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LA CHRONIQUE DES ARTS
Arts à l'Exposition universelle n'est pas en-
core signé, nous avons cependant lieu d'es-
pérer que cette dernière et urgente formalité
ne tardera pas, et nous croyons pouvoir an-
noncer que la date extrême pour le dépôt des
projets sera celle du 4 juillet.
Cette semaine a eu lieu, à Dijon, l'inau-
guration de la salle restaurée des États de
Bourgogne, dans le palais des ducs de Bour-
gogne.
#** On va vendre, à Londres, au mois de
mai, la collection de cartes à jouer rassemblée
par feue lady Charlotte Schreiber. Le « clou »
do la vente sera le jeu de tarots dits de Man-
tegna, qui date de la fin du xv siècle.
La célèbre galerie des ducs d'Ossunaest
exposée, en ce moment à Madrid, au palais
des Beaux-Arts et va être dispersée aux en-
chères. Parmi les merveilles qu'elle ren-
ferme, citons un portrait de femme par Van
Dyck; des œuvres de Rubens et de Ribera; les
portraits du second duc d'Ossuna, de la com-
tesse de 'fendilla et de deux enfants, par San-
chez Coëllo; plusieurs hauts pers'onnages de
l'entourage de Philippe III par Pantoja de la
•f.ruz; la Foire de Sun Isidro, si connue,
Y attaque de la diligence et de nombreuses
scènes par Goya; un Christ d'Alonzo Cano;
une Sébé de Canova.
En ce moment est ouverte, à Dresde,
au Cabinet royal des estampes, une exposi-
tion d'affiches illustrées, choisies parmi les
plus beaux spécimens exécutés en France, en
Belgique, en Hollande, en Italie, en Angle-
terre, en Allemagne, en Autriche et en Amé-
rique. Sur les 14a numéros que comprend
cette sélection, plus de moitié (72) représen-
tent la France et montrent la supériorité de
nos artistes en ce genre.
On vendra prochainement, à Cologne,
la galerie A. Schoenlank. Le catalogue porte
les noms de Rembrandt, de Van Dyck, de
Titien et de Véronèse, et comprend d'ail-
leurs 217 numéros.
-*ï^fc=S=£=£=*=S<--
Les Portraits du Dauphin, fils de Louis XV
AU MUSÉE DE VERSAILLES
Le Dauphin, fils de Louis XV, qui mourut
âgé de trente-six ans en 1765, et qui a joué
un rôle politique et moral assez considé-
rable, a été peint un grand nombre de fois
par les plus importants artistes de son
temps.
Dans le travail général de revision des at-
tributions du Musée de Versailles qui est en
train de s'accomplir, j'ai été amené à essayer
un classement de ceux des portraits du Dau-
phin que conserve le Musée. Des documents
des Archives nationales, en partie de môme
provenance que ceux qu'utilise si heureuse-
ment M. Fernand Engerand, m'ont permis
do fixer exactement le nom de l'auteur de
plusieurs tableaux et la façon dont ils ont
été composés. Sans insister sur des démons-
trations fastidieuses, et que seuls pouvaient
excuser, quand j'ai étudié Mesdames de
France, l'intérêt féminin du sujet et la va-
leur exceptionnelle des œuvres de Nattier,
je crois utile d'indiquer ici les principaux
résultats de ce petit essai d'iconographie.
Le plus ancien portrait du Dauphin en-
fant est celui qu'a gravé Daullé, en bonnet
ruché sur l'oreille et portant le cordon du
Saint-Esprit ; c'est celui de Belle, qui a peint
le même enfant sur les genoux de sa mère
(no de Versailles, 3756) ou assis sur un
coussin fleurdelisé (192). Un peu plus âgé,
on le trouve dans le joli Tocquê du Louvre,
dont Versailles a une copie ancienne (3789) ;
à dix-huit ans, Nattier fut chargé de l'im-
mortaliser en héros de Fontenoy, en le re-
vêtant d'une armure, et en indiquant une
bataille dans le fond. Ce portrait, qui
montrait le prince jusqu'aux genoux et
dont "nous trouvons une petite description
dans nos documents (1), semble perdu ; dès
1761, on ne le retrouvait plus nulle part (2).
