L’ART ET LE MÉTIER
modèles originaux de nos artistes, qu’aucune législation efficace ne protège et ne protégera
de longtemps contre ce dol. Le seul moyen de le conjurer serait précisément de réhabiliter
l’ornementation, car dans ce domaine, et surtout en raison de l’amélioration qu’assurera
l’enseignement artisanal, l’ouvrier français est maître et son travail universellement appré-
cié. En relevant la qualité de la production par la présence du travail personnel, de l’inven-
tion directe, expression d’un sentiment, la restauration de l’ornement doit rendre aux ou-
vrages artisanaux une valeur indispensable au redressement national. Ce n’est pas en effet
au meuble seul que s’applique ce programme : n’oublions pas que, voici quelque dix ans,
la soierie lyonnaise ne tissait plus que « de l’uni », parce que les architectes bannissaient
dans les intérieurs qu’ils concevaient, tout élément décoratif dont l’autorité eût risqué de
troubler l’unité de leur composition. Par bonheur, les manufacturiers ont compris qu’on
les conduisait à la ruine, et sont depuis peu revenus au décor. Il en va de même dans tout
le domaine des métiers d’art, et le Secrétariat Général des Beaux-Arts est pleinement
d’accord avec le service de l’Artisanat sur la nécessité comme sur les moyens de revi-
gorer un art qui soit national, et par son inspiration et par ses buts économiques.
Il n’est pas inutile d’insister sur l’importance pratique de cet unisson qui règne
entre les deux administrations : né d’échanges de vues directes entre leurs chefs
respectifs, M. Louis Hautecceur et M. Pierre Loyer, il gouverne la collaboration de plus
en plus fréquente et de plus en plus intime des agents des deux services. Dans les conseils
supérieurs comme dans les comités régionaux, le Secrétariat général des Beaux-Arts
prête au service de l’Artisanat l’expérience, la culture de ses architectes, de ses profes-
seurs, de ses fonctionnaires, auxquels, par un utile retour, le savoir professionnel des
artisans ne laisse pas d’offrir des moyens de comparaison et de révision non moins bienfai-
sants. Il serait en effet intolérable que, fût-ce pour des raisons d’esthétique honorables mais
essentiellement discutables et toujours éphémères, sans parler de motifs déterminés par des
intérêts beaucoup moins élevés
négligé. Il est de toute évidence
de qualité, n’employant que peu
à la main-d’œuvre, est pour
obligation, voire une véritable
réflexe défensif auquel il nous
l’opération raisonnée et métho-
rêt permanent de la nation, puis-
originaux.
un élément actif du
(Photo Laure-Albin Guillot.)
Potier à son tour.
redressement nécessaire pût être
que le développement du travail
de matière première par rapport
notre pays non seulement une
loi, mais une ressource. C’est le
faut obéir, en même temps que
dique la plus conforme à l’inté-
qu’il correspond à ses moyens
Guillaume JANNEAU,
Administrateur général
du Mobilier national
et des Manufactures nationales.
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modèles originaux de nos artistes, qu’aucune législation efficace ne protège et ne protégera
de longtemps contre ce dol. Le seul moyen de le conjurer serait précisément de réhabiliter
l’ornementation, car dans ce domaine, et surtout en raison de l’amélioration qu’assurera
l’enseignement artisanal, l’ouvrier français est maître et son travail universellement appré-
cié. En relevant la qualité de la production par la présence du travail personnel, de l’inven-
tion directe, expression d’un sentiment, la restauration de l’ornement doit rendre aux ou-
vrages artisanaux une valeur indispensable au redressement national. Ce n’est pas en effet
au meuble seul que s’applique ce programme : n’oublions pas que, voici quelque dix ans,
la soierie lyonnaise ne tissait plus que « de l’uni », parce que les architectes bannissaient
dans les intérieurs qu’ils concevaient, tout élément décoratif dont l’autorité eût risqué de
troubler l’unité de leur composition. Par bonheur, les manufacturiers ont compris qu’on
les conduisait à la ruine, et sont depuis peu revenus au décor. Il en va de même dans tout
le domaine des métiers d’art, et le Secrétariat Général des Beaux-Arts est pleinement
d’accord avec le service de l’Artisanat sur la nécessité comme sur les moyens de revi-
gorer un art qui soit national, et par son inspiration et par ses buts économiques.
Il n’est pas inutile d’insister sur l’importance pratique de cet unisson qui règne
entre les deux administrations : né d’échanges de vues directes entre leurs chefs
respectifs, M. Louis Hautecceur et M. Pierre Loyer, il gouverne la collaboration de plus
en plus fréquente et de plus en plus intime des agents des deux services. Dans les conseils
supérieurs comme dans les comités régionaux, le Secrétariat général des Beaux-Arts
prête au service de l’Artisanat l’expérience, la culture de ses architectes, de ses profes-
seurs, de ses fonctionnaires, auxquels, par un utile retour, le savoir professionnel des
artisans ne laisse pas d’offrir des moyens de comparaison et de révision non moins bienfai-
sants. Il serait en effet intolérable que, fût-ce pour des raisons d’esthétique honorables mais
essentiellement discutables et toujours éphémères, sans parler de motifs déterminés par des
intérêts beaucoup moins élevés
négligé. Il est de toute évidence
de qualité, n’employant que peu
à la main-d’œuvre, est pour
obligation, voire une véritable
réflexe défensif auquel il nous
l’opération raisonnée et métho-
rêt permanent de la nation, puis-
originaux.
un élément actif du
(Photo Laure-Albin Guillot.)
Potier à son tour.
redressement nécessaire pût être
que le développement du travail
de matière première par rapport
notre pays non seulement une
loi, mais une ressource. C’est le
faut obéir, en même temps que
dique la plus conforme à l’inté-
qu’il correspond à ses moyens
Guillaume JANNEAU,
Administrateur général
du Mobilier national
et des Manufactures nationales.
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