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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 19.1893 (Teil 2)

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Leroi, Paul: Le cent-onzième Salon de Paris et le cent-vingt-cinquième Salon de Londres, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.22769#0038

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24

L'ART.

taines, parce que sa composition : « Je suis la Résurrec-
tion et la Vie », constitue une exception à la déclaration
trop exacte par laquelle a débuté ce compte rendu : « La
caractéristique de la peinture au Salon de Paris est l'inin-
telligence. » Les exceptions ont toujours confirmé la règle.

M. Bondoux est un de ceux — rari liantes in gurgite
vasto — qui détonnent au milieu de la bêtise incommen-
surable du Salon de 1893. il a eu une idée et, s'il Ta tra-
duite d'un faire 'encore inhabile, son Christ, qui entre
dans cette chambre mortuaire, imprime à l'œuvre un
caractère réellement religieux qui relègue dans les derniers
dessous d'ineptes compositions de sainteté telles que le
Dernier Cri du Christ, la Tentation du Christ, Jésus et
les Pécheurs, etc.; ces insanités dépassent tout ce que
l'absence de talent engendra jusqu'ici de ridicule.

XIII

L'art décoratif n'est pas mieux partagé. II faut avoir vu
la Poésie, commise par M. Raphaël Collïn, l'Été de la
vie, énorme péché de M. Claude Bourgonnier, pour se
faire une idée de la façon dont on gaspille l'argent des
contribuables, sous prétexte d'embellir la Salle des
Mariages de la mairie de Montreuil-sous-Bois et le Salon
des Lettres à l'Hôtel de ville de Paris.

La peinture militaire est non moins en décadence.
M. Morot, dont on nous disait merveille avant l'ouverture
du Salon, n'a abouti dans sa Retraite de Saint-Jean
d'Acre (prairial an VII) qu'à nous montrer une page
d'une extrême faiblesse à côté de laquelle le moindre
tableau d'Hippolyte Bellangé témoignerait d'une écrasante
supériorité. L'artiste prouve également que son pinceau
est incapable de faire jouer les noirs.

M.Aimé Morot a mieux peint la tête de M. Chabrières-
Arlès, mais les vêtements sont d'une regrettable monoto-
nie de ton et si la main gauche de ce portrait est faible,
le raccourci de la main droite est absolument manqué.

Il n'y a du reste qu'un seul portraitiste très fort au
Salon : M. Casimir de Pochwalski, de Cracovie.

Après lui que l'on a été unanime à proclamer hors de
pair, il y a à citer M. Marcel Baschet, en progrès bien
qu'il ait donné à M. Francisque Sarcey non pas un aspect
de spirituelle bonhomie mais un air endormi, et qu'il ait
eu l'étrange idée de forcer Mmc A. Brisson, la fille du
critiqu,e, à sourire au spectateur [au lieu de s'occuper du
thé qu'elle verse;-puis MM. Pierre de Bengy, Pascal
Blanchard, Léon Bonnat qui n'aj pas assis sa mère en

perspective et n'a pas été prodigue d'épaule droite en
faveur de Mmc T..., J. C. Bricoux, Paul Chabas, Émile
Charles-Bitte à qui l'on doit le Portrait de son maître,
M. Albert Maignan, dans son atelier,—lequelM. Maignan
agirait sagement en revenant à ses sujets d'histoire plus
ou moins anecdotiques, et en renonçant à jamais aux
gigantesques entreprises du genre de son Carpeaux, du
Luxembourg ; — Théobald Chartran, qui a peint aima-
blement M. Lo^é, mais les traits de M. le Préfet de Police
ont bien plus de caractère; A. V. Duyver, Amand Gautier,
Jules Lefebvre dont le Portrait du général Brugère est
d'une déplorable vulgarité, mais dont le Portrait de
A/mc veuve Emile Raspail vaut mieux, bien qu'il offre ce
phénomène d'une main ultra-sanguine tandis que l'autre
a la blancheur du lait; Paul Legrand, dont le Portrait de
A/lle de S... est bien brossé, mais quelle étrange idée de
l'avoir accompagnée d'un demi-chïen ? — on cherche en
vain l'arrière-train de l'animal; —Ernest Michel, qui a
savamment peint M. le général marquis de Boisdenemets,
commandant le iùc corps d'armée; Maurice Mitrecey,
dont la bonne exécution du Portrait de Mma F... est
compromise par l'absence de simplicité du fond; Célestin
Serenne, dont on sent que le Portrait de M. L..., bien
établi, doit être fort ressemblant, et Tony Robert-Fleury,
auteur d'un Portrait de M™ E. G... qui nous procure
la précieuse occasion de bénir un très éminent académi-
cien. M. George Lafenestre daigne en effet nous apprendre,
dans la Revue des Deux-Mondes du ier juin, qu'il s'agit
d' « un très délicat portrait de jeune femme », que
« Mlle Beaury-Saurel [Portrait de Afmc Séverine) est en
progrès marqué », et que « M. Marcel Baschet a sans nul
doute pensé à Frans Hais et à Velasquez lorsqu'il a peint,
après un repas, M. Francisque Sarcey che\ sa fille,
Mma Brisson; il pouvait le faire sans danger,car il possède
une science personnelle de dessinateur dont il a déjà
fourni des preuves; ce souvenir, sans l'écraser, lui a porté
bonheur. La fillette, rose et blanche, j'allais dire, la petite
infante, qui regarde, de face, toute naïve et souriante, est
d'une fraîcheur vive que le noble Espagnol eût aimée ; le
vaillant ouvrier de Harlem aurait, de son côté, applaudi à
la bonhomie bourgeoise et joviale du personnage prin-
cipal, carrément enfoncé dans les flancs profonds d'un
large fauteuil, les mains croisées sur sa canne, car il aurait
reconnu dans cette franche, solide, joyeuse facture du
visage, haut en couleur, le souvenir de ses bons enseigne-
ments. »

Paul Le roi.

Le Gérant : E. M O RE AU.
 
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