vertu du « sujet » pour exalter la vertu de l'objet dénué de
tout pittoresque, ou même de la construction métaphysique
pure, n'ayant plus aucun lien visible avec la réalité. La foule
se tournant vers les images sulpiciennes, Courbet quitte les
dieux pour une belle fille endormie dans les foins, Cézanne
pour trois pommes sur un coin de table, d'autres bientôt
pour chercher à mesurer des espaces hypothétiques où rien
ne se passe plus.
Le phénomène est moins nouveau qu'on pourrait le croire.
Quand l'art hellénistique court après le pittoresque, l'homme
puissant s'isole pour sculpter une femme nue (i), ou demande
en vain aux vieux maîtres archaïques le secret des plans
simplifiés et des symétries apparentes. Quand les supports
de la cathédrale s'enrubannent dans les méandres de la
complication sentimentale, quand la sculpture anecdotique
noie les profils du monument, le portrait se complaît dans
sa solitude, et la conception abstraite de la ligne pour la
ligne et de l'ornement pour l'ornement remplacent un peu
partout le souci de la fonction. L'art arabe oublie un beau
jour la destination de la mosquée pour se complaire en
maniaque au jeu sans fin et sans objet des formules géomé-
triques (2) Partout l'effondrement de la clé de voûte sociale
donne à la multitude désaxée le goût du « sujet » anecdo-
tique ou pittoresque qui flatte ses plus médiocres instincts,
ou jette à l'opposé le créateur solitaire dans un mépris har-
gneux du prétexte sentimental qui va tantôt à la brutalité
et tantôt à l'abstraction pure, sans aucune issue, aucun
regard sur le monde émotionnel. Là tout devient niaiserie
écœurante, ici ésotérisme prétentieux.
C'est précisément parce que le « sujet » n'est qu'un pré-
texte, un moyen de gouvernement, en somme, une arme
utilisée par les mythologies et les métaphysiques en pleine
vie pour atteindre et animer le sentiment populaire, et qu'il
n'a rigoureusement aucun sens du point de vue esthétique
dont la recherche du rythme et de l'harmonie est l'unique
(1) Fig. 107.
(2) Fig. 64.
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tout pittoresque, ou même de la construction métaphysique
pure, n'ayant plus aucun lien visible avec la réalité. La foule
se tournant vers les images sulpiciennes, Courbet quitte les
dieux pour une belle fille endormie dans les foins, Cézanne
pour trois pommes sur un coin de table, d'autres bientôt
pour chercher à mesurer des espaces hypothétiques où rien
ne se passe plus.
Le phénomène est moins nouveau qu'on pourrait le croire.
Quand l'art hellénistique court après le pittoresque, l'homme
puissant s'isole pour sculpter une femme nue (i), ou demande
en vain aux vieux maîtres archaïques le secret des plans
simplifiés et des symétries apparentes. Quand les supports
de la cathédrale s'enrubannent dans les méandres de la
complication sentimentale, quand la sculpture anecdotique
noie les profils du monument, le portrait se complaît dans
sa solitude, et la conception abstraite de la ligne pour la
ligne et de l'ornement pour l'ornement remplacent un peu
partout le souci de la fonction. L'art arabe oublie un beau
jour la destination de la mosquée pour se complaire en
maniaque au jeu sans fin et sans objet des formules géomé-
triques (2) Partout l'effondrement de la clé de voûte sociale
donne à la multitude désaxée le goût du « sujet » anecdo-
tique ou pittoresque qui flatte ses plus médiocres instincts,
ou jette à l'opposé le créateur solitaire dans un mépris har-
gneux du prétexte sentimental qui va tantôt à la brutalité
et tantôt à l'abstraction pure, sans aucune issue, aucun
regard sur le monde émotionnel. Là tout devient niaiserie
écœurante, ici ésotérisme prétentieux.
C'est précisément parce que le « sujet » n'est qu'un pré-
texte, un moyen de gouvernement, en somme, une arme
utilisée par les mythologies et les métaphysiques en pleine
vie pour atteindre et animer le sentiment populaire, et qu'il
n'a rigoureusement aucun sens du point de vue esthétique
dont la recherche du rythme et de l'harmonie est l'unique
(1) Fig. 107.
(2) Fig. 64.
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