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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Espagne s’est chargé d’éclaircir cette question fort embrouillée et
difficile à tirer au clair. La cathédrale de Tolède possédait-elle
l’œuvre d’Alonso Cano ou l’œuvre de Pedro de Mena ? Les uns disaient
oui, les autres non. Bref, après avoir compulsé et pesé les témoignages
pour ou contre, il s’est trouvé que Tolède ne possédait que l’œuvre
de l’élève, de Pedro de Mena et que le véritable Alonso Cano était
bien celui de Paris. Une œuvre aussi originale devait naturellement
être imitée plus d’une fois et c’est l’une de ces imitations que renferme
la collection Goupil ; œuvre d’un élève d’Alonso Cano, de Pedro de
Mena lui-même peut-être, qui une fois lancé dans la voie de l’imitation
de son maître et sûr du succès ne dut pas s’arrêter en si beau chemin,
cette statuette de bois peint est une bonne réplique du morceau le
plus fameux de la sculpture espagnole.
Nous ne voudrions pas quitter le chapitre de la sculpture sans
mentionner plusieurs Vierges françaises du xive et du xve siècle ;
l’une d’elles, en bois, plus petite que nature, nous a paru particulière-
ment digne d’être notée. Trois monumentales figures de saints, du
xve siècle, sont de bons spécimens de la sculpture en bois telle qu’on
l’a pratiquée en Allemagne. Elles proviennent de Francfort, mais
est-ce là leur pays d’origine? Nous ne le jurerions pas. Quoi qu’il en
soit, un saint Jean, un roi armé de toutes pièces ettenant en main le
modèle d’une église, un saint évêque dont nous mettons la reproduction
sous les yeux du lecteur, sont d’excellents échantillons de cette
sculpture allemande trop peu connue en France, et dont on voit de
si beaux exemples au Musée germanique de Nuremberg et au
Musée bavarois de Munich. Quant à les attribuer à tel ou tel maître,
on nous permettra de garder sur ce point un silence prudent ; il
faudrait pour cela entreprendre une longue étude dont les éléments
sont fort disséminés et au surplus les tailleurs d’images allemands,
sauf un petit nombre, n’ont pas imprimé à leurs figures des caractères
assez tranchés pour que Ton puisse, en l’état de la question, proposer
une attribution certaine. Cette sculpture, largement traitée, produit
toujours, à une distance convenable, beaucoup d’effet ; c’est de la
sculpture décorative admirablement conçue et supérieurement
exécutée.
La sculpture plus moderne était, elle aussi, représentée chez
Albert Goupil. Sans nous arrêter à quelques médaillons en cire du
xvie et du xvne siècle, dont quelques-uns sont intéressants, mention-
nons, parmi les œuvres tout à fait contemporaines, une charmante
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Espagne s’est chargé d’éclaircir cette question fort embrouillée et
difficile à tirer au clair. La cathédrale de Tolède possédait-elle
l’œuvre d’Alonso Cano ou l’œuvre de Pedro de Mena ? Les uns disaient
oui, les autres non. Bref, après avoir compulsé et pesé les témoignages
pour ou contre, il s’est trouvé que Tolède ne possédait que l’œuvre
de l’élève, de Pedro de Mena et que le véritable Alonso Cano était
bien celui de Paris. Une œuvre aussi originale devait naturellement
être imitée plus d’une fois et c’est l’une de ces imitations que renferme
la collection Goupil ; œuvre d’un élève d’Alonso Cano, de Pedro de
Mena lui-même peut-être, qui une fois lancé dans la voie de l’imitation
de son maître et sûr du succès ne dut pas s’arrêter en si beau chemin,
cette statuette de bois peint est une bonne réplique du morceau le
plus fameux de la sculpture espagnole.
Nous ne voudrions pas quitter le chapitre de la sculpture sans
mentionner plusieurs Vierges françaises du xive et du xve siècle ;
l’une d’elles, en bois, plus petite que nature, nous a paru particulière-
ment digne d’être notée. Trois monumentales figures de saints, du
xve siècle, sont de bons spécimens de la sculpture en bois telle qu’on
l’a pratiquée en Allemagne. Elles proviennent de Francfort, mais
est-ce là leur pays d’origine? Nous ne le jurerions pas. Quoi qu’il en
soit, un saint Jean, un roi armé de toutes pièces ettenant en main le
modèle d’une église, un saint évêque dont nous mettons la reproduction
sous les yeux du lecteur, sont d’excellents échantillons de cette
sculpture allemande trop peu connue en France, et dont on voit de
si beaux exemples au Musée germanique de Nuremberg et au
Musée bavarois de Munich. Quant à les attribuer à tel ou tel maître,
on nous permettra de garder sur ce point un silence prudent ; il
faudrait pour cela entreprendre une longue étude dont les éléments
sont fort disséminés et au surplus les tailleurs d’images allemands,
sauf un petit nombre, n’ont pas imprimé à leurs figures des caractères
assez tranchés pour que Ton puisse, en l’état de la question, proposer
une attribution certaine. Cette sculpture, largement traitée, produit
toujours, à une distance convenable, beaucoup d’effet ; c’est de la
sculpture décorative admirablement conçue et supérieurement
exécutée.
La sculpture plus moderne était, elle aussi, représentée chez
Albert Goupil. Sans nous arrêter à quelques médaillons en cire du
xvie et du xvne siècle, dont quelques-uns sont intéressants, mention-
nons, parmi les œuvres tout à fait contemporaines, une charmante