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Bourdin père et fils, sculpteurs Orléanais, à propos du tombeau
de Sainl-Valàrien, près de Sens, par Eugène Vaudin, ancien
maire, membre de la Société des Sciences historiques de
l'Yonne, et de l'Académie des Beaux-Arts de Rome, Cheva-
lier de l'ordre de Saint-Sylvestre. In-8° de 3o pages. Paris,
chez H. Champion, libraire-éditeur, 17, Quai Malaquais,
1883.
Ouvrez le tome Ier de la septième année de l'Art — 1881
— à la page 3oo, et vous y trouverez un intéressant article
intitulé : Michel Bourdin, Orléanais, dont l'auteur, M. J. Lobet,
nous apprend que c'est à un érudit, à un artiste de l'Yonne, à
M. Eugène Vaudin que l'on doit d'être enfin fixé sur le lieu de
naissance du « statuaire favori du cardinal de Richelieu ».
Cédant aux instances de l'excellent M. Eudoxe Marcille,
le fanatique de Chardin et de Prud'hon, à qui est confiée la
direction du Musée d'Orléans, M. Vaudin vient de condenser
dans une très utile brochure tout ce qu'il a pu réunir de ren-
seignements sur les Bourdin. C'est un simple service qu'a
voulu rendre sa modestie ; il n'a d'autre prétention que d'avoir
posé « une pierre d'attente sur laquelle d'autres, plus habiles
ou plus heureux, pourront asseoir quelque jour un édifice
durable en l'honneur de la famille Bourdin ».
Il faut savoir grand gré à M. Vaudin de ses intelligentes
recherches,car, ainsi qu'il ne le dit que trop justement, «l'his-
toire de l'art français est encore à faire ».
Sa découverte — c'en est bien une, tant le monument
était oublié — sa découverte à Saint-Valérien 1 du tombeau
« de Pierre Dauvet, homme de guerre du temps de Louis XIII
et descendant de Jean Dauvet, procureur général du Parle-
ment de Paris, connu par le rôle qu'il joua dans le mémorable
procès-de Jacques-Cœur, argentier du roi Charles VII », cette
découverte est tout à l'honneur de la sagacité du savant
artiste dont nous reproduisons le dessin et la description de
cette œuvre capitale de Michel Bourdin :
Le tombeau de Pierre Dauvet comprend deux parties princi-
pales : le piédestal posé sur un socle en granit gris tacheté et l'en-
tablement surmonté d'ornements disposés en forme de fronton. De
la variété des marbres qui le composent, encore rehaussés par les
bronzes dorés et argentés, qui lui servent d'ornement, résulte un
ensemble de décoration polychrome d'un heureux effet. La base est
en marbre rouge, le dé et les pilastres supportant le sarcophage en
marbre blanc et ce dernier en marbre noir. Des ornements en
i. A quinze kilomètres de Sens.
rocaille, heureusement disposés, encadrent trois écussons armoriés
en bronze.
Sur la partie centrale du piédestal est disposé un cartouche dont
le tympan brisé porte deux génies ailés ou plutôt deux anges, d'une
grâce et d'un sentiment remarquables. Ils tiennent d'une main une
palme, de l'autre un flambeau renversé, le flambeau de la vie. Sur
les lignes brisées du tympan et à côté de deux rosaces en bronze,
est placée une tète de mort en marbre blanc. A leurs pieds sont les
chiffres des familles Dauvet et de Rieux, formés des lettres
A. R. D. entrelacées.
La table en marbre noir du cartouche porte une longue inscrip-
tion funéraire célébrant « la haute noblesse » du défunt, ses vertus
et les faits qui ont illustré sa vie. Les curieux pourront en retrouver
le texte latin et sa traduction française dans la notice de l'Annuaire
de l'Yonne de 1844, et comparer cette dernière avec une traduction
nouvelle, plus ferme, plus précise, que je dois à la bienveillance de
M. l'abbé Sautereau, curé de Vincelles et Vincelottes. Comme on va
le voir, l'inscription portant la date exacte de la mort de Dauvet
(1642) précise, à peu d'années près, la date du tombeau lui-même :
D. O. M. S.
Ibic situs est Petrus Dauve-
tius. Nil alvd qv.*:re viator,
nomen nosse sat est. dlcam ta-
men, si nescis, quod omnes scivnt.
