essentielles de l'objet, ne vise plus qu'à l'absorber dans la
vie flottante du symbole. Celle-ci poursuit sa vérité, et
celle-là la vérité. Si l'une et l'autre résistent, dans leurs
grandes heures, à d'aussi redoutables intransigeances, c'est
qu'il y a un déplacement constant, selon les besoins de ces
heures, des vérités que nous poursuivons en nous-mêmes et
hors de nous-mêmes, et que l'une, en saisissant l'objet,
aperçoit son propre mystère, comme l'autre, en voulant dire
ce mystère, est forcée de saisir l'objet. Il n'en est pas moins
vrai qu'un Occidental ne comprendra pas l'art de l'Orient,
qu'un Oriental ne comprendra pas l'art de l'Occident s'ils
se refusent à explorer les deux bords de l'abîme où fleurissent
deux illusions d'une fécondité égale, celle qui définit le monde
par ce qui se passe dans l'homme, celle qui définit l'homme
par ce qui se passe dans le monde. Si les Égyptiens me parais-
sent avoir réalisé un accord miraculeux de ces deux illu-
sions grandioses (i), c'est peut-être que les éléments géo-
graphiques, ethniques, culturaux de l'Orient et de l'Occident
fusionnaient en eux à une égale profondeur, avec une égale
puissance. L'accord ne s'est pas reproduit, sauf peut-être
dans la musique. Qui sait si un jour ou l'autre, grâce
à l'initiation de la musique, il ne se reproduira pas?
L'étrange, c'est qu'aussi loin qu'on remonte, soit dans le
passé de l'Asie, soit dans celui de l'Europe, on retrouve ces
caractères, même avant que l'Égypte, par l'intermédiaire de
la Grèce, se soit répandue sur ces deux versants du vieux
monde pour leur transmettre les principes où chacun d'eux
allait fixer ses aptitudes et les développer logiquement jus-
qu'à se définir par elles. Les œuvres assyriennes, qui ne visent
qu'à l'expression, montrent déjà des monstres combinés
en vue d'affirmer quelque idée centrale dont les formes de la
nature ne servent qu'à souligner le caractère, en l'espèce
la violence et la cruauté. Les œuvres mycéniennes, par contre,
ignorent les monstres composites et visent à la vérité. Que
dis-je? Cent siècles, deux cents siècles avant peut-être, les
troglodytes du Périgord et des Pyrénées ne songent qu'à
(i) Fig. 97.
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vie flottante du symbole. Celle-ci poursuit sa vérité, et
celle-là la vérité. Si l'une et l'autre résistent, dans leurs
grandes heures, à d'aussi redoutables intransigeances, c'est
qu'il y a un déplacement constant, selon les besoins de ces
heures, des vérités que nous poursuivons en nous-mêmes et
hors de nous-mêmes, et que l'une, en saisissant l'objet,
aperçoit son propre mystère, comme l'autre, en voulant dire
ce mystère, est forcée de saisir l'objet. Il n'en est pas moins
vrai qu'un Occidental ne comprendra pas l'art de l'Orient,
qu'un Oriental ne comprendra pas l'art de l'Occident s'ils
se refusent à explorer les deux bords de l'abîme où fleurissent
deux illusions d'une fécondité égale, celle qui définit le monde
par ce qui se passe dans l'homme, celle qui définit l'homme
par ce qui se passe dans le monde. Si les Égyptiens me parais-
sent avoir réalisé un accord miraculeux de ces deux illu-
sions grandioses (i), c'est peut-être que les éléments géo-
graphiques, ethniques, culturaux de l'Orient et de l'Occident
fusionnaient en eux à une égale profondeur, avec une égale
puissance. L'accord ne s'est pas reproduit, sauf peut-être
dans la musique. Qui sait si un jour ou l'autre, grâce
à l'initiation de la musique, il ne se reproduira pas?
L'étrange, c'est qu'aussi loin qu'on remonte, soit dans le
passé de l'Asie, soit dans celui de l'Europe, on retrouve ces
caractères, même avant que l'Égypte, par l'intermédiaire de
la Grèce, se soit répandue sur ces deux versants du vieux
monde pour leur transmettre les principes où chacun d'eux
allait fixer ses aptitudes et les développer logiquement jus-
qu'à se définir par elles. Les œuvres assyriennes, qui ne visent
qu'à l'expression, montrent déjà des monstres combinés
en vue d'affirmer quelque idée centrale dont les formes de la
nature ne servent qu'à souligner le caractère, en l'espèce
la violence et la cruauté. Les œuvres mycéniennes, par contre,
ignorent les monstres composites et visent à la vérité. Que
dis-je? Cent siècles, deux cents siècles avant peut-être, les
troglodytes du Périgord et des Pyrénées ne songent qu'à
(i) Fig. 97.
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