L' art: revue hebdomadaire illustrée (19.1893 (Teil 2))

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L'ART.

ouvrage : Die Werke Italienischen Meister. in den Gale-
rien von Mùnchen, Dresden und Berlin, tandis que
Tiziano fut un poète essentiellement dramatique. Oui,
Tiziano fut un peintre plus puissant, mais il ne possédait
point certains accents poétiques qui distinguent au plus
haut degré Giorgione parmi les peintres de la Renais-
sance italienne.

Vasari remarqua que le Barbarelli aima la musique et
les belles femmes, mais, avant toutes choses, il adorait la
peinture, de même que Paolo Uccello plaçait par-dessus
tout la perspective.

M. Augusto Benvenuti, statuaire vénitien, a représenté
le grand artiste, dans un moment d'inspiration et cher-
chant à fixer la pensée poétique qui le domine.

Cette statue de Giorgione, élevée à Castelfranco
Veneto, tout près de Trévise, n'est point une sculpture de
grand caractère, portant l'empreinte d'un art personnel et
hardi; elle'se recommande toutefois à l'attention par une
certaine sobriété, par une allure élégante et le soin

apporté dans certains détails. On y retrouve partout la
note dominante de cette sculpture moderne d'Italie qui
•sacrifie trop souvent à des virtuosités d'exécution l'éléva-
tion du sentiment, la puissance de l'individualité, cette
allure très personnelle à laquelle se reconnaissent en art
les maîtres souverains.

L'œuvre de M. Benvenuti, auteur d'un monument à
Victor-Emmanuel, à Vicence, et du monument érigé en
l'honneur de Garibaldi, à Venise, est fort recommandable
au point de vue du travail; la façon dont est, par exemple,
traité le pourpoint d'une étoffe magnifique, très ouvragée,
selon la coutume vénitienne, est, sous ce rapport, parti-
culièrement à signaler.

M. Benvenuti a représenté le Giorgione dans les der-
nières années de sa trop courte vie; le célèbre peintre ne
vécut que trente-trois ans. Il a été moissonné avant d'avoir
donné toute sa mesure, lui dont nous ne connaissons
cependant que des oeuvres parfaites.

Alfredo Melani.

LE TOMBEAU DE GUILLAUME DU BELLAY

SEIGNEUR DE LANGEY

DANS LA CATHÉDRALE DU MANS

Le 4 juin 1810, le comte de Montalivet, ministre de
l'Intérieur, adressait une circulaire à tous les préfets de
l'Empire, et les invitait à répondre aux questions sui-
vantes :

« Quels sont les châteaux intéressans, soit par des
faits historiques, ou des traditions populaires, soit par la
forme de leur architecture ? En quel état se trouvent-ils,
dans quelles communes sont-ils situés ?

« Quelles sont les anciennes abbayes qui existent
encore dans le département ? où sont-elles situées? dans
quel état sont-elles, et à quoi servent-elles maintenant ?

« Que sont devenus, où ont été transportés les diffé-
rens tombeaux, ornemens ou débris curieux qui existaient,
au moment de la Révolution, dans chacun des châteaux
ou abbayes ? »

Le colonel baron Auvray, alors préfet de la Sarthe,
s'adressa, pour satisfaire le ministre, au sieur Renouard,
prêtre sécularisé, bibliothécaire du département, auteur
de plusieurs ouvrages concernant le Maine. Le rapport
rédigé par Renouard en cette circonstance, rapport déposé
aujourd'hui aux archives départementales de la Sarthe
(série T, liasse 69), contient les rares et uniques rensei-
gnements que nous possédions sur les vicissitudes et les
transformations subies, à l'époque révolutionnaire, par le
tombeau de Guillaume du Bellay, seigneur de Langey.

Issu d'une famille de l'Anjou qui prétendait descendre
des anciens ducs souverains d'Aquitaine, Guillaume du
Bellay était le fils aîné de Louis du Bellay de Langey et
de Marguerite de la Tour-Landry. Il avait une sœur,
Anne du Bellay, qui devint abbesse d'Etival en Charnie
(Sarthe), et six frères, parmi lesquels nous citerons seule-
ment René du Bellay, évôque du Mans de 1536 à 1546;
Jean, cardinal du Bellay, évêque de Paris et, après la
mort de son frère, évêque du Mans de 1546 à 1 556 ;
Martin du Bellay, prince d'Yvetot, gouverneur du Pié-
mont, puis de la Normandie.

Guillaume du Bellay fut vice-roi du Piémont, s'acquit
une brillante réputation de capitaine pendant les guerres
d'Italie, de diplomate pendant ses ambassades en An-
gleterre et en Allemagne, et d'écrivain en composant
plusieurs ouvrages d'histoire et de poésie. Il mourut le
9 janvier 1043, sur la montagne de Tarare, à .Saint-Sym-
phorien, en revenant d'Italie. René du Bellay fit apporter
au Mans le corps de son frère, et le fit ensevelir à la ca-
thédrale, dans la chapelle de Notre-Dame du Chevet.
Surpris lui-même par la mort, René du Bellay n'eut pas
le temps d'élever à son frère Guillaume un mausolée, il
en laissa le soin à ses autres frères, Jean et Martin.

Bien connu de tous ceux qui ont étudié la sculpture
française à l'époque de la Renaissance, le tombeau de
Langey a été plusieurs fois décrit et dessiné. Mais aucun
de ses historiens n'a pris souci de rechercher pourquoi le
tombeau, placé avant la Révolution dans la chapelle de la
Vierge, se trouve aujourd'hui dans la chapelle des Fonts,
et quelles causes ont amené les dégradations et les pertes
qu'un dessin de Gaignières nous permet de déplorer.

Voici sur ce point le témoignage de Lenoir :

« Le mausolée de Langey du Bellay, dont M. Maulny
a conservé la plus grande partie déposée dans le Musée du
département de la Sarthe et qu'on va incessamment trans-
férer dans la cathédrale où il était placé, donne la plus
grande idée de Germain Pilon, son auteur. Le sarcophage
en entier est de marbre d'Italie, et orné de bas-reliefs qui
imitent parfaitement l'antique. Les deux trophées, éga-
lement en marbre d'Italie, décèlent le génie qui crée, et
charment tous les connaisseurs par la beauté de l'exé-
cution. La figure de Langey et deux cariatides sont de
pierre de Tonnerre. Des sphinx de marbre noir sou-
tiennent le sarcophage. On regrette une grande partie des
ornements de ce superbe mausolée. »

Ces lignes étaient écrites en 1810. A cette date par
conséquent le tombeau se trouvait encore au Musée, mais