morales que la curiosité, l'intérêt, un désir vague mais
ardent allume et développe dans son âme, son âme à lui,
cet être personnel et sans doute unique dont les exigences
s'accroissent, sont en présence dans son cœur. Entre les
partis politiques à peu près d'égale force, une lutte incer-
taine et furieuse commence, marquée par des victoires, des
défaites alternatives, parfois un accord d'une heure qu'im-
pose un puissant esprit. La famille, solide encore, est
devenue le foyer d'une autre lutte, plus sourde, où la per-
sonnalité des enfants, des femmes, qui grandit en cons-
cience, en appétits, en dignité, ne trouvera plus ses limites
que si la dignité, et la conscience, et les appétits de son chef
demeurent dans le cadre de ses devoirs et de ses droits.
La poursuite de la richesse, des jouissances et des honneurs
publics qui s'y attachent, développent le caractère, l'au-
dace, l'adresse, la fourberie de l'homme qui la veut. Le
pouvoir de résoudre ces conflits universels qui appartient
dans la famille au père, et au maître dans la cité, trouve
son expression dans la fermeté héroïque qui permet à
Sophocle d'introduire, face à l'ivresse confuse de la vieille
unité morale représentée par le chœur, la volonté de l'homme
noble où l'intelligence s'éveille pour combattre l'univers
fatidique tout entier ligué contre lui, comme elle permet au
sculpteur de la même époque d'établir, entre les masses
contrastées et les gestes antagonistes, un équilibre victo-
rieux du désordre et du chaos qui les force à rentrer dans
un même ensemble et à les lancer du même élan dans un
mouvement continu. La statue, où le mâle dorien et la
femme d'Ionie se pénètrent dans une étreinte que la sou-
plesse de Myron et la vigueur de Polyclète nouent et dénouent
tour à tour, agit, marche, combat, repose dans une auguste
liberté. Elle n'est plus seulement architecture par elle-même.
Elle entre, avec ses voisines, dans un organisme plus com-
plexe, ondulations monumentales combinées où les formes,
pourtant séparées, réalisent, par leur succession, une mélodie
plastique dont les courbes se balancent (i). C'est comme les
(i) Fig. n.•
-22 -
ardent allume et développe dans son âme, son âme à lui,
cet être personnel et sans doute unique dont les exigences
s'accroissent, sont en présence dans son cœur. Entre les
partis politiques à peu près d'égale force, une lutte incer-
taine et furieuse commence, marquée par des victoires, des
défaites alternatives, parfois un accord d'une heure qu'im-
pose un puissant esprit. La famille, solide encore, est
devenue le foyer d'une autre lutte, plus sourde, où la per-
sonnalité des enfants, des femmes, qui grandit en cons-
cience, en appétits, en dignité, ne trouvera plus ses limites
que si la dignité, et la conscience, et les appétits de son chef
demeurent dans le cadre de ses devoirs et de ses droits.
La poursuite de la richesse, des jouissances et des honneurs
publics qui s'y attachent, développent le caractère, l'au-
dace, l'adresse, la fourberie de l'homme qui la veut. Le
pouvoir de résoudre ces conflits universels qui appartient
dans la famille au père, et au maître dans la cité, trouve
son expression dans la fermeté héroïque qui permet à
Sophocle d'introduire, face à l'ivresse confuse de la vieille
unité morale représentée par le chœur, la volonté de l'homme
noble où l'intelligence s'éveille pour combattre l'univers
fatidique tout entier ligué contre lui, comme elle permet au
sculpteur de la même époque d'établir, entre les masses
contrastées et les gestes antagonistes, un équilibre victo-
rieux du désordre et du chaos qui les force à rentrer dans
un même ensemble et à les lancer du même élan dans un
mouvement continu. La statue, où le mâle dorien et la
femme d'Ionie se pénètrent dans une étreinte que la sou-
plesse de Myron et la vigueur de Polyclète nouent et dénouent
tour à tour, agit, marche, combat, repose dans une auguste
liberté. Elle n'est plus seulement architecture par elle-même.
Elle entre, avec ses voisines, dans un organisme plus com-
plexe, ondulations monumentales combinées où les formes,
pourtant séparées, réalisent, par leur succession, une mélodie
plastique dont les courbes se balancent (i). C'est comme les
(i) Fig. n.•
-22 -