186
LA CHRONIQUE DES ART3
Le musée Carnavalet vient de recevoir
plusieurs objets intéressants, parmi lesquels
une fort belle enseigne de luthier du xvir siècle,
un joueur de luth en bois sculpté et doré, deux
panonceaux de fournisseurs royaux de la même
époque, en forme de boucliers ovales, au centre
desquels sont peintes les armoiries royales;
enfin, un très curieux groupe symbolique,
œuvre du sculpteur Chinard, qui vécut à la fin
du xvnr et au commencement du xix" siècle,
ainsi composé : un vigoureux gaillard, ceint
d'une écharpe où on lit : « Peuple français »,
v les mains et les bras entourés de bracelets avec
les mots : « Force, Travail », soulève dans ses
bras une jeune femme : la Liberté, qui place
sur la tête de son sauveur une couronne civi-
que. Sur le socle, en un bas-relief délicatement
sculpté, une procession civique portant en triom-
phe le buste d'un philosophe : Diderot ou Vol-
taire. Tout au bas, la table des Droits do
l'Homme et la médaille du 10 août.
La Commission du Vieux Paris, sur
l'initiative de M. André Hallays, vient d'ins-
tituer un concours entre les amateurs de
photographie, qui consistera à apporter à la
Commission les plus belles vues des berges,
squares, monuments et maisons anciennes
d'aspect pittoresque, qui contribuent au décor
de Paris. MM. Éd. Détaille et Lucien Lambeau
classeront les envois et les exposeront à l'hôtel
Lauzun ou au Petit Palais. Puis, un jury
d'artistes choisira les lauréats, qui recevront de
la Ville de Paris une médaille.
Ce concours aura lieu chaque année, l'été.
Le Conseil municipal, sur le rapport de
M. Quentin-Bauchart, vient d'arrêter définiti-
vement le programme du concours d'enseignes
artistiques. Nous donnons, à notre dernière
page, les conditions de ce concours.
Le jury sera composé de 31 membres, choisis
parmi les conseillers municipaux, les mem-
bres de l'Académie des Beaux-Arts, de la
Chambre de commerce, des architectes de la
Ville, etc. L'exposition des enseignes aura
lieu du 15 octobre au 1er novembre prochain.
M. Victor Ghampier vient d'être nommé
administrateur de l'École des Arts industriels
de Boubaix.
Dimanche dernier s'est ouverte à Bruges
l'exposition des Primitifs flamands, inaugurée
par le roi et la princesse Clémentine. Elle du-
rera jusqu'à fin septembre.
On vient, annonce M. Luca Beltrami dans
le Corriere délia Sera (des 10 et 11 mai), de
découvrir dans la salle « délie Asse » au château
de Milan, une décoration à fresque composée
d'arabesques, de rubans et autres ornements
parmi lesquels sont des restes d'inscriptions
célébrant des événements politiques de la vie
de Ludovic le More, décoration qui est sans
doute l'œuvre de Léonard de Vinci. M. Paul
Millier-Walde, l'historien de Léonard, qui, de-
puis plusieurs années, poursuit des recherches
dans le château de Milan, avait déjà découvert
une partie de ces peintures ainsi que d'autres
dans la salle du Trône. Grâce à l'aide pécuniaire
d'un riche Milanais, ces découvertes ont pu être
achevées et les peintures restaurées avec tout
le respect qu'elles méritent.
C'est une artiste française, Mme Lancelot-
Croce, chevalier de la Légion d'honneur, qui a
reçu du roi d'Italie la commande de la médaille
commémorative du concours international de
tir qui vient d'avoir lieu à Rome.
La mission archéologique italienne a dé-
couvert un nouveau palais à Mycènes. Des
fouilles entreprises dernièrement à Hagia-
Triada, dans le voisinage de Phaestos, ont mis
à jour une partie du sous-sol, une porte exté-
rieure et des murs ornés de fresques dont l'un
présente une série de spirales entrelacées avec
des plantes en fleurs.
Parmi les objets déjà découverts se trouvent
trois cents sceaux mycéniens portant des lettres
de l'alphabet crétois pré-hellénique; une plaque
avec inscription analogue à celles de Knossos,
et un certain nombre de figurines en terre
cuite d'un type très primitif. Cet édifice était
vraisemblablement le palais de campagne des
rois de Phaestos.
