ET DE LA CURIOSITE
15
l’éditeur, comme un ouvrage classique sur la ma-
tière.
Il conviendra, tout au moins, qu'il serve de
point de départ à toutes recherches futures de
détail entreprises sur Je même sujet, de référence
à toute personne, historien, critique ou curieux,
qui voudra se renseigner exactement sur ce que
fut la miniature du Moyen âge.
Paul Yitry.
Notre confrère Albert Soubies vient de faire
paraître, à la librairie dos Bibliophiles, le
tome XXXV (année 1905) de son élégant et utile
Almanach des Spectacles (in-32, 157 p. avec
1 eau-forte).
NECROLOGIE
La science archéologique a fait une grande perte,
le 2 janvier 1907, en la personne du professeur
Otto Benndorf, directeur de l’Institut archéolo-
gique autrichien, membre de l’Académie de Vienne
et correspondant, depuis 1895, de l’Académie des
Inscriptions.
Né en Saxe en 1818, Otto Benudorf eut la bonne
fortune d’étudier, à l’Université de Bonu, sous la
direction de trois des plus grands savants du
xixe siècle : Welcker, Ritsclil et Otto Jahn. C’est
surtout rinfluenco de ce dernier qui lui donDa le
goût de l’ôrchéologie figurée et qui, sans le dé-
tourner de l’étude des textes, l’engagea dans celle
des monuments.
Pourvu d’une bourse de l’Institut.archéologique
allemand, Otto Benudorf voyagea en Grèce et en
Italie. A Rome, de concert avec R. Schoene, il ré-
digea un catalogue raisonné du Musée du Latran
profane, qui parut en 1868; c’est un modèle de ce
genre d’ouvrages, qui n’a guère été surpassé depuis.
Professeur à Zurich, Otto Benudorf y prépara
deux mémoires importants sur les sculptures du
temple de Sélinonte et sur les casques et masques
funéraires, qui achevèrent d’établir sa réputation.
De Zurich, il passa à Munich, puis, bientôt après,
à Prague, où il enseigna jusqu’en 1877. A cette
époque, il précéda à M. Conze dans. la chaire d’ar-
chéologie à l’Université de Vienne, qu’il occupa
jusqu’en 1898; il prit alors sa retraite pour se con-
sacrer entièrement à l’Institut archéologique au-
trichien, qu’il avait fondé en 1897, et au recueil
périodique publié par cet Institut, les Jahreshefte.
Otto Benudorf prit une part considérable à quatre
grandes entreprises archéologiques, auxquelles son
nom restera attaché. En 1875, il travailla avec
M. Comze dans lile de Samothrace, uù fouillait une
mission autrichienne soutenue par deux navires
de guerre. Il fut un des premiers (après Longpérier)
à reconnaître la grande valeur artistique de la
Victoire de Samothrace, rapportée au Louvre par
Champoiseau, et le premier à déterminer, par
comparaison avec des monnaies, la date et la si-
gnification de ce chef-d’œuvre. En 1882, il dirigea
une expédition autrichienne en Lycie, retrouva le
mausolée de Trysa et en rapporta les magnifiques
bas-reliefs au musée de Vienne. La monographie
qu’il publia sur l'Uêroon de Trysa est une des
plus belles dont l’archéologie et l’histoire de l’art
puissent s’honorer. En 1896, de concert avec l’archi-
tecte Niemann, Otto Benndorf étudia les ruines et
les bas-reliefs de Tropacum Trajani (Adam-Klissi)
dans la Dobrudja, mis au jour par le sénateur
roumain Tocilesco, et leur consacra un ouvrage
qui, vivement attaqué par M. Furtwaengler, n’en
reste pas moins le premier travail approfondi sur
l’art gréco-romain dans les provinces de l’Empire.
Enfin, depuis 1896jusqu’à sa murt, Otto Benndorf
fut l’âme de ces belles fouilles autrichiennes
d’Éphèse qui, conduites avec la méthode la plus
vigoureuse, ont singulièrement accru notre con-
naissance de l’architecture antique, tout en dotant
le musée de Vienne de plusieurs chefs d’œuvre,
notamment de la grande statue en bronze d’un
athlète nettoyant son strigile.
Dans le domaine de la céramique grecque,
Otto Benndorf a été le plus compétent et le plus
original des continuateurs d’Otto Jahn. Son grand
ouvrage sur les vases grecs et siciliens est le pre-
mier où les beaux produits purement attiques
aient été l’objet de toute l’attention qu’ils méri-
tent. L’école de céramographie française (Rayet,
Dumont, Gollignon, Pottior) se rattache, par des
liens étroits, aux études de Otto Benndorf, qui offrit,
en outre, aux archéologues une vaste série de
documents bien choisis et bien reproduits, publiés
sous le titre de « Planches de démonstration »
( Vorlegeblætter).
