LA CHRONIQUE DES ART S
En ce moment est ouverte, à Munich,
une très intéressante exposition de lithogra-
phies et d'eaux-fortes de Félicien Rops, choisies
parmi ses principales planches et donnant
une excellente idée de l'ensemble de son
œuvre. A cette exposition fera suite celle
d'une série d'eaux-fortes d'A. Zorn, de dêssins
et d'eaux-fortes de Max Liebermann.
MM. Julian De Arriendt, artiste peintre
belge et Smekens, président honoraire de la
Société pour l'Enseignement des beaux-arts
d'Anvers, viennent d'être nommés chevaliers
de la Légion d'honneur.
PETITES EXPOSITIONS
Cercle Volney. — Chaque année ramène,
dans un ordre à peu près invariable, la série
des petites expositions. Il n'est pas de parisien
qui ne sache que, dans le courant de janvier,
le Cercle Volney ouvrira le premier ses portes
au public; que ce sera ensuite le tour du Cercle
des Champs-Elysées; puis que, successive-
ment, des cartes bleues, roses ou vertes, le
convieront à aller voir les «nouveautés » que
les Pastellistes, les Aquarellistes, les Femmes-
Peintres, etc., auront produites au cours de
l'année précédente.
Le malheur, c'est que ces nouveautés sont
de moins en moins nouvelles et que, avec un
peu d'imagination, le critique pourrait, sans
sortir de son cabinet, faire à l'avance le compte
rendu de ces expositions. Sans être grand pro-
phète, j'aurais pu prédire à mes lecteurs que
l'exposition du Cercle Volney, assez médiocre
dans son ensemble, se recommande par les
noms honorables de MM. Lefebvre etHenner;
que le premier n'a rien changé à la glaciale
correction de sa manière ; que le second expose
des morceaux d'une exécution savoureuse sans
doute, mais qui n'ajoutent rien à la bonne opi-
nion que nous avons de son talent. Je n'éton-
nerai personne non plus en disanl.que M. Bou-
guereau a exposé une petite fille court-vôtue
qui plaira aux visiteurs du dimanche, âmes
simples, à l'esthétique peu compliquée, tandis
qu'elle suscitera, parmi ceux qui se piquent
d'être « dans le mouvement », les faciles criti-
ques qui traînent depuis vingt ans dans tous
les journaux.
M. Benjamin-Constant a envoyé un portrait
de dame âgée, d'une exécution plus souple et
moins redondante que d'habitude; M. Demont,
un joli paysage qui n'a d'autre tort que de
rappeler de trop près ceux de M. Gazin ; M.
Saint-Germier, dont j'avais signalé l'année
dernière des vues de Venise d'une couleur sa-
voureuse, me semble cette fois moins heureux
dans un Coin de canal, d'une exécution un
peu lâchée. Notons encore le Coin fleuri de
M. Jean Veber.
MM. Weerts,Damoye,Luminais, Deschamps,
Baschel, Barau sont des habitués du Cercle
Volney. Citer leurs noms c'est dire leurs œu-
vres.
Dans la sculpture, je signalerai seulement
M. Puech, dont le souple talent, plus gracieux
que fort, s'affirme dans un joli buste d'enfant.
O. F.
Oui, les petites expositions particulières ten-
dent à venir d'un usage abusif. S'il fallait ré-
pondre à l'appel des peintres, on y passerait
toutes ses journées sans espoir d'en tirer
grand profit. Rarement l'une d'elles se signale
par une révélation imprévue. L'excentrique
y préside quand ce n'est pas le banal. Par-
fois, cependant, une surprise agréable vous
est réservée. C'est le cas pour l'exposition, à
la Bôdinière, des œuvres de MUc Marguerite
Verbœckhoven, la .petife-lille de Verbœckho-
ven, le glorieux animalier belge. Son éduca-
tion n'est pas marquée par une influence
d'ancestrale hérédité. Elle est plus apparentée
avec MM. Whistler et Alfred Stevens.