CORRESPONDANCE
Paris, 12 mai 1902,
Monsieur le Directeur de La Gazette des
Beaux-Arts,
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt le « Propos du
jour » du 26 avril et la lettre de M. Salomon Rei-
nach du 3 mai, concernant « la question pliotograT
phique au Louvre ».
Permettez-moi rte ne pas être de l'avis de votre
émincnt correspondant touchant le dernier alinéa
de sa lettre ; je suis convaincu que le Louvre
retire ou retirera des avantages de la situation
qui lui a été faite par le Ministre de l'Instruction
publique, il y a quelque vingt ans.
Le traite dont il est question a dû être signé
par M. Jules Ferry, un homme dont personne ne
suspectera l'intelligence. Du rpsle, que la signature
du traité ait été apposée par ce ministre ou par
tout autre, il est inadmissible que les intérêts du
Louvre n'aient pas été sauvegardés.
Il est bien probable (si ce n'est certain) que le
traité a été fait pour un temps déterminé, — que
les clichés doivent être déposés dans un lieu dé-
terminé, — que le photographe a obligation de
faire un nombre déterminé de clichés, dans le
délai do son privilège, etc., etc..
L'Administration a fait, pour les clichés photo-
graphiques des « Monuments historiques » un
traité fort intelligent : ces clichés sont déposés au
Trocadéro, ils sont la propriété do l'Etat sous cer-
taines restrictions, etc., etc. Pourquoi cette même
Administration aurait-elle été moins vigilante en
ce qui concerne le Louvre ? Insistez pour que
les clauses du traité soient publiées (vous l'ob-
tiendrez certainement) et vous verrez qu'il ne faut
pas croire que les intérêts généraux du pays ne
sont pas fort bien pris par ceux, à qui ils sont
confiés.
Il est utile, en tous cas, que la doyenne des
revues d'art (j'ai cité la précieuse Gazette des
Beaux-Arts) s'occupe de cette grave question. Il
faut, en effet, éveiller en haut lieu, pour l'avenir,
LA CHRONIQUE DES ART3
Le musée Carnavalet vient de recevoir
plusieurs objets intéressants, parmi lesquels
une fort belle enseigne de luthier du xvir siècle,
un joueur de luth en bois sculpté et doré, deux
panonceaux de fournisseurs royaux de la même
époque, en forme de boucliers ovales, au centre
desquels sont peintes les armoiries royales;
enfin, un très curieux groupe symbolique,
œuvre du sculpteur Chinard, qui vécut à la fin
du xvnr et au commencement du xix" siècle,
ainsi composé : un vigoureux gaillard, ceint
d'une écharpe où on lit : « Peuple français »,
v les mains et les bras entourés de bracelets avec
les mots : « Force, Travail », soulève dans ses
bras une jeune femme : la Liberté, qui place
sur la tête de son sauveur une couronne civi-
que. Sur le socle, en un bas-relief délicatement
sculpté, une procession civique portant en triom-
phe le buste d'un philosophe : Diderot ou Vol-
taire. Tout au bas, la table des Droits do
l'Homme et la médaille du 10 août.
La Commission du Vieux Paris, sur
l'initiative de M. André Hallays, vient d'ins-
tituer un concours entre les amateurs de
photographie, qui consistera à apporter à la
Commission les plus belles vues des berges,
squares, monuments et maisons anciennes
d'aspect pittoresque, qui contribuent au décor
de Paris. MM. Éd. Détaille et Lucien Lambeau
classeront les envois et les exposeront à l'hôtel
Lauzun ou au Petit Palais. Puis, un jury
d'artistes choisira les lauréats, qui recevront de
la Ville de Paris une médaille.
Ce concours aura lieu chaque année, l'été.
Le Conseil municipal, sur le rapport de
M. Quentin-Bauchart, vient d'arrêter définiti-
vement le programme du concours d'enseignes
artistiques. Nous donnons, à notre dernière
page, les conditions de ce concours.
Le jury sera composé de 31 membres, choisis
parmi les conseillers municipaux, les mem-
bres de l'Académie des Beaux-Arts, de la
Chambre de commerce, des architectes de la
Ville, etc. L'exposition des enseignes aura
lieu du 15 octobre au 1er novembre prochain.