L’enseignement scientifique de l’archéologie à
Vienne a été véritablement créé par Otto Benndorf.
Avec des ressources modestes, il y fonda un
« séminaire », qui publia des Mittheilungen et des
Abhandlungen ; il le dota d’une bibliothèque
admirable et d’un petit musée très instructif ;
c’est un des endroits du monde où l’on est le plus
à l’aise pour travailler, le mieux pourvu de res-
sources de tout genre pour s’initier à la science
ou pour contribuer à ses progrès.
Otto Benndorf. presque seul parmi les archéolo-
gues de langue allemande, était un remarquable
écrivain. Il avait des scrupules tout français de
clarté et d’élégance ; il savait revêtir ses jugements
artistiques d’une forme délicate et fine, sans jamais
tomber dans le qiathos métaphysique. Parmi ses
courts mémoires — sur la Vénus de Tralles, sur
les statues -de bronze de Naples, sur l’athlète
d’Éphèse — il y a des morceaux vraiment exquis,
qui méritent d’être réimprimés et réunis en volu-
mes, comme l’ont été ceux d’Otto Jahn et de Henri
Brunn. Moins universel que le premier de ces
savants, moins inventif peut-être que le second,
Otto Benndorf eut sur eux la supériorité de son
rare talent littéraire et d’une connaissance beau-
coup plus directe et plus approfondie des grands
monuments de l’Orient grec. Son nom vivra et
restera honoré, tant à Vienne qu’ailleurs, comme
celui d’un des plus brillants représentants de
l’archéologie et de l’histoire de l’art, à l’époque
féconde qui vit se réaliser l’union de ces études
pour la meilleure intelligence et la plus grande
gloire de l’hellénisme.
Salomon Reinach.
Nous avons le regret d’apprendre la mort de
notre confrère M. Chailes-Alphonse van Ryn,
directeur de la revue hebdomadaire bruxelloise, La
Fédération artistique, décédé à Bruxelles le
2 janvier. Il était né à Anvers, le 1er janvier 1840.
--—V-
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l’éditeur, comme un ouvrage classique sur la ma-
tière.
Il conviendra, tout au moins, qu'il serve de
point de départ à toutes recherches futures de
détail entreprises sur Je même sujet, de référence
à toute personne, historien, critique ou curieux,
qui voudra se renseigner exactement sur ce que
fut la miniature du Moyen âge.
Paul Yitry.
Notre confrère Albert Soubies vient de faire
paraître, à la librairie dos Bibliophiles, le
tome XXXV (année 1905) de son élégant et utile
Almanach des Spectacles (in-32, 157 p. avec
1 eau-forte).
NECROLOGIE
La science archéologique a fait une grande perte,
le 2 janvier 1907, en la personne du professeur
Otto Benndorf, directeur de l’Institut archéolo-
gique autrichien, membre de l’Académie de Vienne
et correspondant, depuis 1895, de l’Académie des
Inscriptions.
Né en Saxe en 1818, Otto Benudorf eut la bonne
fortune d’étudier, à l’Université de Bonu, sous la
direction de trois des plus grands savants du
xixe siècle : Welcker, Ritsclil et Otto Jahn. C’est
surtout rinfluenco de ce dernier qui lui donDa le
goût de l’ôrchéologie figurée et qui, sans le dé-
tourner de l’étude des textes, l’engagea dans celle
des monuments.
Pourvu d’une bourse de l’Institut.archéologique
allemand, Otto Benudorf voyagea en Grèce et en
Italie. A Rome, de concert avec R. Schoene, il ré-
digea un catalogue raisonné du Musée du Latran
profane, qui parut en 1868; c’est un modèle de ce
genre d’ouvrages, qui n’a guère été surpassé depuis.
Professeur à Zurich, Otto Benudorf y prépara
deux mémoires importants sur les sculptures du
temple de Sélinonte et sur les casques et masques
funéraires, qui achevèrent d’établir sa réputation.
De Zurich, il passa à Munich, puis, bientôt après,
à Prague, où il enseigna jusqu’en 1877. A cette
époque, il précéda à M. Conze dans. la chaire d’ar-
chéologie à l’Université de Vienne, qu’il occupa
jusqu’en 1898; il prit alors sa retraite pour se con-
sacrer entièrement à l’Institut archéologique au-
trichien, qu’il avait fondé en 1897, et au recueil
périodique publié par cet Institut, les Jahreshefte.
