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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 9.1874

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Nr. 2
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Blanc, Charles: Grammaire des arts décoratifs pour faire suite à la grammaire des arts du dessin, [6]
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https://doi.org/10.11588/diglit.21838#0111

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

10/»

oppositions, les fanfares de la couleur et l’accent des garnitures. Elle
brave la symétrie, fronce les volants de sa robe, comme elle froncera
ses lèvres et ses sourcils; elle redouble les accidents de sa parure et
elle l’achève en jetant une fleur de côté ou une plume couteau sur
un chapeau vainqueur, et en chiffonnant sa tunique par un retroussis
fier.

Il ne faut pas s’y tromper au surplus : la dignité du vêtement, le
luxe voilé, la sévérité de l’uni ou des camaïeux, sont quelquefois des raffi-
nements conseillés à une personne distinguée par sa coquetterie même.
Les femmes ont, elles aussi, des batteries masquées.

Mais que la toilette ait besoin d’harmonie, c’est une vérité banale,
pensera peut-être le lecteur, et il suffisait de l’énoncer. Eh bien non, cette
vérité n’est point banale, et chaque jour nous rencontrons des personnes
aimables qui l’ignorent ou qui agissent comme si elles l’ignoraient.
Chaque jour, nos promenades, nos rues, nos salons, nos foyers de
théâtre, sont traversés par des femmes aux parures dissonantes. Celle-ci
tout de noir habillée arbore à son chapeau une rose, qui dans son isole-
ment fait tache, de même que dans un tableau une seule lumière ne ferait
que percer un trou. Celle-là, au lieu d’associer des couleurs amies,
comme le bleu et le vert, ou des couleurs complémentaires, qu’il faut
toujours rapprocher à doses inégales, comme le vert et le rouge, le violet
et le jaune, a juxtaposé des couleurs disparates, par exemple, les
teintes mordorées et les tons frais, rose et grenat, feu et mauve, bleu et
marron. Nous avons vu telle femme d’esprit mettre chez elle une veste
écarlate sur un jupon dont la teinte groseille des Alpes formait avec la
première un scandale optique. Il n’est rien de plus cruel pour les yeux,
quand on veut faire contraster les couleurs, que de ne pas tomber juste,
c’est-à-dire de choisir à côté de la complémentaire U Mais les yeux ne
sont pas seuls intéressés dans le spectacle des couleurs assorties et des
harmonies ou des dissonances de la toilette : le sentiment y a sa part,
et, comme l’a dit une femme d’esprit : « Il est encore permis de rêver
avec un chapeau bleu de ciel, mais il est défendu de pleurer avec un
chapeau rose. »

1. La théorie des couleurs complémentaires a été clairement exposée dans la Gram-
maire des arts du dessin, à laquelle fait suite le présent ouvrage.
 
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