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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
yeux bleus, tout cela vit. L'enfant va parler, il va rire, il existe. On
retrouve la même facture spirituelle clans un remarquable portrait
d’homme âgé, appartenant à M. Coquelin et dans celui de Lenormant
du Coudray, que lui procura son ami le négociant-amateur d'Orléans,
Desfriches. Perronneau écrivait à ce dernier d’intéressantes lettres
qui nous mettent au courant de ses déplacements et de ses travaux.
Mais nous ne voulons pas nous étendre davantage sur l’excellent
artiste, sachant qu’un érudit termine en ce moment pour la Gazette
un travail d’ensemble où pleine et entière justice lui sera rendue.
On s’étonnera de ne rencontrer, pas plus au Louvre qu’à la rue
de Sèze, quelqu’une de ces délicieuses tètes de jeunes filles peintes
au pastel par Boucher. C’est une lacune regrettable. Les meilleurs
maîtres usaient, du reste, du procédé dans la seconde partie du siècle
dernier, et il nous suffira de citer Fragonard qui s’y est essayé;
Ducreux, un bon élève de La Tour, dont les portraits par lui-même
sont très expressifs ; Drouais ; Alexis Loir, un inventeur de systèmes
pour fixer le pastel sur le métal, qui s’est révélé bien sec dans le
portrait de Pigalle. Les dames ne manquent pas dans cetteliste. Le
pastel est un art qui leur plaît et où elles brillent. Nous avons vu de
Mmc Roslin, la femme du peintre suédois, un portrait de Dumont le
Romain. Mmo Guyard, née Labille des Yertus, est une de celles qui
s’y sont fait une belle place par leur remarquable exécution. Les por-
traits des filles de Louis XY : Mme Adélaïde avec sa figure ingrate et
maussade, et Mme Yictoire à l’air de bonne bourgeoise, toutes deux
reconnaissables à leurs hautes coiffures poudrées, font l’ornement de
la salle du Louvre. Son meilleur morceau, qu’elle fit pour sa réception
à l’Académie, est le portrait du sculpteur Pajou, très bien dessiné,
très énergique, et sans aucune trace de mollesse dans le procédé.
N’oublions pas celui si spirituellement fait du peintre Bachelier.
Quand elle se présenta à l’Académie, Mme Guyard avait pour
concurrente Mme Lebrun, alors dans tout l’éclat delà jeunesse et du
talent. L’Académie se montra galante en recevant ces deux dames,
qui honoraient leur art.
Cette dernière a donné bien du charme au maniement du pastel,
qu’elle employa étant toute jeune encore, sous la direction de son
père, Louis Yigée, un pastelliste assez médiocre, mais capable, cepen-
dant, de lui donner d’utiles leçons. L’exposition actuelle nous fait
voir de lui les portraits assez plats de Le Riche de la Poupelinière
et de M!le Dangeville, bien que, dans ses Souvenirs, Mme Lebrun dise
que certains d’entre eux seraient dignes de La Tour. Elle ajoute que
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
yeux bleus, tout cela vit. L'enfant va parler, il va rire, il existe. On
retrouve la même facture spirituelle clans un remarquable portrait
d’homme âgé, appartenant à M. Coquelin et dans celui de Lenormant
du Coudray, que lui procura son ami le négociant-amateur d'Orléans,
Desfriches. Perronneau écrivait à ce dernier d’intéressantes lettres
qui nous mettent au courant de ses déplacements et de ses travaux.
Mais nous ne voulons pas nous étendre davantage sur l’excellent
artiste, sachant qu’un érudit termine en ce moment pour la Gazette
un travail d’ensemble où pleine et entière justice lui sera rendue.
On s’étonnera de ne rencontrer, pas plus au Louvre qu’à la rue
de Sèze, quelqu’une de ces délicieuses tètes de jeunes filles peintes
au pastel par Boucher. C’est une lacune regrettable. Les meilleurs
maîtres usaient, du reste, du procédé dans la seconde partie du siècle
dernier, et il nous suffira de citer Fragonard qui s’y est essayé;
Ducreux, un bon élève de La Tour, dont les portraits par lui-même
sont très expressifs ; Drouais ; Alexis Loir, un inventeur de systèmes
pour fixer le pastel sur le métal, qui s’est révélé bien sec dans le
portrait de Pigalle. Les dames ne manquent pas dans cetteliste. Le
pastel est un art qui leur plaît et où elles brillent. Nous avons vu de
Mmc Roslin, la femme du peintre suédois, un portrait de Dumont le
Romain. Mmo Guyard, née Labille des Yertus, est une de celles qui
s’y sont fait une belle place par leur remarquable exécution. Les por-
traits des filles de Louis XY : Mme Adélaïde avec sa figure ingrate et
maussade, et Mme Yictoire à l’air de bonne bourgeoise, toutes deux
reconnaissables à leurs hautes coiffures poudrées, font l’ornement de
la salle du Louvre. Son meilleur morceau, qu’elle fit pour sa réception
à l’Académie, est le portrait du sculpteur Pajou, très bien dessiné,
très énergique, et sans aucune trace de mollesse dans le procédé.
N’oublions pas celui si spirituellement fait du peintre Bachelier.
Quand elle se présenta à l’Académie, Mme Guyard avait pour
concurrente Mme Lebrun, alors dans tout l’éclat delà jeunesse et du
talent. L’Académie se montra galante en recevant ces deux dames,
qui honoraient leur art.
Cette dernière a donné bien du charme au maniement du pastel,
qu’elle employa étant toute jeune encore, sous la direction de son
père, Louis Yigée, un pastelliste assez médiocre, mais capable, cepen-
dant, de lui donner d’utiles leçons. L’exposition actuelle nous fait
voir de lui les portraits assez plats de Le Riche de la Poupelinière
et de M!le Dangeville, bien que, dans ses Souvenirs, Mme Lebrun dise
que certains d’entre eux seraient dignes de La Tour. Elle ajoute que