Revue des beaux-arts de France — Nr. 1-6.1942/1943
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https://doi.org/10.11588/diglit.48495#0308
DOI Heft:
Nr. 5 (Juin-Juillet 1943)
DOI Artikel:Portrait
DOI Artikel:Vaudoyer, Jean Louis: Louis Metman
DOI Seite / Zitierlink:https://doi.org/10.11588/diglit.48495#0308
PORTRAIT
aussi impatient d’accueillir les belles choses que les belles personnes, et dont l’intelligence
sensualiste savait si bien « déguster » la vie. Voici Gaston Migeon, féru d’Extrême-Orient,
le plus séduisant des savants, et qui se donnait à ce qu’il aimait avec une ferveur candide
restée presque enfantine. Voici Etienne Moreau-Nélaton, Poujaud, Pigalle, Edmond Guérin,
et le charmant, l’exquis Lucien Henraux, prince des dilettantes, si prématurément disparu.
Presque chaque jour, à la fin de l’après-midi, tous ces hommes éclairés et sensibles
se retrouvaient dans le lumineux bureau de Metman; ou dans ce petit « thé » de la rue de
l’Échelle qui fut le lieu de tant de causeries, de tant de complicités, de tant d’échanges.
Près de ces hommes âgés ou mûrissants, mais ayant tous conservé la vivacité de
l’esprit et la fraîcheur du sentiment — et aussi près de toi, cher Carie, près de toi, cher Adal, —
nous avions petit à petit attiré là des écrivains et des artistes de notre âge : Paul Drouot,
Charles Du Bos, Eugène Marsan, Gilbert de Voisins, Edmond Jaloux, Pierre Hepp,
François Fosca, Jean Giraudoux, Emile Henriot. Souvent Henri de Régnier ou René Boylesve
voulaient bien se joindre à nous, ainsi qu’à ceux qui restèrent pendant tant d’années les chers
et fidèles collaborateurs de Metman : Paul Alfassa et Jacques Guérin.
Les grands moments d’effervescence étaient ceux où le Musée des Arts Décoratifs
préparait l’une de ses fameuses et parfaites expositions. De 1900 à 1943 — avec l’assen-
'L.ucien Henraux.
timent et l’appui des présidents successifs de l’Union :
Georges Berger, Henri Bouilhet et François Carnot, —
Louis Metman n’en organisa pas moins de cent soixante-
dix ! L’immense hall, toute la suite des salles du « côté
jardin » leur étaient réservées; et, pour chacune d’elles,
Louis Metman parvenait à varier la décoration, la dispo-
sition, la physionomie des lieux; pour chacune d’elles
aussi, il parvenait à obtenir, des collections françaises
ou étrangères, tout ce qu’il fallait montrer et réunir
pour que l’exposition fût complète et exemplaire.
De ces expositions, les unes étaient belles, les
autres curieuses ou pittoresques, et toutes, dans leur
présentation soigneusement et sobrement raffinée, riches
d’enseignements, de rapprochements, de découvertes. Il
y eut ainsi la série des expositions japonaises, des mi-
niatures persanes; la série consacrée au Décor de la Vie
depuis le romantisme jusqu’à nos jours; la fabuleuse expo-
sition d’art byzantin; celle de la Turquerie en Europe;
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aussi impatient d’accueillir les belles choses que les belles personnes, et dont l’intelligence
sensualiste savait si bien « déguster » la vie. Voici Gaston Migeon, féru d’Extrême-Orient,
le plus séduisant des savants, et qui se donnait à ce qu’il aimait avec une ferveur candide
restée presque enfantine. Voici Etienne Moreau-Nélaton, Poujaud, Pigalle, Edmond Guérin,
et le charmant, l’exquis Lucien Henraux, prince des dilettantes, si prématurément disparu.
Presque chaque jour, à la fin de l’après-midi, tous ces hommes éclairés et sensibles
se retrouvaient dans le lumineux bureau de Metman; ou dans ce petit « thé » de la rue de
l’Échelle qui fut le lieu de tant de causeries, de tant de complicités, de tant d’échanges.
Près de ces hommes âgés ou mûrissants, mais ayant tous conservé la vivacité de
l’esprit et la fraîcheur du sentiment — et aussi près de toi, cher Carie, près de toi, cher Adal, —
nous avions petit à petit attiré là des écrivains et des artistes de notre âge : Paul Drouot,
Charles Du Bos, Eugène Marsan, Gilbert de Voisins, Edmond Jaloux, Pierre Hepp,
François Fosca, Jean Giraudoux, Emile Henriot. Souvent Henri de Régnier ou René Boylesve
voulaient bien se joindre à nous, ainsi qu’à ceux qui restèrent pendant tant d’années les chers
et fidèles collaborateurs de Metman : Paul Alfassa et Jacques Guérin.
Les grands moments d’effervescence étaient ceux où le Musée des Arts Décoratifs
préparait l’une de ses fameuses et parfaites expositions. De 1900 à 1943 — avec l’assen-
'L.ucien Henraux.
timent et l’appui des présidents successifs de l’Union :
Georges Berger, Henri Bouilhet et François Carnot, —
Louis Metman n’en organisa pas moins de cent soixante-
dix ! L’immense hall, toute la suite des salles du « côté
jardin » leur étaient réservées; et, pour chacune d’elles,
Louis Metman parvenait à varier la décoration, la dispo-
sition, la physionomie des lieux; pour chacune d’elles
aussi, il parvenait à obtenir, des collections françaises
ou étrangères, tout ce qu’il fallait montrer et réunir
pour que l’exposition fût complète et exemplaire.
De ces expositions, les unes étaient belles, les
autres curieuses ou pittoresques, et toutes, dans leur
présentation soigneusement et sobrement raffinée, riches
d’enseignements, de rapprochements, de découvertes. Il
y eut ainsi la série des expositions japonaises, des mi-
niatures persanes; la série consacrée au Décor de la Vie
depuis le romantisme jusqu’à nos jours; la fabuleuse expo-
sition d’art byzantin; celle de la Turquerie en Europe;
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