Les marines de M"0 Verbœckhoven sont
d'un séduisant impressionnisme. La jeune ar-
tiste, avec une subtilité de vision particulière
et une vraie délicatesse de main, non seule-
ment nous rend les divers aspects du ciel et
de la mer, tantôt calme, tantôt mouvemen-
tée, mais encore semble-t-il qu'elle ait le pou-
voir de fixer sur la toile le sentiment fugitif
des heures. EU i ne cherche pas les gros effets;
sa manière est fine, sa façon de sentir est mé-
lancolique, son goût est sûr. Et ces qualités
distinguées se manifestent sans préjudice
d'une hardiesse presque virile. M11» Verbœck-
hoven prend, du premier coup, une place ho-
norable parmi nos marinistes contemporains.
Il n'y a rien à dire des danseuses de M. Mes-
plés ; M. Lavau veut élever la pyrogravure à
la hauteur de la décoration, et M. Paul Liot
expose une série de toiles de Bretagne dont
nous avons vu un peu partout de nombreux
spécimens.
L'exposition, chez G. Petit, des œuvres de M.
Lévy-Dhurmer, est un admiratif hommage à.
la mémoire du Vinci; le souvenir du Saint
Jean-Baptiste le poursuit avec insistance. Ce
jeune peintre, dont on n'avait encore rien vu,
pos-ède toutes les qualités de l'intelligence.
Il comprend, et Ion sent en lui un esprit cul-
tivé, une érudition d'art évidente. Il a des
idées. Quant à ses moyens d'exé ■■<: tion, ils sont
encore impersonnels. Il a du gjût dans la
mise en scène et crée ainsi une illusion qui
peut séduire. Nous croyons, par exemple, que
le Portrait de M. Georges Rodenbach vaut
surfout par un arrangement habile et par l'é-
vocation, dans les fonds, d'une Bruges-la-
Morte encadrant la figure du poète et dont les
canaux et les architectures hispano-flamandes
feront toujours rêver.
Les écoles modernes du préraphaélisme et
de la peinture dite « intellectuelle » furent ses
initiatrices. Elles l'ont mené devant les maî-
tres italiens du xv« siècle. On voit qu'il a couru
les musées et les expositions. 11 appartient à
cette légion toujours grossissante de jeunes
peintres, levée par les Burne-Jones, les Gus-
tave Moreau etlesBœcklin, et dont les œuvres
couvrent les murs des petits salons de Paris,.
En ce moment est ouverte, à Munich,
une très intéressante exposition de lithogra-
phies et d'eaux-fortes de Félicien Rops, choisies
parmi ses principales planches et donnant
une excellente idée de l'ensemble de son
œuvre. A cette exposition fera suite celle
d'une série d'eaux-fortes d'A. Zorn, de dêssins
et d'eaux-fortes de Max Liebermann.
MM. Julian De Arriendt, artiste peintre
belge et Smekens, président honoraire de la
Société pour l'Enseignement des beaux-arts
d'Anvers, viennent d'être nommés chevaliers
de la Légion d'honneur.
PETITES EXPOSITIONS
Cercle Volney. — Chaque année ramène,
dans un ordre à peu près invariable, la série
des petites expositions. Il n'est pas de parisien
qui ne sache que, dans le courant de janvier,
le Cercle Volney ouvrira le premier ses portes
au public; que ce sera ensuite le tour du Cercle
des Champs-Elysées; puis que, successive-
ment, des cartes bleues, roses ou vertes, le
convieront à aller voir les «nouveautés » que
les Pastellistes, les Aquarellistes, les Femmes-
Peintres, etc., auront produites au cours de
l'année précédente.
Le malheur, c'est que ces nouveautés sont
de moins en moins nouvelles et que, avec un
peu d'imagination, le critique pourrait, sans
sortir de son cabinet, faire à l'avance le compte
rendu de ces expositions. Sans être grand pro-
phète, j'aurais pu prédire à mes lecteurs que
l'exposition du Cercle Volney, assez médiocre
dans son ensemble, se recommande par les
noms honorables de MM. Lefebvre etHenner;
que le premier n'a rien changé à la glaciale
correction de sa manière ; que le second expose
des morceaux d'une exécution savoureuse sans
doute, mais qui n'ajoutent rien à la bonne opi-
nion que nous avons de son talent. Je n'éton-
nerai personne non plus en disanl.que M. Bou-
guereau a exposé une petite fille court-vôtue
qui plaira aux visiteurs du dimanche, âmes
simples, à l'esthétique peu compliquée, tandis
qu'elle suscitera, parmi ceux qui se piquent
d'être « dans le mouvement », les faciles criti-
ques qui traînent depuis vingt ans dans tous
les journaux.