M. Victor Ghampier vient d'être nommé
administrateur de l'École des Arts industriels
de Boubaix.
Dimanche dernier s'est ouverte à Bruges
l'exposition des Primitifs flamands, inaugurée
par le roi et la princesse Clémentine. Elle du-
rera jusqu'à fin septembre.
On vient, annonce M. Luca Beltrami dans
le Corriere délia Sera (des 10 et 11 mai), de
découvrir dans la salle « délie Asse » au château
de Milan, une décoration à fresque composée
d'arabesques, de rubans et autres ornements
parmi lesquels sont des restes d'inscriptions
célébrant des événements politiques de la vie
de Ludovic le More, décoration qui est sans
doute l'œuvre de Léonard de Vinci. M. Paul
Millier-Walde, l'historien de Léonard, qui, de-
puis plusieurs années, poursuit des recherches
dans le château de Milan, avait déjà découvert
une partie de ces peintures ainsi que d'autres
dans la salle du Trône. Grâce à l'aide pécuniaire
d'un riche Milanais, ces découvertes ont pu être
achevées et les peintures restaurées avec tout
le respect qu'elles méritent.
C'est une artiste française, Mme Lancelot-
Croce, chevalier de la Légion d'honneur, qui a
reçu du roi d'Italie la commande de la médaille
commémorative du concours international de
tir qui vient d'avoir lieu à Rome.
La mission archéologique italienne a dé-
couvert un nouveau palais à Mycènes. Des
fouilles entreprises dernièrement à Hagia-
Triada, dans le voisinage de Phaestos, ont mis
à jour une partie du sous-sol, une porte exté-
rieure et des murs ornés de fresques dont l'un
présente une série de spirales entrelacées avec
des plantes en fleurs.
Parmi les objets déjà découverts se trouvent
trois cents sceaux mycéniens portant des lettres
de l'alphabet crétois pré-hellénique; une plaque
avec inscription analogue à celles de Knossos,
et un certain nombre de figurines en terre
cuite d'un type très primitif. Cet édifice était
vraisemblablement le palais de campagne des
rois de Phaestos.
CORRESPONDANCE
Paris, 12 mai 1902,
Monsieur le Directeur de La Gazette des
Beaux-Arts,
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt le « Propos du
jour » du 26 avril et la lettre de M. Salomon Rei-
nach du 3 mai, concernant « la question pliotograT
phique au Louvre ».
Permettez-moi rte ne pas être de l'avis de votre
émincnt correspondant touchant le dernier alinéa
de sa lettre ; je suis convaincu que le Louvre
retire ou retirera des avantages de la situation
qui lui a été faite par le Ministre de l'Instruction
publique, il y a quelque vingt ans.
Le traite dont il est question a dû être signé
par M. Jules Ferry, un homme dont personne ne
suspectera l'intelligence. Du rpsle, que la signature
du traité ait été apposée par ce ministre ou par
tout autre, il est inadmissible que les intérêts du
Louvre n'aient pas été sauvegardés.
Il est bien probable (si ce n'est certain) que le
traité a été fait pour un temps déterminé, — que
les clichés doivent être déposés dans un lieu dé-
terminé, — que le photographe a obligation de
faire un nombre déterminé de clichés, dans le
délai do son privilège, etc., etc..
L'Administration a fait, pour les clichés photo-
graphiques des « Monuments historiques » un
traité fort intelligent : ces clichés sont déposés au
Trocadéro, ils sont la propriété do l'Etat sous cer-
taines restrictions, etc., etc. Pourquoi cette même
Administration aurait-elle été moins vigilante en
ce qui concerne le Louvre ? Insistez pour que
les clauses du traité soient publiées (vous l'ob-
tiendrez certainement) et vous verrez qu'il ne faut
pas croire que les intérêts généraux du pays ne
sont pas fort bien pris par ceux, à qui ils sont
confiés.
Il est utile, en tous cas, que la doyenne des
revues d'art (j'ai cité la précieuse Gazette des
Beaux-Arts) s'occupe de cette grave question. Il
faut, en effet, éveiller en haut lieu, pour l'avenir,