l'autre, ne saurait être retranché. La liberté de l'être humain
n'est ni conçue, ni concevable hors le groupement familial
qui ne conçoit pas non plus la sienne hors de son enclos et
de ses dieux, le groupement familial voisin la limitant de
toute part. La société humaine entière plonge dans la divi-
nité diffuse de la nature personnifiée par les dieux qui la
rattachent à elle par les mille liens du rite où la loi prend
son appui. La sainteté du sol est une réalité d'autant plus
inexorable qu'elle représente un style spirituel plus menacé
par la tribu rivale, et plus difficile à maintenir. L'univers
moral est un bloc.
Or, à ce moment-là, la Xoana, l'idole primitive taillée dans
du bois d'olivier, n'est qu'un embryon presque informe, une
poupée pauvrement équarrie où les formes sont indiquées
par le procédé symbolique de l'enfant qui dessine sans
regarder et fait un grand rectangle pour le corps, un rec-
tangle plus petit pour la tête, deux rectangles plus étroits
et plus allongés pour les bras (i). Elle est, aux statues du
siècle suivant, ce que sont aux plus vieux sanctuaires de
marbre ces maisons de paysan qu'on voit encore de nos
jours dans certaines campagnes grecques : quatre poteaux
verticaux qui deviendront le péristyle, quatre poteaux hori-
zontaux qui deviendront l'architrave (2). Elle satisfait au
plus fruste des besoins spirituels, comme cette cabane au
plus fruste des besoins matériels. Presque aucune diffé-
renciation n'existe encore, dans l'esprit de qui les a faites,
entre les éléments naturels que l'une et l'autre utilisent
pour la croyance ou l'abri et le sens de cette croyance et
le confort de cet abri. La gangue qui l'étreint, c'est la croyance
commune. Les membres en sont prisonniers, comme l'indi-
vidu du principe social dont il n'ose, et ne peut, et ne veut
pas s'affranchir, dont il ne songe même pas à s'affranchir,
parce que cet affranchissement prématuré entraînerait tout
de suite sa perte. Il ignore les rapports qui le rivent à ce
principe, le régime des castes les lui imposant pour son
(!) Fig. I.
(2) Fig. 76.
— 18 —
n'est ni conçue, ni concevable hors le groupement familial
qui ne conçoit pas non plus la sienne hors de son enclos et
de ses dieux, le groupement familial voisin la limitant de
toute part. La société humaine entière plonge dans la divi-
nité diffuse de la nature personnifiée par les dieux qui la
rattachent à elle par les mille liens du rite où la loi prend
son appui. La sainteté du sol est une réalité d'autant plus
inexorable qu'elle représente un style spirituel plus menacé
par la tribu rivale, et plus difficile à maintenir. L'univers
moral est un bloc.
Or, à ce moment-là, la Xoana, l'idole primitive taillée dans
du bois d'olivier, n'est qu'un embryon presque informe, une
poupée pauvrement équarrie où les formes sont indiquées
par le procédé symbolique de l'enfant qui dessine sans
regarder et fait un grand rectangle pour le corps, un rec-
tangle plus petit pour la tête, deux rectangles plus étroits
et plus allongés pour les bras (i). Elle est, aux statues du
siècle suivant, ce que sont aux plus vieux sanctuaires de
marbre ces maisons de paysan qu'on voit encore de nos
jours dans certaines campagnes grecques : quatre poteaux
verticaux qui deviendront le péristyle, quatre poteaux hori-
zontaux qui deviendront l'architrave (2). Elle satisfait au
plus fruste des besoins spirituels, comme cette cabane au
plus fruste des besoins matériels. Presque aucune diffé-
renciation n'existe encore, dans l'esprit de qui les a faites,
entre les éléments naturels que l'une et l'autre utilisent
pour la croyance ou l'abri et le sens de cette croyance et
le confort de cet abri. La gangue qui l'étreint, c'est la croyance
commune. Les membres en sont prisonniers, comme l'indi-
vidu du principe social dont il n'ose, et ne peut, et ne veut
pas s'affranchir, dont il ne songe même pas à s'affranchir,
parce que cet affranchissement prématuré entraînerait tout
de suite sa perte. Il ignore les rapports qui le rivent à ce
principe, le régime des castes les lui imposant pour son
(!) Fig. I.
(2) Fig. 76.
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