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Faure, Élie
Histoire de l'art (5): L'esprit des formes — Paris: Éditions d'histoire et d'art, Librarie Plon, 1949

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https://doi.org/10.11588/diglit.71100#0310
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et sa verte obscurité. Comme les brahmanistes repoussaient
du dedans des pierres les croupes en mouvement, les mille
bras divins portant le lotus ou la hache, les poitrines calmées
et les paupières appesanties par le sommeil, l'incessante
ascension des instincts animaux dans l'homme, les boud-
dhistes ont sculpté le vol, sculpté la danse, sculpté le balan-
cement et jusqu'à la fraîcheur des palmes, sculpté les rumeurs
même, les spasmes, et les soupirs et les parfums. Et si
Brahma, dans ses quatre faces écrasées accueille, matrice
inépuisable, la profonde vie matérielle accourant de toutes
parts pour participer à modeler son front, à faire battre ses
narines, trembler sa bouche, noyer ses yeux de somnolente
volupté, la robe du Bouddha semble, entre ses genoux, une
coupe ciselée où vient dormir la lumière. Le confus univers
est présent partout où est l'homme, même si la forme de
l'homme est seule sur le rocher. L'homme est présent par-
tout où est le confus univers, même si les végétations et les
eaux ciselées représentent la forêt ou les tourbières fiévreuses
qu'il n'a pas pu traverser.
Que cette autre religion, proscrivant l'image de toute chose
vivante pour mieux s'isoler dans la contemplation de l'invi-
sible, ait couvert les déserts de coupoles légères, de minarets
pointant comme des cris d'extase, tout un mouvement spi-
rituel qui tourne et fuse, entraînant dans sa giration comme
une odeur de roses et la palpitation colorée prise à la gorge
des colombes (i)... ; que cette autre, au contraire, ait entassé
pêle-mêle, dans le même amas titubant, toutes les formes
possibles, surtout celles de la mort, griffes et crocs, orbites
vides, mâchoires de serpents (2), là comme ici l'idée d'une
divinité partout agissante et présente règle l'accord de
l'homme avec ele dans une exaltation que la multitude
éprouve et qu'elle traduit en un langage émouvant par
son unanimité. C'est le même spectacle en Occident quand
le monde chrétien prend conscience de l'unité spirituelle
conquise sur le chaos des sensations et la tragédie de l'His-

(1) Fig. 43.
(2) Art Médiéval, p. 112.

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