Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 19.1893 (Teil 2)

DOI Artikel:
Deshayes, Émile: Considérations sur l'histoire de l'estampe japonaise
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.22769#0020

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
8 L'ART.

éditeur doit installer chez lui et habiller pour être sûr qu'il ne
lui échappera pas et l'obliger à travailler !

Nous pourrions encore nous arrêter longuement à cet amu-
sant défilé d'hommes de toutes classes : poètes, lettrés, anciens
samourais, concierges, employés de commerce, pompiers, charpen-
tiers, marchands de poissons, teinturiers, qui deviennent célèbres
comme dessinateurs d'estampes et ne sont autres que Yeïsen,
Taïto, Shinsaï, Kikoumarou, Shiguemassa, Hiroshigué, Gakoutei,
Hokououn, Koumimassa, Kouni yoshi, etc.

Mais nous n'avons pas à faire ici l'analyse d'un ouvrage qui
n'est pas encore publié.

Revenons donc à notre étude.

Les aperçus critiques qui l'accompagnent sont dignes d'atten-
tion.

Ils remettent l'estampe à sa place secondaire. Quelques-uns
parmi nous ne verront pas sans peine ce rappel au bon sens et
nous avouerons d'ailleurs pour notre compte qu'il est vraiment
dommage de chicaner sur son plaisir. On peut en effet se deman-
der, devant certaines estampes, ce qu'aurait gagné le sujet à être
traité par un pinceau libre de toute entrave, affranchi du souci
de la gravure et de l'impression.

L'émotion d'artiste que par exemple Hiroshigué dut ressentir
à la vue d'une bande d'oies volant au-dessus de la baie de Taka-
nava1 nous eût-elle gagnés davantage en passant de l'estampe au
Kakémono 2 ?

Évidemment nous avons à faire ici à bien des conventions qui
sacrifient un peu au décor; sans doute jamais oies vues en plein
vol ne se dessinent aussi nettement, sans doute les contours de
cette baie sont marqués de traits trop précis, sans doute les colora-
tions sont inexactes ! Mais ceci est indéniable : si le peintre a été
ému devant la beauté du sujet il a su nous le faire comprendre et
a su nous convaincre. Il a résumé et reconstitué pour nous l'in-
tensité de son impression, nous a montré tout le charme d'un
paysage beaucoup mieux que ne sauraient le faire bien de nos
peintres en iste qui étouffent leurs sentiments jusqu'à les faire
disparaître derrière d'autres conventions d'ailleurs impénétrables à
un œil et une intelligence qui n'ont pas été spécialement exercés.

Cependant, en dépit de tout le plaisir un peu irréfléchi que
nous cause l'estampe, et qui nous vient surtout de qualités qui lui
sont pour ainsi dire extérieures : •— choix des sujets, si propres à
attiser notre dilettantisme, mise en page originale et intelligente,
observation fine et spirituelle, sens exquis du pittoresque, colora-
tions harmonieuses, etc., — il faut convenir, quoi qu'il en coûte d'y
voir clair, que notre auteur japonais a la raison de son côté. Nous
devons protester avec lui contre les séductions d'un genre qui a
fait oublier au public et aux artistes les traditions d'un art indé-

1. Une des huit vues célèbres de Tokio. Figurait sous le n° 177, à l'Exposition de Hiroshi-
gué, chez Durand-Ruel, janvier-février 1893, et a été reproduite dans le numéro du 1" mars de
l'Encyclopédie.

2. Objet suspendu.[Est la forme la plus générale du tableau japonais. La peinture exécutée
sur papier ou sur soie est encadrée de papier ou de soie de couleurs variées, et suspendue au
mur. Elle est soutenue dans le haut par une baguette et tendue par le poids d'un rouleau géné-
ralement en bois et dont les extrémités sont garnies d'ivoire, de métal, ou autres matières.
 
Annotationen