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La chronique des arts et de la curiosité — 1907

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Nr. 38 (7 Décembre)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19764#0368
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358

LA CHRONIQUE DES ARTS

— Giuseppe Bonelli : A propos des destinées
des manuscrits vinciens.

(Fascicule III, juillet 1906-juillet 1907). — Cata-
logue et analyse des publications envoyées à la
« Raccolta » : Dessins, gravures, photographies,
etc., offerts en don.

— Ettore Verga : Bibliographie vincienne à
partir de 1901 ('suite).

= Documents vinciens (supplément).

= Variétés : Gerolamo Calvi: Léonard de Vinci
et le comte de Ligny. — Achille Batti : La
Table et le coffret du « Codex Atlanticus » à
la Bibliothèque Ambrosienne (9 ligures). —
Emilio Motta : La restauration de la « Cène » au
xvii0 siècle et la défense du peintre Mazza. —
Luca Beltrami : Un prétendu plagiat de Léonard.
Il s'agit de la composition de la Cène et, en réa-
lité, d’une copie de cet ouvrage par un peintre de
technique archaïque.

BIBLIOGRAPHES

Le Bienheureux Fra Giovanni Angelico de
Fiesole (1387-1455), par Henry Cochin. Pa-
ris, V. Lecoffre. Un vol. in-16, x-285p. avec 3 plan-
ches.

Le Maître et l'Élève : Fra Angelico et Benozzo
Gozzoli, par Gaston Sortais. Lille, Paris, Borne,
Bruxelles, Société Saint-Augustin, De sciée, de
Brouwer et Cie. Un vol, in-4°, 375 p. av. 53 grav.
hors texte, dont 5 en couleurs (10 fr.).

On a beaucoup écrit sur Fra Angelico ; nous ne
savons si cette âme exquise a jamais été mieux
comprise et mieux louée que dans le petit livre de
M. Henry Gochin. Familier depuis longtemps —
ses belles études sur Pétrarque l’ont prouvé déjà
— avec l’Italie de la Renaissance dont il possède
l’histoire dans ses moindres détails, il a parlé du
pieux moine artiste avec une ferveur intelligente qui
ne se contente pas, pour s’exprimer, de phrases
conventionnelles et vagues. Éclairant son sujet,
grâce à son extrême érudition (dont est garante la
copieuse bibliographie placée en tête du volume),
à la lumière des mille faits contemporains, il a
su nous donner, au lieu d’une sèche et banale
biographie, une histoire singulièrement humaine
et vivante, où les êtres, replacés dans leur milieu,
sentent, parlent, agissent véritablement sous nos
yeux.

De la vallée du Mugello, près Florence, où na-
quit le petit Guido qui devait devenir plus tard
frère Giovanni, jusqu’à Rome où il mourut soixante-
huit ans plus tard, nous suivons l’artiste pas à pus,
d’abord en cette fin du xive siècle où les guerres
intestines, le grand schisme religieux et la crise
morale suscitée par la réforme des fils de saint
Dominique composent une atmosphère si trou-
blée qui va peser sur la formation morale et les
débuts du jeune moine dans ses résidences suc-
cessives : Fiesole, où il fait profession en 1407,
Cortona, Foligno (où, dans cette Ombrie, patrie
de saint François, de Giolto, de Gentile da Fa-
briano, son œil et son cœur trouvent de nouvelles
sources d’an et de poésie religieuse), puis encore
Cortona, jusqu'à ce qu'il se repose enfin à Fiesole
qui l'a d’abord accueilli et où il peint pour la
chapelle du couvent, avec d’autres œuvres, le

Couronnement de la Vierge et le Christ en croix
du Louvre.

C’est ensuite, de 1418 à 1445, le temps passé à
Florence pour la décoration du couvent de San
Marco, en ces débuts si charmants du xv° siècle
où a le grandiose et violent Moyen âge est clos »,
où les teintes délicates d’une aube nouvelle mon-
tent à l'horizon. « Ce n’est pas l’époque la plus
magnifique : les somptuosités princières et le
débordement du luxe sont pour le lendemain. Mais
c’est l’heure la plus exquise, et- l'on n'en dira
jamais assez l’aspect de grâce, d’élégance, de joie
et de simplicité. Pour ce cpü est des arts du des-
sin, le charme éclate à tous les yeux; presque rien
d.e ce qui nous reste de cette bienheureuse période
n’est autre que pur et noble, avec je ne sais quoi
de modeste et de juvénile... Il y a dans ces années
quelques instants si délicieux pour l’art et pour la
vie, que l’on voudrait, comme Faust, pouvoir leur
crier : « Arrête-toi, tu es beau ! » C’est une heure
qui passe... » C’est à San Marco qu’allait se déve-
lopper le plus pleinement, le plus harmonieusement
le génie du pieux moine, dans « l’adorable bâtisse
simple et gracieuse » où le goût si pur de Miche-
lozzo trouve un prolongement si digne dans l’œuvre
peinte de Fra Angelico : « là seulement peut-être le
délicieux art delà jeune Renaissance fut une chose
absolument et uniquement pure. » Cet art, ce
charme d’intimité, de sérénité, de pureté, a inspiré
à M. Cochin les pages les plus délicieuses de son
livre ; elb s comptent parmi les plus exquises que
nous connaissions en histoire de l’art.

En voici d’autres (p. 135 et suiv.) sur le style du
peintre et sur le caractère de l’homme privé, qui
sont très neuves. M. Cochin s’élève contre ce juge-
ment faux qui généralement représente Fra Ange-
lico comme un mystique du haut Moyen âge
séparé du monte extérieur et enfermé dans sa
cellule ; il montre en lui, au contraire, un homme
ue son temps, moine saint, mais plein de bonne
grâce, de courtoisie, de gaieté même, traitant des
conditions de son travail sui\ant les usages des
« maîtres peintres » dont il portait le litre, un
véritable artiste de la Renaissance épris de la
nature et de la vie, mais ne s’en servant que ; our
élever les âmes vers Dieu et remplir à sa manière
l’office d’enseignement que devaient exercer les
Frères Prêcheurs : meditata trahere. M. Cochin le
prouve par l’étude de sa formation et l’analyse de
ses œuvres, où ne manquent pas les réminiscences
antiques, les portraits réali tes, et qui montrent en
lui « peut-être le plus sincère des paysagistes
italiens. » N’oublions pas d’ailleurs que Fra Ange-
lico est le contemporain de notre Jean Fouquet,
qu’il connut peut-être à la cour d'Eugène IY.

C’est à Rome, en effet, qu'il va terminer sa vie,
peignant au vieux Saint-Pierre et au Vatican la
chapelle du Saint-Sacrement, malheureusement
détruite au siècle suivant, puis le studio de
Nicolas Y, avec l'aide de ses élèves Benozzo
Gozzoli et autres. Sa tombe, comme on sait, est au
couvent de la Minerve; la figure qu’elle porte
montre, comme les œuvres de celui qu'elle recouvre,
« l’image vivante de l'impérissable joie ».

Après ce livre exquis, on pourra ouvrir le
beau volume « substantiel et brillant » — c’est
ainsi que le regretté Eugène Müntz avait qua-
lifié l’étude du Fra Angelico qui orne l’ou-
vrage — où M. Gaston Sortais a résumé la vie et
l’œuvre du bienheureux moine et de son élève
 
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