cisme depuis deux ou trois cents ans, et les porter d'un seul
faisceau à la conquête d'une unité spirituelle que la connais-
sance, après l'avoir ruinée au cœur de l'homme, vient réveiller
dans son cerveau. Elle est, pour ainsi dire, une articulation
mouvante. Les Vénitiens, en attendant Rubens (i), achève-
ront sa tâche en faisant de la terre, du ciel, des eaux, de tous
les reflets errants entre la terre et le ciel et les eaux, les com-
plices universels de cette communion qui va servir de contre-
poids, dans le domaine esthétique, à un individualisme for-
cené dans le domaine social. Qui ne voit que ce contraste, ici
encore, ne fait qu'accuser la dépendance où le grand Italien
se trouve vis-à-vis des instincts les plus élémentaires de sa
race, en l'obligeant à établir, dans sa volonté organisatrice,
une unité que persiste à lui refuser son cœur?
III
L'arabesque — du moins l'arabesque entraînant, dans ses
ondulations rythmiques continues des formes réelles, con-
crètes — est à tel point l'expression nécessaire de l'âme ita-
lienne qu'en plein moyen âge, dès la fin du xiiie siècle, elle
s'inscrit déjà dans les fresques des églises avec une fermeté
qui n'exclut ni l'ingénuité, ni l'amour, ni la tendre exaltation
qui d'abord les caractérise. A ce moment-là, pourtant, la
communion générale des âmes dans le catholicisme à son
apogée est encore profonde en Italie où Dante écrit son
poème, où Thomas d'Aquin vient à peine de disparaître, où
la trace de François d'Assise commence seulement à se dis-
cerner dans les cœurs (2). Le jour où Giotto peint sa Descente
de croix, l'unité morale chrétienne est détruite par un chrétien
et l'esprit de continuité transporté de la mystique dans la
connaissance pour brider l'individualisme où pourtant le
(1) Fig. 49.
(2) Art Médiéval, p. 205.
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faisceau à la conquête d'une unité spirituelle que la connais-
sance, après l'avoir ruinée au cœur de l'homme, vient réveiller
dans son cerveau. Elle est, pour ainsi dire, une articulation
mouvante. Les Vénitiens, en attendant Rubens (i), achève-
ront sa tâche en faisant de la terre, du ciel, des eaux, de tous
les reflets errants entre la terre et le ciel et les eaux, les com-
plices universels de cette communion qui va servir de contre-
poids, dans le domaine esthétique, à un individualisme for-
cené dans le domaine social. Qui ne voit que ce contraste, ici
encore, ne fait qu'accuser la dépendance où le grand Italien
se trouve vis-à-vis des instincts les plus élémentaires de sa
race, en l'obligeant à établir, dans sa volonté organisatrice,
une unité que persiste à lui refuser son cœur?
III
L'arabesque — du moins l'arabesque entraînant, dans ses
ondulations rythmiques continues des formes réelles, con-
crètes — est à tel point l'expression nécessaire de l'âme ita-
lienne qu'en plein moyen âge, dès la fin du xiiie siècle, elle
s'inscrit déjà dans les fresques des églises avec une fermeté
qui n'exclut ni l'ingénuité, ni l'amour, ni la tendre exaltation
qui d'abord les caractérise. A ce moment-là, pourtant, la
communion générale des âmes dans le catholicisme à son
apogée est encore profonde en Italie où Dante écrit son
poème, où Thomas d'Aquin vient à peine de disparaître, où
la trace de François d'Assise commence seulement à se dis-
cerner dans les cœurs (2). Le jour où Giotto peint sa Descente
de croix, l'unité morale chrétienne est détruite par un chrétien
et l'esprit de continuité transporté de la mystique dans la
connaissance pour brider l'individualisme où pourtant le
(1) Fig. 49.
(2) Art Médiéval, p. 205.
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