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de l'idolâtrie — et la science est la forme actuelle de l'ido-
lâtrie, la plus unanimement et candidement acceptée, la
plus choyée, et donc la plus cruelle — hors de la matière
du monde interrogée pour découvrir ce qui lui donne la
forme et le mouvement, tout n'est plus qu'abstraction aride,
jeu dans l'inconsistant, cercle conduisant à la mort.
L'idole fétiche précède partout la religion. Partout elle
renaît, quand la religion s'affaisse. Partout elle est aimée,
scrutée, même hors de la religion. Il n'est pas vrai qu'elle
naisse uniquement grâce à la religion, et à propos d'elle.
Le totémisme n'est pas l'origine, mais l'une des origines de
l'art. Il y a aussi — et sans doute d'abord — l'utilité qui
crée la céramique, le vêtement, l'arme, l'outil. Il y a le sens
obscur du rythme et le besoin de l'exprimer qui crée la
musique et la danse — on le voit bien chez l'enfant. Il y a
l'amour qui crée le tatouage, la parure, la coiffure, le bijou.
Il y a la chasse et la pêche qui appellent le récit et la des-
cription, récit et description qui gagnent à être illustrés. Il y
a le besoin de l'abri d'où est sortie l'architecture. L'immense
sollicitation des formes, des mouvements, des couleurs, éveille
en l'homme primitif une curiosité anxieuse dont il ne se peut
délivrer qu'en imaginant une équivalence approchée qui lui
prouvera sa puissance à recréer, pour sa joie et aussi dans
son intérêt, un univers doté de formes, de mouvements et
de couleurs.
Ni le spiritualisme pur ni a connaissance objective ne
détruisent l'idolâtrie. Ils la déplacent ou la renouvellent,
et voilà tout. Nous l'avons bien vu pour l'idée juive icono-
claste n'atteignant que par la fourmillante cathédrale le
cœur de l'Occident. Nous l'avons vu pour le christianisme
oriental décorant de noms nouveaux les processions pana-
thénaïques et appelant Orphée « David » pour maintenir la
lyre parmi nous. Nous le voyons au sein de l'Islam lui-même
qui ne peut empêcher l'enlumineur persan de substituer aux
idoles religieuses la peinture civile et mondaine la plus char-
mante qui loit (i). Nous l'avons vu par la Renaissance ita-
(i) Art Médiéval, p. 137.

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