Une médiocre toile de Versailles (3790), qui
représente le Dauphin au même fige, paraît
avoir, du moins, le mérite d'indiquer cer-
tains détails de cette composition. La tête
est très voisine de celle d'un grand portrait
de Natoire, qui l'a lui-même empruntée, sui-
vant les états de paiement, à un des pastels
de La Tour. Ce Natoire, signé et daté de
1747 et qui vient d'être encadré et placé
dans la chambre à coucher du Dauphin, ré-
cemment restaurée et ouverte au public, est
d'une assez intéressante composition. Il date
de l'année du second mariage du Dauphin,
que rappellent des Amours jouant avec un
casque et un bouclier sur le premier plan, à
droite ; le prince, en habit rouge et portant
les ordres, appuie son bâton de commande-
ment sur une table où sont une sphère et le
plan du siège de Tournai en 1745.
La série de portraits postérieurs achève de
(1) En 1751, une copie e.st payée à un copiste du
Cabinet du Roi nommé Prévost, et cette copie est
ainsi décrite : « Un portrait de M. le Dauphin, jus-
qu'aux genoux, d'après le Sr Nattier, en armure,
ayant la main droite appuyée sur unbaston garni
de Dauphins, tenant de l'autre son épée, un casque
renversé sur un bout de terrasse, dans le fond une
bataille. Ce tableau a de hauteur 4 pieds 3 pouces
sur 3 pieds 3 pouces de large. — 500 livres. »
(Archives Nationales, 01 1934 B.)
(2) Arch. Nat., 01 1932. Voir la Gazette des
Beaux-Arts du 1" juin 1895, p. 468.
LA CHRONIQUE DES ARTS
Arts à l'Exposition universelle n'est pas en-
core signé, nous avons cependant lieu d'es-
pérer que cette dernière et urgente formalité
ne tardera pas, et nous croyons pouvoir an-
noncer que la date extrême pour le dépôt des
projets sera celle du 4 juillet.
Cette semaine a eu lieu, à Dijon, l'inau-
guration de la salle restaurée des États de
Bourgogne, dans le palais des ducs de Bour-
gogne.
#** On va vendre, à Londres, au mois de
mai, la collection de cartes à jouer rassemblée
par feue lady Charlotte Schreiber. Le « clou »
do la vente sera le jeu de tarots dits de Man-
tegna, qui date de la fin du xv siècle.
La célèbre galerie des ducs d'Ossunaest
exposée, en ce moment à Madrid, au palais
des Beaux-Arts et va être dispersée aux en-
chères. Parmi les merveilles qu'elle ren-
ferme, citons un portrait de femme par Van
Dyck; des œuvres de Rubens et de Ribera; les
portraits du second duc d'Ossuna, de la com-
tesse de 'fendilla et de deux enfants, par San-
chez Coëllo; plusieurs hauts pers'onnages de
l'entourage de Philippe III par Pantoja de la
•f.ruz; la Foire de Sun Isidro, si connue,
Y attaque de la diligence et de nombreuses
scènes par Goya; un Christ d'Alonzo Cano;
une Sébé de Canova.
En ce moment est ouverte, à Dresde,
au Cabinet royal des estampes, une exposi-
tion d'affiches illustrées, choisies parmi les
plus beaux spécimens exécutés en France, en
Belgique, en Hollande, en Italie, en Angle-
terre, en Allemagne, en Autriche et en Amé-
rique. Sur les 14a numéros que comprend
cette sélection, plus de moitié (72) représen-
tent la France et montrent la supériorité de
nos artistes en ce genre.