OlilGO ILLI ex utraque gente
NOniLISSIMA, rerumque GESTARUM
GLORIA CLAR1SSIMA VaTANIA DaU-
vetia, sic ipse meritis suis cla-
rior. Ut bellica virtvte nulli
cessit it a pietate ac numinis
onservantia omnes superav1t.
HOC ILLI CVM PROniS COMMVNE
FVIT quod CtTO RAPTVS EST NE
DOLEAS TAMEN, NIHIL ENIM IN EJVS
VITA AVT MORTE DEFLENDVM : NeC
EGET CVI FELICITAS jETERNA in
COiLIS FAMA PERENNIS OBTIGIT IN
TERRIS.
Obiit (j. cai.end; martii anno
1642.
hoc supre.mvm amoris sui pi-
gnvs Anna Jvbert conivx majstis-
sima conjvgis charissimi MANIIîUS
dicavit.
A Dieu très bon, très grand,
très saint.
Ici repose Pierre Dauvet, ne
cherche rien de plus, 6 voya-
geur : c'est asse% 1ue c0""
naisses ce nom. Si cependant tu
l'ignorais, sache que son origine,
du côté paternel, comme du côté
maternel, est de très haute no-
blesse, et que de très hauts faits
ont illustré sa carrière. S'il ne
cède à personne par sa valeur
guerrière, il surpasse tous les
autres par sa piété et son res-
pect pour Dieu.
Ceci lui fut commun avec tous
les hommes de bien, d'être mort
trop jeune. Ne l'en plaigne^
point cependant, car dans sa vie,
ni dans sa mort, il n'est rien qui
doive être regretté! Et il ne
manque rien à quiconque peut
obtenir à la fois l'éternelle féli-
cité des deux et l'immortalité
sur cette terre.
Il mourut le 0 des calendes de
mars en l'an 1 642.
Anne Jubert,son épouse incon-
solable, éleva et dédia à ses
mânes ce tombeau, comme der-
nier gage de son amour.
L'entablement est d'un goût particulier et moins sévère. Sur un
fond uni, en marbre rouge, se détachent deux colonnes ioniques,
Bourdin père et fils, sculpteurs Orléanais, à propos du tombeau
de Sainl-Valàrien, près de Sens, par Eugène Vaudin, ancien
maire, membre de la Société des Sciences historiques de
l'Yonne, et de l'Académie des Beaux-Arts de Rome, Cheva-
lier de l'ordre de Saint-Sylvestre. In-8° de 3o pages. Paris,
chez H. Champion, libraire-éditeur, 17, Quai Malaquais,
1883.
Ouvrez le tome Ier de la septième année de l'Art — 1881
— à la page 3oo, et vous y trouverez un intéressant article
intitulé : Michel Bourdin, Orléanais, dont l'auteur, M. J. Lobet,
nous apprend que c'est à un érudit, à un artiste de l'Yonne, à
M. Eugène Vaudin que l'on doit d'être enfin fixé sur le lieu de
naissance du « statuaire favori du cardinal de Richelieu ».
Cédant aux instances de l'excellent M. Eudoxe Marcille,
le fanatique de Chardin et de Prud'hon, à qui est confiée la
direction du Musée d'Orléans, M. Vaudin vient de condenser
dans une très utile brochure tout ce qu'il a pu réunir de ren-
seignements sur les Bourdin. C'est un simple service qu'a
voulu rendre sa modestie ; il n'a d'autre prétention que d'avoir
posé « une pierre d'attente sur laquelle d'autres, plus habiles
ou plus heureux, pourront asseoir quelque jour un édifice
durable en l'honneur de la famille Bourdin ».
Il faut savoir grand gré à M. Vaudin de ses intelligentes
recherches,car, ainsi qu'il ne le dit que trop justement, «l'his-
toire de l'art français est encore à faire ».
