Revue des beaux-arts de France — Nr. 1-6.1942/1943
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https://doi.org/10.11588/diglit.48495#0153
DOI Heft:
Nr. 3 (Février-Mars 1943)
DOI Artikel:Portrait d'artistes
DOI Artikel:Denis, Maurice: Jacques-Émile Blanche
DOI Seite / Zitierlink:https://doi.org/10.11588/diglit.48495#0153
JACQUES-ÉMILE BLANCHE
Portrait de la Comtesse de Noailles.
(Musée des Beaux-Arts de Rouen.)
Saint-Simon. Pessimiste en somme par tour-
nure d’esprit, et surtout par crainte d’être
dupe. Dans une autobiographie romancée,
et même très romancée, comme Aymeris, et
dans ses Propos de Peintre, il y a partout des
pages cruelles. Il lui arrivait dans la conversation
de se prendre lui-même pour cible. Il aimait
ferrailler comme pour entretenir le luisant de
son esprit. Il s’y amusait. Mais, remarquons-le,
il se souciait peu des risques, des réactions que
comportait un tel jeu : il cherchait, quoi qu’il
arrive, à faire ressemblant, à dire la vérité.
Qu’il y ait des lacunes de mémoire, trop
vite comblées, des erreurs, des injustices, je
ne le nie pas. Mais veut-on comprendre ce que
sa manière, si elle manque d’indulgence, peut
recéler de sensibilité, qu’on relise ses pages sur
Corot, ses souvenirs sur Helleu ou sur Sargent.
Ses coups de griffe dissimulent mal les senti-
les dévisager pour extraire d’elles tels
caractères secrets, faire enfin, d’après les
physionomies et les œuvres, d’impitoyables
diagnostics.
« Je ne suis qu’un portraitiste qui
raconte ce qu’il voit de son mieux et avec
cette franchise que les parents de ses modèles
réprouvent jusqu’à la lui laisser pour compte
trop souvent comme cruelle. Mes études,
mes portraits ne sont, à la façon de mes
portraits peints, que les paragraphes ou les
pages d’une petite histoire de mon temps.»
Voilà qui explique qu’il ait eu beau-
coup d’ennemis. Si de tous ses romans,
peintures de mœurs d’après nature, il préfé-
rait ]oséphin Perdrillon, c’est qu’il y avait
poussé plus à fond la satire d’une société
pourrissante et de scandales écœurants : il
s’y sentait plus près de Pétrone que de
(Photo du Musée.)
Portrait de Francis ]ammes.
(Musée des Beaux-Arts de Rouen.)
Portrait de la Comtesse de Noailles.
(Musée des Beaux-Arts de Rouen.)
Saint-Simon. Pessimiste en somme par tour-
nure d’esprit, et surtout par crainte d’être
dupe. Dans une autobiographie romancée,
et même très romancée, comme Aymeris, et
dans ses Propos de Peintre, il y a partout des
pages cruelles. Il lui arrivait dans la conversation
de se prendre lui-même pour cible. Il aimait
ferrailler comme pour entretenir le luisant de
son esprit. Il s’y amusait. Mais, remarquons-le,
il se souciait peu des risques, des réactions que
comportait un tel jeu : il cherchait, quoi qu’il
arrive, à faire ressemblant, à dire la vérité.
Qu’il y ait des lacunes de mémoire, trop
vite comblées, des erreurs, des injustices, je
ne le nie pas. Mais veut-on comprendre ce que
sa manière, si elle manque d’indulgence, peut
recéler de sensibilité, qu’on relise ses pages sur
Corot, ses souvenirs sur Helleu ou sur Sargent.
Ses coups de griffe dissimulent mal les senti-
les dévisager pour extraire d’elles tels
caractères secrets, faire enfin, d’après les
physionomies et les œuvres, d’impitoyables
diagnostics.
« Je ne suis qu’un portraitiste qui
raconte ce qu’il voit de son mieux et avec
cette franchise que les parents de ses modèles
réprouvent jusqu’à la lui laisser pour compte
trop souvent comme cruelle. Mes études,
mes portraits ne sont, à la façon de mes
portraits peints, que les paragraphes ou les
pages d’une petite histoire de mon temps.»
Voilà qui explique qu’il ait eu beau-
coup d’ennemis. Si de tous ses romans,
peintures de mœurs d’après nature, il préfé-
rait ]oséphin Perdrillon, c’est qu’il y avait
poussé plus à fond la satire d’une société
pourrissante et de scandales écœurants : il
s’y sentait plus près de Pétrone que de
(Photo du Musée.)
Portrait de Francis ]ammes.
(Musée des Beaux-Arts de Rouen.)