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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 11.1885 (Teil 2)

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Véron, Eugène: Salon de 1885, [4]
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https://doi.org/10.11588/diglit.19704#0028

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SALON DE 1885. i5

3° Nous arrivons au troisième groupe, le groupe des victimes. Ici nous trouvons les jeunes
gens de développement moyen, qui ont des raisons plus ou moins sérieuses de se croire appelés
à la vie artistique, mais dont les aptitudes n'ont pas le caractère de besoin impérieux, de vocation
irrésistible qui distingue le premier groupe.

Remarquez bien que ces aptitudes, pour n'être pas exceptionnellement précoces, peuvent cepen-
dant n'en être pas moins réelles et sérieuses. Les grands artistes ne commencent pas nécessaire-
ment par être des enfants prodiges. Le contraire est infiniment plus fréquent. Delacroix, qui fut
certainement le plus admirable peintre et même le plus grand génie artistique du xixe siècle, a
commencé par se croire musicien. Ajoutons que, parmi les jeunes gens qui se destinent à la culture
des arts, la plupart ont reçu une culture intellectuelle insuffisante ; ils sont ignorants, et par
conséquent d'autant plus disposés à prendre au sérieux les préceptes qui leur sont inculqués par
des hommes revêtus d'un caractère officiel, par des messieurs qui sont professeurs à l'École natio-
nale des Beaux-Arts, qui sont officiers ou commandeurs de plusieurs ordres, qui gagnent du bout
de leurs pinceaux des centaines de mille francs

par an, et dont le nom 'ggj^^^g^gj^^j^^^g^gg^m^^^^^^^^m est célèbre dans l'uni-
vers entier. Dans de jJcj pareilles conditions, on
ne peut que rendre des ! oracles. Comment vou-
lez-vous que, en face de H pareils maîtres, un mal-
heureux enfant, simple , iÈÊ- I et naif la plupart du

a

quoi servent-ils ? ou bien. ces professeurs leur en-

seignent ce qu'ils savent, |H et Ce Qu ^s savent> nous

pouvons en juger par leurs œuvres.

Marée basse.

Les œuvres, que nous apprennent-eiles

Dessin d'Emerson-Edward Simmons,

sur leur esthétique et d'après une partie de son tableau. (Salon de 1885.) sur leur métier ?

Notre confrère, M. Firmin Javel, dans

une appréciation un peu sévère mais très juste du talent mélodramatique d'Alph. de Neuville,
qu'il publiait naguère dans l'Événement, racontait qu'Eugène Delacroix avait donné au jeune
peintre de précieux avis, et notamment celui-ci : « Rappele\-vous que le dessin du mouvement
l'emporte, et de beaucoup, sur le dessin de la forme ; sans le mouvement, la forme n'est rien. »

C'est la doctrine que nous, avons toujours soutenue, et nous sommes heureux d'en recevoir la
confirmation d'une bouche aussi autorisée que celle de Delacroix. Mais quelle est sur le même
point la doctrine de l'Ecole? Evidemment, juste l'inverse de celle qu'enseignait le grand artiste.
On en est resté aux théories d'Ingres sur « la probité de l'art », et si l'on n'enseigne plus
expressément que le dessin doit se borner à la reproduction de la forme immobile, c'est manifes-
tement à ce résultat qu'on arrive en fait. Nous pouvons en juger et par les œuvres des maîtres et
par celles des élèves, et par ce que nous savons de l'étude du modèle prétendu vivant à l'Ecole.
Ce modèle qu'on attache et qu'on barde, sous prétexte de le mettre en action, n'a plus de la vie
que l'apparence grossière ; en réalité, ce que copient les jeunes gens, c'est un cadavre debout,
c est le mensonge du mouvement. Ceux qui aspirent à quelque chose de plus sont obligés de
recommencer leur éducation, comme Corot.

L'étude du mouvement est donc bannie en réalité de l'enseignement officiel. Que lui reste-t-il?
 
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