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Revue des beaux-arts de France — Nr. 1-6.1942/​1943

DOI issue:
Nr. 4 (Avril-Mai 1943)
DOI article:
La vie dans les musées
DOI article:
Aubert, Marcel: Au département de la sculpture: le mausolée du comte d'Ennery par Houdon
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.48495#0248

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LA VIE DANS LES MUSÉES
tration, malgré le faible prix demandé par le tapissier, malgré l’insistance d’Alexandre Lenoir,
malgré une lettre de Houdon du 20 février 1802, l’affaire échoua (1).
Rentré en possession de la famille, et conservé au château d’Ennery, devenu propriété
du duc de Lévis par son mariage avec la fille du comte d’Ennery, le mausolée fut transporté
par le dernier duc de Lévis-Ventadour dans son château de Noisiel (Seine-et-Marne). Son
neveu et héritier, le comte Raimond de Nicolay, le fit placer en 1872 dans la chapelle du
château de la Châsse où nous avons pu le voir et d’où il est entré au Louvre (2).
Ce monument mesure 2 m. 25 de large sur 2 m. 32 de haut et comprend, outre le
médaillon et l’autel, trois personnages, de grandeur nature, sculptés en haut-relief dans un
marbre d’un grain et d’une blancheur magnifiques, tantôt lisse, tantôt rugueux, dont l’auteur
a modifié la taille avec un art consommé, suivant les effets à obtenir. Il est en excellent état
de conservation; seules les premières phalanges de la main droite de la comtesse d’Ennery,
qui sans doute devait saisir l’urne que la mère montre à l’enfant, ont été refaits, et peut-être
par Houdon lui-même. Les figures étaient encastrées assez profondément dans un fond de
stuc qui sera rétabli lors de la mise en place du monument.
La composition est habilement centrée autour du point où devrait figurer l’urne,
et les masses s’équilibrent de chaque côté de l’autel, en même temps que s’oppose leur style.
L’attitude éplorée de la comtesse de Blot, quelque peu théâtrale, inspirée peut-être de
certaine sculpture antique, contraste vivement avec le groupe de la mère et de l’enfant,
d’une simplicité et d’une noblesse toutes classiques. La première, dont l’attitude est très
proche de celle de la figure de la Justice du tombeau du sénateur prince Alexis Dmitrie-
vitch Galitzine à Moscou (3), annonce déjà l’esprit romantique, tandis que la comtesse
d’Ennery, d’une dignité émouvante dans la douleur, deviendra, sans grand changement, la
grande Vestale de 1787. La fillette, charmante, est la sœur aînée de la petite Louise
Brongniart et de Sabine Houdon. Toutes trois d’ailleurs sont des portraits, ainsi que le
marquent nettement les papiers de famille, mais des portraits sobrement traités pour ne
rien enlever du caractère monumental de l’œuvre.
Tout l’art de Houdon, à l’époque de sa pleine maturité, se trouve résumé ici : le
mausolée du comte d’Ennery, exceptionnel par ses dimensions et son type, atteint, par la
qualité de son exécution, aux plus belles œuvres de l’artiste.
Marcel AUBERT,
Membre de V Institut,
Conservateur en chef du Département
des Sculptures.
(1) Dans sa lettre du 6 janvier 1801, Alexandre Lenoir affirme que le monument ne fut jamais mis en place; il en solli-
cite l’acquisition pour la somme de 2.500 francs à verser au citoyen Delières (Inventaire des richesses d’Art de la France, Archives
du Musée des Monuments français, t. I, p. 216-218).
(2) Le monument fut classé en 1930.
(3) Exécuté par Houdon en 1774. Église basse du monastère Bogoïavlenski, à Moscou. Cf. reproduction, dans : Louis
Réau, l’Œuvre de Houdon en Russie, dans Galette des Beaux-Arts, 1917, p. 135.

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