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La chronique des arts et de la curiosité — 1907

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Nr. 16 (20 Avril)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19764#0141
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ET DE LA CURIOSITE

131

Le Vernissage du Salon
de la Société Nationale

Des quatre expositions collectives auxquelles
l’État et la Ville accordent l’hospitalité officielle do
son palais ou de ses serres, le Salon de la Société
Nationale est, sans contredit, celui dont les événe-
ments secondent le moins la fortune. Des deuils
de la plus cruelle amertume l’ont tour à tour
éprouvé : il a perdu Puvis de Chavannes et Sisley,
Cazin et Eugène Carrière ; en môme temps, le
crédit grandissant de l’exposition des Indépendants
et du Salon d'Automne lui a enlevé sa portée de
manifestation d’avant-garde; faute de s’être libéra-
lement ouvert à ceux par qui l'évolution nécessaire
de la pensée et de la technique est logiquement assu-
rée, l’intérêt s’en est, de façon générale, émoussé,
affaibli. L’art d’autan s’y évoque, plutôt qu’on y
suit l’art d’aujourd’hui et qu’on y pressent l’art do
demain ; les droits des vétérans — souvent en
lamentable décadence — s’y exercent autoritai-
rement aux dépens des inconnus et des nova-
teurs admis à la dérobée, comme en contre-
bande. J’entends bien que le concours de M. Rodin,
de M. Albert Besnard reste acquis à la Société
Nationale, et chacun le sait d’inégalable impor-
tance; cette année, même, M. Bracquemoncl lui
revient et une exposition spéciale détermine
quelle place occupe dans l’école moderne un vrai
maître, original et savant, qui, sans séparer jamais
l’art de ses applications, sut, un demi-siècle du-
rant et sans arrêt, faire montre de personnalité et
acte d’initiative ; il y a encore quelque orgueil
pour le Salon, jadis protestataire, à revendiquer
comme siens M. Maurice Denis et M. Auguste Lc-
père et même, si l’on veut, les artistes de l’an-
cienne Société Mourey, chez qui se résument cer-
taines aspirations de la peinture contemporaine ;
tous ne se laissent pas cependant aussi favorable-
ment juger ici qu’à la galerie Petit, et de même
est-ce surtout chez Bernheim et rue d’Offémont
que chacun peut s’initier aux acquisitions inces-
santes, méthodiques, continues de M. Maurice
Denis, en plein épanouissement du génie et de la
célébrité. A tout prendre, l’intérêt de ce Salon
vient peut-être moins des tableaux que des sec-
tions accessoires trop volontiers sacrifiées à la
peinture; la proportion des ouvrages statuaires
dignes d'étude y est plus forte que nulle part ail-
leurs ; il n’en va pas autrement pour l’architec-
ture, l’estampe originale, et c’est toujours avenue
d’Antin que l’amateur, en quête d’un style nou-
veau, sera mis le plus sûrement à même de con-
naître l’état des arts du foyer et de la vie.

PEINTURE

Salle I. — Sollicité d’orner la coupole du Petit-
Palais, M. Albert Besnard s’est piqué de rappeler
la destination de l’édifice en évoquant au regard la
vie de l’être et de l’esprit, d'où l’art tire sa substance.
Les deux premières parties de l’ouvrage, aujour-
d’hui soumises, opposent, dans un saisissant con-
traste, la lento ascension vers les au-delà de la
Pensée immuable, victorieuse de la mort, et la
lourde chute de la Matière, en apparence caduque,
et cependant éternelle à travers la suite de ses
transformations. Ainsi se confirme la doctrine phi-
losophique déjà magnifiquement énoncée sur les

murs de la Sorbonne. L’idée se synthétise au moyen
do figures assemblées, et je ne sais guère d’inven-
tion plus forte que ce groupe de la Matière., trouant
la nue, pareil à un bolide. Seul, à l’heure présente,
M. Albert Besnard possède le pouvoir de substituer
aux attributs périmés de tels symboles, présentés
sous des dehors si pittoresques, si plastiques, que
la science impeccable de la technique s’égale aux
fières envolées d’un cerveau rompu à la méditation
des plus graves problèmes.

La grande toile de M. Rupert Bunny groupe
peut-être une figuration trop compacte, et l’en
semble n’est pas sans offrir quelque tendance
à la surcharge ; mais le luxe même de la com-
position porte le signe de très louables exigences
envers soi-même ; d’autre part, des ouvrages de
moindre format prennent soin de rappeler quel
intimiste exquis le peintre de Y Été sait être à son
heure.

Le Modèle attardé de M. E.-P. Ulmann. — Le
Soir chez les danseuses, par M. Alfred Bastion.

Salle U. — II ne me souvient guère que
M. Aman Jean ait soumis de portrait surpassant
en charme celui de cette jeune fille vêtue de rose et
pensivement accoudée, un lévrier à ses pieds ;
l’artiste s’y atteste en accord absolu avec sa propre
sensibilité; la qualité de l’attitude, de l’expression
physionomique se trouve exaltée par la gamme
atténuée, aux tons éteints, précieux, dans laquelle
toute l’image est volontairement tenue. Les Por-
teuses de guirlandes, du même artiste, semblent
constituer le motif do départ d’une frise, d’une très
séduisante ordonnance ornementale.

Placés à contre-jour, en dépit de toute raison,
deux paysages aux délicates irradiations, par
M. Emile Clans. — Des Vues clc Venise, par
M. Abel Truchet. — Les Branches de monnaie-
du-pape, par Mœe Cornélius. — Des Fleurs do
Mlle Brcslau. — Les Intérieurs do M. Moreau-
Nélaton. — Fantaisie de M. Agache.

Salle III. — Durant que M. Charles Cottct
s’adonne curieusement au portrait, comme pour se
montrer capable de serrer de près le détail d’une
ressemblance (Portrait de M. Lucien Simon),
M. André Dauchez évolue très décidément vers la
peinture claire, et toujours les aspects de la Bre-
tagne, même les plus humbles, s’ennoblissent, sous
ses pinceaux, du prestige du style.

La Nature morte de M. Ànquetin. — Les Portraits
do M. Lottin et de M,no Galtier-Boissièro. — Saint-
Marc de M. Walter Vaes. — Femme étendue par
M. Édouard Saglio.

Salles IV, IV bis et V.— On y a groupé quantité
de peintures décoratives. Si nous n'y rencontrons
pas encore celles que l’Hôtel de Ville de Paris
attend de M. Willette, du moins des projets
de frise, de plafond s’accordent-ils à confirmer
quelles tâches absorbent l’activité du plus tradi-
tionnellement français des maîtres modernes. Rien
ne manque à M. AVillette pour bien réussir dans de
semblables entreprises. C’est merveille de voir son
imagination ingénieuse et fertile découvrir pour
chaque thème une allégorie neuve et appropriée,
un symbole imprévu et suggestif; il y a là l’exem-
ple insigne d’un art qui excelle à tout embellir du
charme radieux de la grâce et de l’esprit.

M. Gaston La Touche a pu inquiéter la sympathie
au temps où ses tableaux portaient trace de han-
tises techniques ; la fantaisie, parfois quelque peu
 
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