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La chronique des arts et de la curiosité — 1907

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Nr. 2 (12 Janvier)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19764#0021
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ET DE LA CURIOSITE

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Duranton, de Mm8Delvolvé-Carrière et de Mmo Séail-
les, de Mme Galtier-Boissière et de Mmo Pauline
Adour assure à ce petit Salon des dames une in-
contestable tenue d’art. Ce n’est pas que leurs œu-
vres soient exemptes de toute empreinte mascu-
line. L’amitié, ici, et, là, les liens du saDg expliquent
honorablement l’obsession qui fascine Mme Séailles
comme Mme Delvolvé-Carrière. L’une y échappe
du moins dans ses paysages, tandis qu’on sait gré
à l’autre, lorsqu'elle prend à son père le vase de
fleurs qui se devine sur la commode, à l’arrière-
plan de telle fameuse Maternité, d’avoir retenu la
part d’héritage la mieux appropriée à un tempéra-
ment féminin et d’y avoir ajouté la nuance d'un
sentiment décoratif particulier. Il serait plus diffi-
cile d’approuver ce que Mmo Desbordes emprunte,
pour ses Ophélies couronnées de fleurs, aux plus
laborieuses fantaisies peintes par le sculpteur
Bourdelle.

Quant à Mme Marie Duhern, son cas ne relève
pas de l’imitation, mais d’une affinité innée qui
fait d’elle, dans ses paysages intimes comme dans
ses intérieurs fleuris ou dans son charmant Coin
de table, l’émule de son mari. Intimistes, à
l’exception de MUe Adour qui.cherche le décor et
la synthèse, elles le sont toutes, et peintres d’inté-
rieurs aussi. MUe Germaine Druon justifie une
réputation qui, dans le genre délicat, n’est presque
pas inférieure à celles de M. Prinet ou de M. AValter
Gay. Il est naturel que les femmes consacrent
volontiers aux fleurs le plus fin de leur talent, et
il est vraiment agréable de constater que les toiles
où les fleurs jouent un rôle prépondérant comp-
tent parmi les meilleures de celte exposition, que
ce' soit l’excellente Serre de MUe Marcotte, ou le
bouquet de roses blanches que Mlle Jeanne Du-
ranton associe à de verts feuillages sur la table
servie de blanches porcelaines, ou les hortensias
dont Mms Galtier-Boissière a vu la note heureuse
près d’un vieux fauteuil réséda.

Si leur art se ressent moins des inquiétudes
contemporaines, les miniaturistes, Mms Debille-
mont-Chardon, Mme Bernamont et surtout Mlle Odé-
rieu, continuent dignement pour leur sexe une
longue tradition de gracieuse habileté.

EXPOSITION BORISSOV
(Galerie des Artistes modernes)

Pour des raisons semblables, les glaces éternelles
de la haute montagne et les banquises du pôle ont
trouvé peu d’interprètes qui aient su, de leurs
mornes et terribles beautés, extraire la possibilité
d’art qui y est fatalement, comme en toutes choses,
enfermée. M. Alexandre Borissov sera-t-il le Se-
gantini de la Nouvelle-Zemble? Il est légitime, il
est beau qu’un Russe ait le premier élevé à la di-
gnité de la peinture ces paysages qui ne se sont
guère jusqu’ici reflétés que dans les yeux fraternels
clés rennes et des Samoyèdes. Par la nouveauté, la
rareté, l’inattendu des sites et des effets, son expo-
sition a un si vif intérêt qu’on se reprocherait
comme une mesquinerie de signaler çâ et là une
certaine sécheresse, dont la cause n’est peut-être
qu’une trop scrupuleuse sincérité. Là où ne parais-
sent ni l’homme ni la plus rudimentaire habitation
humaine, .cette sécheresse disparaît et la manière
s’élargit jusqu’à une synthèse qui ne manque ni
d’allure ni d’émotion. Plus de deux cents études
eu tableaux sont l’héroïque butin rapporté de dix
expéditions par un chasseur passionné de visions

inédites. Il évoque avec la même franchise les
timides printemps de cette hiémale contrée, le so-
leil pâle qui sourit à la terre surprise de sa brune
nudité, puis les chaînes de montagnes blanches
aux ombres férocement bleues, les nuits lumi-
neuses que peuplent les ours vaguant à tra-
vers les immenses champs de neige, les bastions
branlants de glace aux transparences vertes et
bleues, et l’infernal crépuscule d’un jour d’éclipse :
entre deux hautes falaises translucides qui sem-
blent la porte du royaume d’Épouvante, l’eau de
pourpre sombre se presse dans l’étroit couloir, de-
puis l’horizon du ciel opaque et noir, que barre,
reflet d’une mystérieuse fournaise, une seule bande
de lumière rouge.

EXPOSITION iUrCHETTI
(Galerie Bernheim)

C’est une l’éunion d’environ deux cents études
anciennes, pastels ou dessins, qui paraissent avoir
été choisies un peu au hasard et qui n’ont guère
d’autre intérêt que de représenter l’état de l’atelier
de l’artiste il y a une vingtaine d’années. Les
meilleures sont des esquisses assez vivantes de
types populaires, rixes, foules en promenade ou
sortant de l’église, enlevées de ce crayon gras et
preste, aux traits effilochés, qui est bien italien et
qu’on retrouve, par exemple, dans les œuvres de
M. Mancini. Quelques notes de paysage, menues
et souvent mièvres, et, par contraste, de peu plai-
santes têtes d’hommes et de femmes beaucoup plus
grandes que nature, ne nous autorisent pas à por-
ter un jugement sur un peintre qui est depuis
longtemps fameux en Italie et dont on a vu ici, en
1100, de grandes compositions dramatiques et
décoratives.

EXPOSITION NICO JUNGMANN
(Galerie Georges Petit) .

En ces premiers jours de l’an 1907, ce sont des
artistes étrangers qui se partagent les différentes
galeries d’exposition. Après le Russe et l’Italien,
voici le Hollandais. Mais celui-ci est moins jalou-
sement national. Suivant les traces de son célèbre
compatriote M. Alma-Tadema, il s’est depuis plu-
sieurs années établi en Angleterre. G’est à Londres
qu’il a conquis, très jeune, une réputation qu’il
demande à Paris de consacrer. Les vieilles Breton-
nes et les enfants du Faouët l’attirent autant que
les pêcheurs hollandais ou les fiancées de Zélande,
et, parmi les modèles divers qu’il se propose, on
ne sait s’il préfère Greuze ou Holbein, Kate Gree-
naway ou Yan Beers. Le principal mérite de cet
artiste éclectique, plus savant que spontané, est
un amour de dessinateur minutieux, apparenté à
Rops et à M. Rassenfosse, pour le trait incisif.
Sa couleur est tantôt réduite à une simple gri-
saille, tantôt avivée jusqu'aux tons les plus aigres.
Mais ces inégalités s’expliquent peut-être par des
recherches de technique. Même quand le résultat
n’est pas beaucoup plus agréable que certaines
enluminures de fonds d’assiettes, il» faut, sans
doute, remercier un jeune artiste de vouloir, au
siècle où nous sommes, peindre a tempera.

Paul Jàmot.
 
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