L’ENSEIGNEMENT OFFICIEL
sur le plan pédagogique que l’on fera œuvre utile. Le jeune musicien prend, à l’âge de
l’école, des réflexes qu’il conserve plus tard dans la carrière. A se galvauder prématuré-
ment, il ne gâche pas seulement son talent, mais il finit par perdre toute foi dans son art;
à se frotter dans les fosses d’orchestre avec les vétérans du quart-d’heure-taxi, il s’initie rapi-
dement au triste marchandage des remplacements et du « tant la note ». Il se dispose à per-
pétuer avec constance, dans la France de demain, les regrettables habitudes qui, pour avoir
l’excuse d’être nées à une époque où des talents étaient honteusement exploités, ne faisaient
pas moins de nos orchestres la risée du monde entier, en même temps que leurs merveil-
leuses possibilités faisaient l’envie de ce même monde.
C’est toute une nouvelle mentalité qu’il importe de forger à ces jeunes gens : une
spiritualité faite d’esprit de corps et de respect de leur art. Ils ne demandent que cela : ils
sont prêts à répondre avec enthousiasme à tout appel d’une France nouvelle, attentive
à leurs besoins et à leurs aspirations, sévère aux exploitants sans scrupules, d’une France
qui a besoin d’eux pour maintenir intacts l’éclat et le rayonnement d’une tradition dix fois
séculaire. Mais il fallait, pour atteindre ce but élevé, éliminer les perpétuelles préoccupations
matérielles qui les poursuivaient jusque sur les bancs de l’école.
Aujourd’hui donc, l’espoir se lève. Encore quelques années, et il sera permis de
penser que la jeunesse artistique de notre pays aura repris conscience de sa mission sur le
plan national, et fera surgir à nouveau, après la débandade morale à laquelle nous avons
assisté, le spectacle
prostitué. C’est
assurera à notre
longue période
enviée qu’il a si
au cours de son
revivifiant d’une foi saine dans un art qui
fut trop souvent
ainsi qu’elle
pays, pour une
encore, la place
souvent occupée
histoire.
Claude
DELVINCOURT,
Directeur du Conserva-
toire national de
Musique et d’Art
dramatique.
(Photo André Zucca.)
Un groupe d’élèves du Conservatoire.
108
sur le plan pédagogique que l’on fera œuvre utile. Le jeune musicien prend, à l’âge de
l’école, des réflexes qu’il conserve plus tard dans la carrière. A se galvauder prématuré-
ment, il ne gâche pas seulement son talent, mais il finit par perdre toute foi dans son art;
à se frotter dans les fosses d’orchestre avec les vétérans du quart-d’heure-taxi, il s’initie rapi-
dement au triste marchandage des remplacements et du « tant la note ». Il se dispose à per-
pétuer avec constance, dans la France de demain, les regrettables habitudes qui, pour avoir
l’excuse d’être nées à une époque où des talents étaient honteusement exploités, ne faisaient
pas moins de nos orchestres la risée du monde entier, en même temps que leurs merveil-
leuses possibilités faisaient l’envie de ce même monde.
C’est toute une nouvelle mentalité qu’il importe de forger à ces jeunes gens : une
spiritualité faite d’esprit de corps et de respect de leur art. Ils ne demandent que cela : ils
sont prêts à répondre avec enthousiasme à tout appel d’une France nouvelle, attentive
à leurs besoins et à leurs aspirations, sévère aux exploitants sans scrupules, d’une France
qui a besoin d’eux pour maintenir intacts l’éclat et le rayonnement d’une tradition dix fois
séculaire. Mais il fallait, pour atteindre ce but élevé, éliminer les perpétuelles préoccupations
matérielles qui les poursuivaient jusque sur les bancs de l’école.
Aujourd’hui donc, l’espoir se lève. Encore quelques années, et il sera permis de
penser que la jeunesse artistique de notre pays aura repris conscience de sa mission sur le
plan national, et fera surgir à nouveau, après la débandade morale à laquelle nous avons
assisté, le spectacle
prostitué. C’est
assurera à notre
longue période
enviée qu’il a si
au cours de son
revivifiant d’une foi saine dans un art qui
fut trop souvent
ainsi qu’elle
pays, pour une
encore, la place
souvent occupée
histoire.
Claude
DELVINCOURT,
Directeur du Conserva-
toire national de
Musique et d’Art
dramatique.
(Photo André Zucca.)
Un groupe d’élèves du Conservatoire.
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