M. Benjamin-Constant a envoyé un portrait
de dame âgée, d'une exécution plus souple et
moins redondante que d'habitude; M. Demont,
un joli paysage qui n'a d'autre tort que de
rappeler de trop près ceux de M. Gazin ; M.
Saint-Germier, dont j'avais signalé l'année
dernière des vues de Venise d'une couleur sa-
voureuse, me semble cette fois moins heureux
dans un Coin de canal, d'une exécution un
peu lâchée. Notons encore le Coin fleuri de
M. Jean Veber.
MM. Weerts,Damoye,Luminais, Deschamps,
Baschel, Barau sont des habitués du Cercle
Volney. Citer leurs noms c'est dire leurs œu-
vres.
Dans la sculpture, je signalerai seulement
M. Puech, dont le souple talent, plus gracieux
que fort, s'affirme dans un joli buste d'enfant.
O. F.
Oui, les petites expositions particulières ten-
dent à venir d'un usage abusif. S'il fallait ré-
pondre à l'appel des peintres, on y passerait
toutes ses journées sans espoir d'en tirer
grand profit. Rarement l'une d'elles se signale
par une révélation imprévue. L'excentrique
y préside quand ce n'est pas le banal. Par-
fois, cependant, une surprise agréable vous
est réservée. C'est le cas pour l'exposition, à
la Bôdinière, des œuvres de MUc Marguerite
Verbœckhoven, la .petife-lille de Verbœckho-
ven, le glorieux animalier belge. Son éduca-
tion n'est pas marquée par une influence
d'ancestrale hérédité. Elle est plus apparentée
avec MM. Whistler et Alfred Stevens.
Les marines de M"0 Verbœckhoven sont
d'un séduisant impressionnisme. La jeune ar-
tiste, avec une subtilité de vision particulière
et une vraie délicatesse de main, non seule-
ment nous rend les divers aspects du ciel et
de la mer, tantôt calme, tantôt mouvemen-
tée, mais encore semble-t-il qu'elle ait le pou-
voir de fixer sur la toile le sentiment fugitif
des heures. EU i ne cherche pas les gros effets;
sa manière est fine, sa façon de sentir est mé-
lancolique, son goût est sûr. Et ces qualités
distinguées se manifestent sans préjudice
d'une hardiesse presque virile. M11» Verbœck-
hoven prend, du premier coup, une place ho-
norable parmi nos marinistes contemporains.
Il n'y a rien à dire des danseuses de M. Mes-
plés ; M. Lavau veut élever la pyrogravure à
la hauteur de la décoration, et M. Paul Liot
expose une série de toiles de Bretagne dont
nous avons vu un peu partout de nombreux
spécimens.
L'exposition, chez G. Petit, des œuvres de M.
Lévy-Dhurmer, est un admiratif hommage à.
la mémoire du Vinci; le souvenir du Saint
Jean-Baptiste le poursuit avec insistance. Ce
jeune peintre, dont on n'avait encore rien vu,
pos-ède toutes les qualités de l'intelligence.
Il comprend, et Ion sent en lui un esprit cul-
tivé, une érudition d'art évidente. Il a des
idées. Quant à ses moyens d'exé ■■<: tion, ils sont
encore impersonnels. Il a du gjût dans la
mise en scène et crée ainsi une illusion qui
peut séduire. Nous croyons, par exemple, que
le Portrait de M. Georges Rodenbach vaut
surfout par un arrangement habile et par l'é-
vocation, dans les fonds, d'une Bruges-la-
Morte encadrant la figure du poète et dont les
canaux et les architectures hispano-flamandes
feront toujours rêver.
Les écoles modernes du préraphaélisme et
de la peinture dite « intellectuelle » furent ses
initiatrices. Elles l'ont mené devant les maî-
tres italiens du xv« siècle. On voit qu'il a couru
les musées et les expositions. 11 appartient à
cette légion toujours grossissante de jeunes
peintres, levée par les Burne-Jones, les Gus-
tave Moreau etlesBœcklin, et dont les œuvres
couvrent les murs des petits salons de Paris,.