Sa découverte — c'en est bien une, tant le monument
était oublié — sa découverte à Saint-Valérien 1 du tombeau
« de Pierre Dauvet, homme de guerre du temps de Louis XIII
et descendant de Jean Dauvet, procureur général du Parle-
ment de Paris, connu par le rôle qu'il joua dans le mémorable
procès-de Jacques-Cœur, argentier du roi Charles VII », cette
découverte est tout à l'honneur de la sagacité du savant
artiste dont nous reproduisons le dessin et la description de
cette œuvre capitale de Michel Bourdin :
Le tombeau de Pierre Dauvet comprend deux parties princi-
pales : le piédestal posé sur un socle en granit gris tacheté et l'en-
tablement surmonté d'ornements disposés en forme de fronton. De
la variété des marbres qui le composent, encore rehaussés par les
bronzes dorés et argentés, qui lui servent d'ornement, résulte un
ensemble de décoration polychrome d'un heureux effet. La base est
en marbre rouge, le dé et les pilastres supportant le sarcophage en
marbre blanc et ce dernier en marbre noir. Des ornements en
i. A quinze kilomètres de Sens.
rocaille, heureusement disposés, encadrent trois écussons armoriés
en bronze.
Sur la partie centrale du piédestal est disposé un cartouche dont
le tympan brisé porte deux génies ailés ou plutôt deux anges, d'une
grâce et d'un sentiment remarquables. Ils tiennent d'une main une
palme, de l'autre un flambeau renversé, le flambeau de la vie. Sur
les lignes brisées du tympan et à côté de deux rosaces en bronze,
est placée une tète de mort en marbre blanc. A leurs pieds sont les
chiffres des familles Dauvet et de Rieux, formés des lettres
A. R. D. entrelacées.
La table en marbre noir du cartouche porte une longue inscrip-
tion funéraire célébrant « la haute noblesse » du défunt, ses vertus
et les faits qui ont illustré sa vie. Les curieux pourront en retrouver
le texte latin et sa traduction française dans la notice de l'Annuaire
de l'Yonne de 1844, et comparer cette dernière avec une traduction
nouvelle, plus ferme, plus précise, que je dois à la bienveillance de
M. l'abbé Sautereau, curé de Vincelles et Vincelottes. Comme on va
le voir, l'inscription portant la date exacte de la mort de Dauvet
(1642) précise, à peu d'années près, la date du tombeau lui-même :
D. O. M. S.
Ibic situs est Petrus Dauve-
tius. Nil alvd qv.*:re viator,
nomen nosse sat est. dlcam ta-
men, si nescis, quod omnes scivnt.
OlilGO ILLI ex utraque gente
NOniLISSIMA, rerumque GESTARUM
GLORIA CLAR1SSIMA VaTANIA DaU-
vetia, sic ipse meritis suis cla-
rior. Ut bellica virtvte nulli
cessit it a pietate ac numinis
onservantia omnes superav1t.
HOC ILLI CVM PROniS COMMVNE
FVIT quod CtTO RAPTVS EST NE
DOLEAS TAMEN, NIHIL ENIM IN EJVS
VITA AVT MORTE DEFLENDVM : NeC
EGET CVI FELICITAS jETERNA in
COiLIS FAMA PERENNIS OBTIGIT IN
TERRIS.
Obiit (j. cai.end; martii anno
1642.
hoc supre.mvm amoris sui pi-
gnvs Anna Jvbert conivx majstis-
sima conjvgis charissimi MANIIîUS
dicavit.
A Dieu très bon, très grand,
très saint.
Ici repose Pierre Dauvet, ne
cherche rien de plus, 6 voya-
geur : c'est asse% 1ue c0""
naisses ce nom. Si cependant tu
l'ignorais, sache que son origine,
du côté paternel, comme du côté
maternel, est de très haute no-
blesse, et que de très hauts faits
ont illustré sa carrière. S'il ne
cède à personne par sa valeur
guerrière, il surpasse tous les
autres par sa piété et son res-
pect pour Dieu.
Ceci lui fut commun avec tous
les hommes de bien, d'être mort
trop jeune. Ne l'en plaigne^
point cependant, car dans sa vie,
ni dans sa mort, il n'est rien qui
doive être regretté! Et il ne
manque rien à quiconque peut
obtenir à la fois l'éternelle féli-
cité des deux et l'immortalité
sur cette terre.
Il mourut le 0 des calendes de
mars en l'an 1 642.
Anne Jubert,son épouse incon-
solable, éleva et dédia à ses
mânes ce tombeau, comme der-
nier gage de son amour.
L'entablement est d'un goût particulier et moins sévère. Sur un
fond uni, en marbre rouge, se détachent deux colonnes ioniques,