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Journal de la marbrerie et de l'art décoratif: bimensuel — 1.1903-1904 (Nr. 1-28)

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Nr. 2 (15 Novembre 1903)
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Les carrières de marbre Cipolin antique à Saillon (Valais), [2]
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Nieter, Gustav: L' art decoratif
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https://doi.org/10.11588/diglit.17192#0024

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Mais, si des progrès ont été réalisés en ces
matières, combien est considérable la tâche
qui reste à accomplir! L'Art décoratif, tel
qu'il doit logiquement s'entendre et se défi-
nir, n'a pas de limites. Les métopes du Par-
thénon, les voûtes de la Sixtine,les œuvres de
Donatello ornant la façade de l'église de St-
Michel de Florence, les portes de bronze de
Ghiberti, les bronzes de Cellini, les admi-
rables ferronneries ornant les palais de Flo-
rence et de Vienne, les tombeaux de Sanso-
vino, les fresques de Giotto, du Pérugin, du
Pinturicchio, font partie de l'Art décoratif.
Toutes ces œuvres, depuis les créations
immortelles de Michel-Ange jusqu'aux hum-
bles objets de ferronnerie,étaient des œuvres
décoratives, faisant partie d'un tout, desti-
nées à orner, à un degré différent, un monu-
ment, un palais, une église.

A Florence, on voit au Bargello un dessus
de coffret modelé par Michel-Ange. Ce puis-
sant génie croyait-il déchoir en faisant ainsi
le travail d'un artisan , d'un ouvrier d'élite?
Il y a quelques jours, le roi et la reine d'Italie
visitaient Versailles, qui est certainement un
des monuments oii l'art décoratif, sous ses
formes multiples, s'est donné le plus splen-
didement carrière. En ce qui concerne l'ex-
cellence de l'architecture, la beauté de la
sculpture, la magnificence de la peinture,
l'art du jardinage, la structure des fontaines
et l'ingénieuse invention des aqueducs, Ver-
sailles est réellement incomparable et unique.
Dans ce palais merveilleux, l'admiration
s'égare entre les portes ouvragées de Caffieri,
les fines serrures ciselées de Doinenico Cucci,
les sculptures de Tubi, ornemaniste émule de
Girardon, de Coysevox.Ce sont de véritables
artistes, les Francini, qui, jaloux de leur art
comme ces familles de vieux verriers véni-
tiens dont les secrets de fabrication se trans-
mettaient de père en fils, ont installé à
Versailles les machines ingénieuses qui,
aujourd'hui encore, font mouvoir les « grandes
eaux ». Lenôtre avait rapporté d'Italie la
manière de lisser et de friser au gros fer les
chevelures des arbres du parc, et c'est à des
décorateurs venus d'Italie aussi queLouis.XIV
commanda les statues, les vases décoratifs
qui peuplent et ornent les allées majestueuses.
Tout cela, c'est de l'art décoratif industriel,
et du plus noble, du plus raffiné.

Ce sont ces modèles, ces traditions dont
nos artistes modernes devraient se pénétrer,
d'abord pour se persuader qu'on ne s'abaisse
pas en industrialisant l'art,en multipliant ses
applications, en faisant servir à la décoration

les combinaisons de la pierre, du bois, du fer,
des marbres si nombreux, si variés, si vivants
d'aspect et de coloris. Et pour être décora-
teur de mérite, de goût raffiné, il faut une
éducation générale sérieuse et une grande
habileté de métier. Michel-Ange, Raphaël,
Vinci, peintres de génie, étaient aussi des
architectes distingués. Ils comprenaient l'uti-
lité de ce complément de leurs connaissances,
pour achever leurs œuvres maîtresses; aidés
de Jean d'Udine, de Perez de la Vega,ils arri-
vaient à exécuter ces ensembles étonnants,
modèles éternels de l'art décoratif, où la
peinture, l'architecture, la science de l'orne-
maniste se complètent génialement, qui
s'appellent les loges de Raphaël, de la Villa
Madame, par exemple! Les statuaires, les
architectes qui ont débuté par le métier, qui
ont été ornemanistes, se féliciteront toujours
de cet excellent apprentissage, de cette pre-
mière et nécessaire éducation.

Dans cet ordre d'idées, nous nous félicitons
des efforts que les pouvoirs publics ont déjà
réalisés, pour vulgariser les applications uni-
verselles de l'Art, pour en développer le pra-
tique enseignement,pour ouvrir l'intelligence
de nos sculpteurs, peintres, architectes aux
innombrables formes de la décoration. Mais
il reste beaucoup à faire! Dans les écoles, à
tous les degrés, il faut rendre l'enseignement
du dessin obligatoire, comme en Autriche,
pays des [tins avancé au point de vue des
arts industriels. Que les professeurs entre-
tiennent leurs élèves, dès leur jeune âge,dans
les idées du beau; au lieu d'en faire des pé-
dagogues, qu'ils en fassent de petits hommes
ouverts aux pensées artistiques; que, d'autre
part, les occasions offertes à la foule d'éclai-
rer, d'affiner ses goûts soient incessamment
multipliées. Au lieu d'acquérir tableaux sur
tableaux, destinés à des musées que le public
fréquente peu, que ne décore-t-on les monu-
ments, les hôtels de ville, les palais de jus-
tice, les écoles? Que l'on transforme les rues
et les monuments en musées, comme en Ita-
lie. On démontrera ainsi que l'art n'est pas
un objet de luxe, mais un objet d'utilité, de
nécessité, et les spécialistes, les architectes,
les marbriers, les verriers, les décorateurs,
les entrepreneurs d'ameublement, verront
leurs horizons s'ouvrir encore devant les
perspectives infinies d'un art industriel régé-
néré et de manifestations toujours nouvelles.

G. Nietek.
 
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