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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 19.1893 (Teil 2)

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Courrier musical
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https://doi.org/10.11588/diglit.22769#0109

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Concerts du Conservatoire, Concerts des Champs-
Elysées et Concerts du Chatelet. — Symphonie
rhénane et Manfred, de Schumann. Ouverture acadé-
mique, symphonie en fa majeur et quintette pour clari-
nette et cordes, de M. Johannes Brahms. Symphonie
en ut mineur, le Rouet d'Omphale, la Lyre et la
Harpe, etc., de M. Camille Saint-Saëns. Les Béatitudes,
de César Franck.

I

Je terminais la dernière revue des concertsque j'eus occa-
sion de faire, en promettant de m'en occuper encore, un jour
que je serais de loisir, et d'examiner alors, par un coup
d'œil général, quels ont été les compositeurs les plus favo-
risés durant l'hiver dernier et à quelles œuvres ils ont dû
d'occuper principalement l'attention du public. Voici le
moment venu de tenir ma promesse, et, les théâtres étant
presque tous fermés durant ces longs mois d'été, de nous
reporter en arrière, et de voir un peu dans quel sens a
marché la musique au cours de l'hiver dernier et quels
furent les compositeurs les mieux traités par les chefs
d'orchestre ou les mieux accueillis par les amateurs. Ce
sont, sans aucune comparaison : Robert Schumann et
M. Johannes Brahms, César Franck et M. Camille Saint-
Saëns; autrement dit, deux morts et deux vivants, deux
Allemands et deux Français.

Et le premier des quatre, à tous égards, aussi bien par
l'ordre de naissance que par la supériorité du génie, étant
Robert Schumann, c'est par lui qu'il convient de com-
mencer. « Grâce à l'initiative convaincue de M. Pasde-
loup, écrivais-je il y a bien quinze ou seize ans, Schu-
mann, seul entre tous les musiciens, partage avec Beethoven
l'honneur de voir ses quatre symphonies faire partie inté-
grante du répertoire des Concerts populaires ; il en sera
bientôt de même au Conservatoire, quoi qu'en puissent
dire ceux des abonnés qui continuent de faire froide
mine à Schumann et qui se refusent à le placer au-
dessus de Mendelssohn. Il peut être inférieur à celui-ci
dans la pensée d'amateurs peu enclins à reconnaître le
génie, voire le talent, de prime abord,mais il est au-dessus
dans l'esprit des musiciens, et c'est là l'important.
M. Deldevez et ses cosociétaires, après M. Pasdeloup,
accentuent assez leurs préférences dans ce sens, puisqu'ils
n'ont plus qu'une symphonie de Schumann à jouer pour
que toutes quatre soient inscrites à leur répertoire, à côté
de Manfred. »

Cette prédiction s'est réalisée il y a déjà longtemps et
toutes les symphonies de Schumann occupent une place
glorieuse aujourd'hui sur les programmes du Conser-
vatoire. Et Manfred aussi. Or, justement cette année,
M. Taffanel, très désireux de signaler son entrée en
fonctions par un hommage rendu à Schumann et ne
Tome LV.

pouvant, comme il l'aurait désiré, jouer intégralement le
Paradis et la Péri, s'est rabattu sur la Symphonie en mi
bémol ou Symphonie rhénane, et sur Manfred. La
symphonie, nous le savons, est une des compositions les
plus grandioses du maître; elle comprend cinq morceaux
distincts (le quatrième formant une page religieuse absolu-
ment séparée du finale), mais ce quatrième morceau, ce
choral, est le seul qui ait été inspiré à Schumann par la
contemplation de la cathédrale de Cologne, et c'est de là
que vient le titre général de Symphonie rhénane. Voici
d'ailleurs ce que dit à ce propos le dernier biographe-
critique du maître, Reismann, dont l'ouvrage est bien plus
important, surtout au point de vue esthétique, que celui de
Wasilewski, antérieur d'au moins dix années:

« A la fin de l'été de i85o, Schumann fut appelé à
Dusseldorf avec le titre de chef de musique de la ville, et
ce changement dans sa vie exerça sur son génie la plus
heureuse influence : on peut citer pour preuve la compo-
sition de la troisième symphonie. Le quatrième morceau
de cet ouvrage a été directement" inspiré par les fêtes célé-
brées dans la cathédrale de Cologne à l'occasion du sacre
de l'archevêque de Geissel, et Schumann a marqué lui-
même qu'il avait entendu donner à sa composition le
caractère d'une cérémonie L Comme dans les années où il
jouissait de l'équilibre de ses facultés, Schumann, en écri-
vant cette symphonie, avait pleinement conscience de son
sujet et s'efforçait de donner une forme à une idée précise
et concrète. Il y a si bien réussi dans cette occasion, et les
circonstances extérieures sous l'influence desquelles sa
symphonie a pris naissance se reflètent si vivement dans
l'oeuvre elle-même, qu'on a pu la baptiser avec raison
Symphonie rhénane. »

Je ne suivrai pas Reismann dans son analyse technique
de l'enchaînement des tonalités de la symphonie, mais
j'en retiendrai seulement une idée ingénieuse : c'est qu'on
n'a plus affaire, avec cette symphonie, à un ouvrage
romantique, à une fantaisie subjective et sans objet exté-
rieur, mais bien à une représentation vivante et concrète ;
c'est qu'on est en plein réalisme, autant que Schumann en
peut faire. Il est évident que, surtout dans le scherzo
(lequel, par parenthèse, se rapproche plus de l'ancien
menuet d'Haydn que des scherzos de Beethoven), Schu-
mann a voulu peindre une danse populaire et que, dans
cet ordre d'idées, c'est une véritable trouvaille que cette
longue pédale d'ut sur laquelle s'enroule une série de
dessins allègres et joyeux. L'orchestre du Conservatoire a
remarquablement exécuté cette admirable composition,

i. Schumann avait noté cela même en tête de sa symphonie;
mais il l'effaça au moment de l'impression, en disant : « 11 n'est pas
hou de découvrir au public le fond de son cœur : mieux vaut l'émou-
voir par l'impression générale de l'œuvre; sinon on court le risque
de l'exciter à faire des comparaisons inopportunes. » C est Wasi-
lewski qui raconte ce fait caractéristique, négligé par Reismann.

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