On vendra prochainement, à Cologne,
la galerie A. Schoenlank. Le catalogue porte
les noms de Rembrandt, de Van Dyck, de
Titien et de Véronèse, et comprend d'ail-
leurs 217 numéros.
-*ï^fc=S=£=£=*=S<--
Les Portraits du Dauphin, fils de Louis XV
AU MUSÉE DE VERSAILLES
Le Dauphin, fils de Louis XV, qui mourut
âgé de trente-six ans en 1765, et qui a joué
un rôle politique et moral assez considé-
rable, a été peint un grand nombre de fois
par les plus importants artistes de son
temps.
Dans le travail général de revision des at-
tributions du Musée de Versailles qui est en
train de s'accomplir, j'ai été amené à essayer
un classement de ceux des portraits du Dau-
phin que conserve le Musée. Des documents
des Archives nationales, en partie de môme
provenance que ceux qu'utilise si heureuse-
ment M. Fernand Engerand, m'ont permis
do fixer exactement le nom de l'auteur de
plusieurs tableaux et la façon dont ils ont
été composés. Sans insister sur des démons-
trations fastidieuses, et que seuls pouvaient
excuser, quand j'ai étudié Mesdames de
France, l'intérêt féminin du sujet et la va-
leur exceptionnelle des œuvres de Nattier,
je crois utile d'indiquer ici les principaux
résultats de ce petit essai d'iconographie.
Le plus ancien portrait du Dauphin en-
fant est celui qu'a gravé Daullé, en bonnet
ruché sur l'oreille et portant le cordon du
Saint-Esprit ; c'est celui de Belle, qui a peint
le même enfant sur les genoux de sa mère
(no de Versailles, 3756) ou assis sur un
coussin fleurdelisé (192). Un peu plus âgé,
on le trouve dans le joli Tocquê du Louvre,
dont Versailles a une copie ancienne (3789) ;
à dix-huit ans, Nattier fut chargé de l'im-
mortaliser en héros de Fontenoy, en le re-
vêtant d'une armure, et en indiquant une
bataille dans le fond. Ce portrait, qui
montrait le prince jusqu'aux genoux et
dont "nous trouvons une petite description
dans nos documents (1), semble perdu ; dès
1761, on ne le retrouvait plus nulle part (2).
Une médiocre toile de Versailles (3790), qui
représente le Dauphin au même fige, paraît
avoir, du moins, le mérite d'indiquer cer-
tains détails de cette composition. La tête
est très voisine de celle d'un grand portrait
de Natoire, qui l'a lui-même empruntée, sui-
vant les états de paiement, à un des pastels
de La Tour. Ce Natoire, signé et daté de
1747 et qui vient d'être encadré et placé
dans la chambre à coucher du Dauphin, ré-
cemment restaurée et ouverte au public, est
d'une assez intéressante composition. Il date
de l'année du second mariage du Dauphin,
que rappellent des Amours jouant avec un
casque et un bouclier sur le premier plan, à
droite ; le prince, en habit rouge et portant
les ordres, appuie son bâton de commande-
ment sur une table où sont une sphère et le
plan du siège de Tournai en 1745.
La série de portraits postérieurs achève de
(1) En 1751, une copie e.st payée à un copiste du
Cabinet du Roi nommé Prévost, et cette copie est
ainsi décrite : « Un portrait de M. le Dauphin, jus-
qu'aux genoux, d'après le Sr Nattier, en armure,
ayant la main droite appuyée sur unbaston garni
de Dauphins, tenant de l'autre son épée, un casque
renversé sur un bout de terrasse, dans le fond une
bataille. Ce tableau a de hauteur 4 pieds 3 pouces
sur 3 pieds 3 pouces de large. — 500 livres. »
(Archives Nationales, 01 1934 B.)
(2) Arch. Nat., 01 1932. Voir la Gazette des
Beaux-Arts du 1" juin 1895, p. 468.