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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 9.1883 (Teil 3)

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Gauchez, Léon: La gravure & la lithographie au Salon de 1883, [2]
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https://doi.org/10.11588/diglit.19296#0142

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Cartouche composé par H. Ghavelot, gravé par N. Le Mire.

V

Ce n'est certes pas pour M. Charles Waltner que je
m'aviserai jamais de plaider la moindre circonstance atté-
nuante. Être si merveilleusement organisé, avoir tant de
talent, tout ce qu'il faut pour être un maître, et gâcher trop
souvent comme à plaisir les dons les plus précieux, c'est
absolument impardonnable. D'indulgence, M. Waltner n'en
mérite point; il la dédaignerait et avec raison; artiste de
race trop supérieure pour qu'on lui tienne un autre langage
que celui de la vérité, il doit savoir l'entendre, fût-elle des
plus dures. Le Christ devant Pilate, de M. Munkacsy, n'était
guère de nature à l'inspirer, je n'en disconviens pas, mais
c'était motif de plus, du moment qu'il s'en chargeait, pour
en faire une estampe qui eût métamorphosé ce tableau, si
étrangement surfait, en une œuvre digne du nom de Waltner,
au lieu d'en tirer cette mauvaise planche dont tous les person-
nages habillés de noir entrent dans les fonds en ne laissant
subsister que trois ou quatre notes blanches de la plus
complète dureté.

Des trois gravures réunies dans un même cadre, le fameux
Portrait de Madame Daey, ce chef-d'œuvre autrefois l'honneur
de la collection Van Loon, d'Amsterdam, ne se distingue que
par son extrême mollesse; — c'est massacrer Rembrandt; —
Mrs. Graham, un des plus célèbres portraits en pied de
Gainsborough, est peut-être plus irritant encore, précisément
parce qu'il démontre à l'évidence combien l'art de M. Waltner
est souverain lorsqu'il daigne faire œuvre d'art,^-Mrs. Graham
est superbe! — et combien il se moque et de son talent et du
public lorsqu'il déshonore un morceau si accompli en sabrant
abominablement et le ciel et la colonne placée près de la
séduisante Anglaise.

Donc, l'Exposition de M. Waltner est indigne de lui r —
Vous allez trop vite en besogne. Avec ce diable d'homme, on
ne s'en tire pas si aisément que cela. — Avec M. Munkacsy,
il n'a produit rien qui vaille, il a fort méchamment mis Rem-
brandt à mal, et il s'est amusé à pratiquer sur Gainsborough
une olla-podrida où le pire et le parfait s'entre-détruisent. —
Vous ne vous doutez pas de ce dont sa fantaisie est capable!
N'a-t-il pas une troisième gravure : le Chasseur, d'après
M. Hermann-Léon, qui n'a point, que je sache, la prétention
de poser pour un maître? Eh bien, la postérité prendra son

i. Voir l'Art, 9« année, tome II, page 177. cl tome III. pai^c 9g.

tableau pour un chef-d'œuvre, si elle le juge d'après une
simple épreuve de la splendide eau-forte que la folle du logis
a décidé M. Waltner à nous donner. Le caractère, la tour-
nure, la tenue, le faire, tout est à l'unisson ; c'est la perfection
même. Jamais on ne louera suffisamment pareille estampe.
Maudit soit M. Waltner d'avoir exposé les trois autres! Il allait
aux nues avec son Hermann-Léon si magistralement travesti.

Qui se moque également du monde avec le plus imper-
turbable sang-froid, c'est M. Whistler, l'auteur de tant d'eaux-
fortes excellentissimes. Sous prétexte de Vues de Venise, lui
qui en a signé d'adorables, le voilà lancé dans le parti-pris le
plus violent, en pleine pochade à outrance.

Il ne faut pas que je lâche si vite M. Waltner ; revenons-y;
il mérite de recevoir un peu plus sur les doigts pour ses
coupables incartades ; il est trop criminel envers lui-même pour
ne pas lui rappeler qu'un sien élève, M. Charles Koepping, de
Dresde, rend admirablement M. Munkacsy,— voir les Rôdeurs
de nuit, pour lesquels je donne de grand cœur une foule de
Christ devant Pilate. — M. Koepping est un graveur qui pro-
duit de vraies eaux-fortes de peintre. Il s'est trompé pour la
première fois avec sa Frou-frou d'après M. Clairin; les fonds
n'en sont pas sacrifiés, ils eussent dû être assourdis, « neu-
trifiés»; l'ensemble manque de brillant, mais quelle énorme
dépense de talent, néanmoins !

Très bien les Accordailles de M. Léopold Flameng, d'après
Henry Mosler; c'est beaucoup plus naïf, infiniment plus
sincère, et sans abus de noir et de blanc, et bien plus exempt
de chic que certaines des œuvres dernières de l'émincnt
artiste. A applaudir sans réserve.

Dans le Gambetta de M. Artiguc, la tête est belle, l'expres-
sion heureuse; il est fâcheux que le fond pèche par excès de
travaux et que le vêtement manque de franchise; on le dirait
en bois.

Les Mouettes de M. Bracquemond sont du Bracquemond
de derrière les fagots, d'une individualité très accentuée, d'une
exécution non moins originale que l'œuvre elle-même, avec un
accent de japonisme d'une saveur d'autant plus attrayante
qu il reste à l'état d'accent; ce raffiné ne verse pas dans le pas-
tiche.

Son Millet — Labor — me satisfait moins; le premier et
le second état, de la plus superbe crânerie, ont fait les délices
de tous ceux qui ont eu la bonne fortune de les voir, mais
Waltner l'a hanté et voilà que cet indépendant s'est mis à user
 
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