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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 19.1893 (Teil 2)

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Dunoyer de Segonzac, Jacques: Le tombeau de Guillaume du Bellay, Seigneur de Langey, dans la cathédrale du Mans
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Correspondance
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https://doi.org/10.11588/diglit.22769#0124

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94

L'ART.

à la veille de rentrer à la cathédrale. D'autre part, dans
son Mémoire sur Germain Pilon (Musée des Monuments
français, tome III, page ni), Lenoir s'exprime ainsi :
« Les restes précieux du mausolée de Langey, échappés à
la dévastation de 1793, que nous avons disposés et ar-
rangés dans notre petit Musée... »

En 1793, les révolutionnaires du Mans s'étaient em-
parés de l'église cathédrale pour les assemblées populaires
et les fêtes publiques. Il s'y commit de nombreux désor-
dres, et le représentant Garnier (de Saintes) notamment
se signala en faisant briser bon nombre de statues qui
décoraient l'édifice. Il paraît probable que le tombeau de
Langey ne fut pas plus épargné que le reste, et si les
parties principales nous ont été conservées, nous le de-
vons au sieur Maulny, dont Lenoir vante les goûts artis-
tiques. Ce Maulny possédait un cabinet d'histoire naturelle
qui devint un des éléments constitutifs du Musée naissant,
et les débris du tombeau suivirent sans doute le cabinet.

Comme il est aisé de s'en rendre compte en jetant les
yeux sur les dessins qui illustrent cet article, le monu-
ment actuel est loin de donner l'impression de magnifi-
cence que produisait le tombeau primitif. Les parties
essentielles subsistent à la vérité, mais l'harmonie de l'en-
semble est détruite. Si la statue de Langey, si la frise
marine qui orne le sarcophage, si les Termes gardiens de
la mort, sont toujours admirables, ils sont admirables iso-
lément. Il v a dans le monument des vides profonds op-
posés au génie de la Renaissance, et la statue se détache
sur un fond nu qui ne la fait pas valoir.

Tel quel, le tombeau de Langey n'en reste pas moins
une œuvre d'art remarquable, et c'est grand dommage que
le clergé de la cathédrale du Mans ne s'inquiète pas de le
dégager des chaises et des bancs qui d'ordinaire l'encom-
brent, aussi bien que de le préserver d'inscriptions ineptes
qui le déshonorent. Dans son ouvrage sur la Renaissance
en France, M. Léon Palustre a décrit le tombeau avec mi-
nutie : il me suffira de lui emprunter les lignes suivantes :

« La statue de Langey, quelque remarquable qu'elle
soit, n'occupe à nos yeux que le second rang. A tous |

égards nous lui préférons l'admirable frise qui se déroule
sur le devant du lit de repos. Aussi bien comme mouve-
ment que comme finesse d'exécution, il est impossible de
rien désirer de mieux. Ce fouillis de tritons et de néréides
captive dès le premier instant, et, après avoir jugé l'ensem-
ble, on se plaît à examiner chaque détail. Il n'est pas jus-
qu'aux animaux qui, par leur diversité, n'attirent l'atten-
tion. Le monde de la mer possède aussi ses chevaux, ses
bœufs, ses lions que distinguent des nageoires à l'avant-
train et une longue queue de poisson. Tous se livrent aux
provocations, aux luttes corps à corps, pour le seul butin
recherché, c'est-à-dire une femme.

« De la frise, passons aux panneaux inférieurs. Des
deux parts c'est la même main qui se fait sentir, et nous
n'en voulons pour preuve que la répétition, sur un cas-
que, à gauche, de la figure placée au centre du bas-relief.
Du reste, il ne faut pas s'en plaindre, car rien n'est plein
de vie et de mouvement comme cet homme nu, monté sur
un hippocampe et brandissant à deux mains une touffe de
joncs marins. Le casque dont nous parlons se complète,
en outre, par un masque étrange où une tête de bélier est
superposée à celle d'un porc. »

On sait aujourd'hui d'une façon certaine que l'attri-
bution du tombeau à Germain Pilon est chose inadmis-
sible. Germain Pilon est né en 1535, et la statue de
Langey a dû être exécutée vers 1548. S'appuyant avec rai-
son sur les ressemblances qui existent entre cette statue et
celle de l'amiral Chabot, M. Palustre propose le nom de
Jean Cousin. Quanta la frise marine, elle lui paraît l'œu-
vre d'artistes italiens.

Quoi qu'il en soit, nous en sommes réduits sur l'auteur
du monument aux simples conjectures. La question dès
lors devient secondaire. L'unique chose intéressante et
qui doive nous attirer, c'est la beauté majestueuse de ce
corps d'homme à demi couché, de ces Termes au visage
inflexible ; c'est le mouvement de cette frise où vivent et
palpitent, autour d'une femme, les animaux et les
dieux de la mer.

Jacques Dunoyer de Segonzac

CORRESPONDANCE

A propos des articles que notre excellent collaborateur,
M. Servièrcs, a consacrés dans l'Art à l'œuvre de Saint-
Saëns, l'illustre compositeur veut bien nous adresser un
mot de rectification au sujet de certaine circonstance de
sa vie 1 ; on lira sans doute avec intérêt ce petit chapitre
biographique écrit par le maître lui-même.

(Note de la Rédaction.)

Dieppe, 7 août g3.

Cher Monsieur,

Dans l'étude que l'Art a l'obligeance de
consacrer à mes œuvres, il s'est glissé une
erreur que je suis vivement désireux de voir
rectifier. M. Servières, asse^ bien informé
d'ordinaire, a été mal renseigné au sujet d'Au-
ber, qui m'a toujours témoigné beaucoup de
bienveillance et d'intérêt. Lors de mon échec
au concours pour le prix de Rome, il n'avait
pas caché son mécontentement. Quelques jours
après, je fus appelé par M. Carvalho et j'ap-

1. Voir l'Art, 19° année, tome ii, page 58.

pris, à ma grande surprise, qu'Auber lui avait
envoyé son secrétaire pour lui demander de me
confier un livret d'opéra. C'est ainsi que je fus
amené à écrire la partition du Timbre d'argent.
Après ce fait, je n'avais pas à craindre l'hosti-
lité d'Auber dans un autre concours et à prendre
la précaution de faire passer ma copie par
l'Angleterre, ce qui eût été difficile, la musique
des Noces de Prométhée ayant été terminée
quelques heures seulement avant le délai fixé
pour le dépôt des partitions. Ce qui a pu don-
ner lieu à cette légende, c'est que j'avais
employé pour mon manuscrit un papier de très
grand format, peu en usage à cette époque, qui
fit naître à quelques membres du jury l'idée
d'une origine exotique.

Veuille^ agréer, avec mes remerciements,
l'expression de mes sentiments de sympathique
considération.

C. Saint-Saens.
 
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