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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 31.1885

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Nr. 5
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Ephrussi, Charles: La "Divine comédie" illustrée par Sandro Botticelli, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24592#0430

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412

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Les deux poètes s’arrêtent longtemps devant un de ces derniers :

Quelle main l’étreignit, puissante, irrésistible ?

Je ne sais ; je n’ai vu que la chaîne terrible

Qui lui rivait les bras, l’une au dos, l’autre au cœur.

Tout à l’entour du corps de ce monstre féroce,

Du cou jusqu'à l’endroit qui sortait de la fosse,

De la chaîne cinq fois tournait l’airain vainqueur.

Les bras qu’il a levés sont cloués pour jamais.

Antée, le robuste fils de la Terre, se charge de descendre les
voyageurs dans le dernier cercle. Bien que le poète dise nettement
qu’il étendit les deux mains, le man distese, Botticelli le montre
saisissant d’une seule main Virgile auquel Dante s’attache en un
mouvement d’abandon et de peur très heureusement rendu; les deux
corps ne forment qu’un faisceau :

Poi fece si eh’un f'ascio er’egli ed io.

Secondée par le sujet même, l’anatomie est plus puissante ;
l’expression douloureuse ou désolée des têtes est pathétique et non
sans noblesse. Chose curieuse, ces grandes figures offrent une
frappante analogie avec les types favoris de Pollaiuolo, avec ceux
entre autres des gravures du Combat des hommes nus et du Combat
des Centaures ; dans la facture même, on saisit plus d’une trace du
maniérisme ordinaire de Pollaiuolo. Si les petites figures, quatre
fois répétées, de Virgile et de Dante ne venaient attester la pater-
nité de Botticelli, on serait invinciblement tenté de donner cette
grandiose page au peintre médailleur des Médicis.

En quittant Y Enfer pour s’engager sur la route du Purgatoire,
Botticelli n’a pas rencontré le haut style ni la puissante imagination.
Anatomie encore insuffisante des petites figures nues semées çà et là,
vides nombreux, nul ensemble de composition, insignifiance du décor,
tel est le caractère général de ces pages aussi pauvres que les précé-
dentes. Sans être exempt de ces défauts, le chant X offre plus d’intérêt ;
les deux voyageurs sont entrés dans le premier cercle du Purgatoire
où gémissent les orgueilleux, condamnés à ramper sous le fardeau
de lourdes pierres. A ce supplice physique se joint une leçon morale :
sur un plateau étroit où mène un sentier tournant et escarpé, des bas-
reliefs, représentant des exemples d’humilité empruntés à l’Evangile,
à la Bible et à l’Histoire romaine, rappellent ces orgueilleux au sen-
 
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