140
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
manganèse : le manganèse, qui donne au verre la coloration violette,
avait pour effet de neutraliser la coloration jaunâtre due à l’oxyde de
fer. C’était évidemment le magnes, lapis de Pline, et le mot nitrum
devait désigner non le nitrate de potasse, mais le natron ou la soude
qu’on trouve abondamment en Egypte et qui est l’un des éléments du
verre. Les vitres de Pompeï avaient de trois à cinq millimètres
d’épaisseur et paraissent avoir été coulées.
L’usage des vitres, quoique limité d’abord aux habitations de
luxe et aux édifices publics, dut se propager rapidement en Gaule où
la clôture des baies était une véritable nécessité. Le témoignage de
Lactance au ive siècle et celui de saint Jérôme n’apportent aucun
renseignement nouveau, sinon l’indication du verre fondu en lames
minces '. Il me parait difficile de conclure de là au soufflage du verre
à cette époque.
On a cru reconnaître, dans une lettre de Sidoine Apollinaire,
relative à l’église de Lyon, la description de vitres colorées ; j’y verrais
bien plutôt la description d’une mosaïque d’émail.
L’usage du verre pour la clôture des baies ne se généralisa qu’au
vie siècle. Fortunat, évêque de Poitiers, et Grégoire de Tours célèbrent
tour à tour l’effet merveilleux du verre aux fenêtres des nouvelles
églises; mais il est impossible de trouver dans les lettres de Fortunat,
et notamment dans la lettre adressée à l’évêque de Ravenne, autre
chose que la description de la lumière blanche réfléchie sur la
mosaïque à fond d’or.
Emicat aida potens solido perfecta métallo
Quo sine nocte manet continuata dies.
Vers la même époque, l’empereur Justinien achevait à Constan-
tinople la construction de Sainte-Sophie, et les vitres étaient
certainement incolores.
Au viiie siècle la France fournissait déjà des verriers à l’Angleterre
et à T Allemagne. Le verre coloré est mentionné pour la première fois
par Anastase, dans la description des fenêtres absidales de l’église de
Latran 1 2. Mais c’est seulement au xie siècle que Léon d’Ostie cite les
plaques de verre assemblées par des plombs et consolidées par des
armatures en fer qui fermaient les baies de la nef dans l’église du
Mont-Cassin : Fenestras omnes navis et titiili plambo ac vitro
compactis tabulis ferroque connexis inclusit.
1. Fenestræ quæ vitro in tenues laminas fuso obductæ erant.
2. Fenestras de absida ex vitro diversis coloribus conclusit.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
manganèse : le manganèse, qui donne au verre la coloration violette,
avait pour effet de neutraliser la coloration jaunâtre due à l’oxyde de
fer. C’était évidemment le magnes, lapis de Pline, et le mot nitrum
devait désigner non le nitrate de potasse, mais le natron ou la soude
qu’on trouve abondamment en Egypte et qui est l’un des éléments du
verre. Les vitres de Pompeï avaient de trois à cinq millimètres
d’épaisseur et paraissent avoir été coulées.
L’usage des vitres, quoique limité d’abord aux habitations de
luxe et aux édifices publics, dut se propager rapidement en Gaule où
la clôture des baies était une véritable nécessité. Le témoignage de
Lactance au ive siècle et celui de saint Jérôme n’apportent aucun
renseignement nouveau, sinon l’indication du verre fondu en lames
minces '. Il me parait difficile de conclure de là au soufflage du verre
à cette époque.
On a cru reconnaître, dans une lettre de Sidoine Apollinaire,
relative à l’église de Lyon, la description de vitres colorées ; j’y verrais
bien plutôt la description d’une mosaïque d’émail.
L’usage du verre pour la clôture des baies ne se généralisa qu’au
vie siècle. Fortunat, évêque de Poitiers, et Grégoire de Tours célèbrent
tour à tour l’effet merveilleux du verre aux fenêtres des nouvelles
églises; mais il est impossible de trouver dans les lettres de Fortunat,
et notamment dans la lettre adressée à l’évêque de Ravenne, autre
chose que la description de la lumière blanche réfléchie sur la
mosaïque à fond d’or.
Emicat aida potens solido perfecta métallo
Quo sine nocte manet continuata dies.
Vers la même époque, l’empereur Justinien achevait à Constan-
tinople la construction de Sainte-Sophie, et les vitres étaient
certainement incolores.
Au viiie siècle la France fournissait déjà des verriers à l’Angleterre
et à T Allemagne. Le verre coloré est mentionné pour la première fois
par Anastase, dans la description des fenêtres absidales de l’église de
Latran 1 2. Mais c’est seulement au xie siècle que Léon d’Ostie cite les
plaques de verre assemblées par des plombs et consolidées par des
armatures en fer qui fermaient les baies de la nef dans l’église du
Mont-Cassin : Fenestras omnes navis et titiili plambo ac vitro
compactis tabulis ferroque connexis inclusit.
1. Fenestræ quæ vitro in tenues laminas fuso obductæ erant.
2. Fenestras de absida ex vitro diversis coloribus conclusit.