2]: La Grosvenor Gallery
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https://doi.org/10.11588/diglit.16911#0178

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IJ4 L'ART.

certaine beauté au talent avec lequel le peintre en a saisi le caractère spécial. M. Legros est un
réaliste, mais d'un tempérament si sérieux, si grave, qu'il fait oublier les trivialités du réalisme
qu'il impose avec une incontestable autorité, dépourvue de toute forfanterie. Son art manque
peut-être de séduction, mais non de sincérité et de profondeur. Il hait le faux brillant, l'éclat
d'emprunt de la peinture à la mode.

Le méchant goût du siècle en cela lui fait peur.

M. Alphonse Legros est l'Alceste de la peinture. Son côté faible, c'est l'invention, la compo-
sition. C'est un maître, mais non dans l'art de grouper ses observations pour les faire obéir à
une idée d'ensemble. Aussi, sa vigoureuse manière de peindre et la sévérité magistrale de son
dessin se manifestent-elles avec plus de puissance dans les études isolées. Telle, par exemple,
cette étude de tête de vieillard dont nous donnons une reproduction, page iji. C'est là un véritable
morceau de maître, un chef-d'œuvre de pratique qui atteste une science consommée. N'ayant pas
de sujet à concevoir, le peintre n'était pas embarrassé de déployer sa virtuosité dans l'étude
directe et l'expression immédiate de la nature. Il est des artistes plus richement doués ; il n'en
est pas qui aient plus consciencieusement cultivé les qualités restreintes mais puissantes de leur
tempérament.

Voici encore un portraitiste éminent, mais à d'autres titres : M. C. E. Hallé, dont la manière
n'a pas la moindre affinité avec celle de M. Legros. Tout au contraire, il recherche de parti pris
les qualités de grâce et de charme que M. Legros semble négliger avec préméditation. Et cepen-
dant, on ne saurait reprocher à sa peinture cette affectation efféminée qui est trop souvent le
revers de la médaille du style qu'il a choisi. La précision et la fermeté de son dessin compensent
la faiblesse relative de la touche et l'insuffisance de la couleur. Il est à l'affût des beautés de
la ligne et du contour, et c'est ce qui fait le succès tout particulier de son Portrait de
Mrs Poynter (n° 66), un portrait auquel convenaient précisément les aptitudes sculpturales qui
le distinguent. Outre trois autres portraits, M. Hallé expose une composition idéale, A Rain
Cloud (n° 65), allégorie de la Pluie, personnification chimérique du nuage qui crève, mais pour
féconder plutôt que pour détruire '. Il faut plus que du talent pour faire accepter aujourd'hui ces
rébus pittoresques.

J'ai surtout insisté sur le paysage et le portrait, non que les autres branches de la peinture
fussent imparfaitement représentées à cette exposition, mais parce que j'ai eu, l'année dernière,
l'occasion d'étudier en détail le talent de leurs principaux représentants. Une minutieuse description
des peintures de M. Burne Jones, par exemple, et de M. Albert Moore, amènerait d'inévitables et
inutiles répétitions. La critique n'a pas la prétention de se substituer à l'art du peintre, et de
donner de ses œuvres une idée exacte et en quelque sorte vivante. Tout ce qu'elle peut faire est
de démêler les facultés caractéristiques de chaque individualité. Et quand elle la fait, elle n'est
pas tenue de recommencer à chaque instant. Car, ■— bien qu'il y ait des réserves à faire en ce
qui concerne nos contemporains,—un talent d'un ordre élevé se retrouve généralement dans toute
sa cohésion, quelle que soit l'œuvre par laquelle il se manifeste. Sans doute, parmi ses diverses
manifestations, il y a lieu de choisir; ceci peut être meilleur et cela moins bon; mais ces
nuances sont insignifiantes en comparaison des éléments essentiels au tempérament de l'artiste,
éléments communs à tous ses ouvrages, signes certains et toujours reconnaissables d'une
personnalité à part.

Appliquant cette observation à M. Burne Jones, nous pouvons dire que ses envois de cette
année à la Grosvenor Gallery confirment l'opinion que nous avons déjà émise sur les tendances
de son talent. S'il n'a rien qui approche de l'intensité du sentiment dramatique de son Merlin1
de l'an dernier, il n'avait l'an dernier rien de supérieur, au point de vue de la pratique et de la
couleur, à son Chant d'amour (n° 108) de cette année. Ce tableau a été peint en 1873. Les six
figures allégoriques du Jour, de la Nuit, et des Quatre Saisons, remontent à une époque

1. « An allegorical représentation of rain as a reviving rather than a destructive élément. » Grosvenor Notes, par Henry Blackburn.

2. Voir l'Art, }' année, tome III, page 80, l'eau-forte de Lalauze d'après le tableau de Burne Jones, the Beguiling of Merlin.
 
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