Otto Benudorf prit une part considérable à quatre
grandes entreprises archéologiques, auxquelles son
nom restera attaché. En 1875, il travailla avec
M. Comze dans lile de Samothrace, uù fouillait une
mission autrichienne soutenue par deux navires
de guerre. Il fut un des premiers (après Longpérier)
à reconnaître la grande valeur artistique de la
Victoire de Samothrace, rapportée au Louvre par
Champoiseau, et le premier à déterminer, par
comparaison avec des monnaies, la date et la si-
gnification de ce chef-d’œuvre. En 1882, il dirigea
une expédition autrichienne en Lycie, retrouva le
mausolée de Trysa et en rapporta les magnifiques
bas-reliefs au musée de Vienne. La monographie
qu’il publia sur l'Uêroon de Trysa est une des
plus belles dont l’archéologie et l’histoire de l’art
puissent s’honorer. En 1896, de concert avec l’archi-
tecte Niemann, Otto Benndorf étudia les ruines et
les bas-reliefs de Tropacum Trajani (Adam-Klissi)
dans la Dobrudja, mis au jour par le sénateur
roumain Tocilesco, et leur consacra un ouvrage
qui, vivement attaqué par M. Furtwaengler, n’en
reste pas moins le premier travail approfondi sur
l’art gréco-romain dans les provinces de l’Empire.
Enfin, depuis 1896jusqu’à sa murt, Otto Benndorf
fut l’âme de ces belles fouilles autrichiennes
d’Éphèse qui, conduites avec la méthode la plus
vigoureuse, ont singulièrement accru notre con-
naissance de l’architecture antique, tout en dotant
le musée de Vienne de plusieurs chefs d’œuvre,
notamment de la grande statue en bronze d’un
athlète nettoyant son strigile.
Dans le domaine de la céramique grecque,
Otto Benndorf a été le plus compétent et le plus
original des continuateurs d’Otto Jahn. Son grand
ouvrage sur les vases grecs et siciliens est le pre-
mier où les beaux produits purement attiques
aient été l’objet de toute l’attention qu’ils méri-
tent. L’école de céramographie française (Rayet,
Dumont, Gollignon, Pottior) se rattache, par des
liens étroits, aux études de Otto Benndorf, qui offrit,
en outre, aux archéologues une vaste série de
documents bien choisis et bien reproduits, publiés
sous le titre de « Planches de démonstration »
( Vorlegeblætter).
L’enseignement scientifique de l’archéologie à
Vienne a été véritablement créé par Otto Benndorf.
Avec des ressources modestes, il y fonda un
« séminaire », qui publia des Mittheilungen et des
Abhandlungen ; il le dota d’une bibliothèque
admirable et d’un petit musée très instructif ;
c’est un des endroits du monde où l’on est le plus
à l’aise pour travailler, le mieux pourvu de res-
sources de tout genre pour s’initier à la science
ou pour contribuer à ses progrès.
Otto Benndorf. presque seul parmi les archéolo-
gues de langue allemande, était un remarquable
écrivain. Il avait des scrupules tout français de
clarté et d’élégance ; il savait revêtir ses jugements
artistiques d’une forme délicate et fine, sans jamais
tomber dans le qiathos métaphysique. Parmi ses
courts mémoires — sur la Vénus de Tralles, sur
les statues -de bronze de Naples, sur l’athlète
d’Éphèse — il y a des morceaux vraiment exquis,
qui méritent d’être réimprimés et réunis en volu-
mes, comme l’ont été ceux d’Otto Jahn et de Henri
Brunn. Moins universel que le premier de ces
savants, moins inventif peut-être que le second,
Otto Benndorf eut sur eux la supériorité de son
rare talent littéraire et d’une connaissance beau-
coup plus directe et plus approfondie des grands
monuments de l’Orient grec. Son nom vivra et
restera honoré, tant à Vienne qu’ailleurs, comme
celui d’un des plus brillants représentants de
l’archéologie et de l’histoire de l’art, à l’époque
féconde qui vit se réaliser l’union de ces études
pour la meilleure intelligence et la plus grande
gloire de l’hellénisme.
Salomon Reinach.
Nous avons le regret d’apprendre la mort de
notre confrère M. Chailes-Alphonse van Ryn,
directeur de la revue hebdomadaire bruxelloise, La
Fédération artistique, décédé à Bruxelles le
2 janvier. Il était né à Anvers, le 1er janvier 1840.
--—V-