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brisée, je ne puis pas dire d'une façon qui
semble pourtant aussi simple que logique :
« Je vous ai confié une marchandise en bon
état, vous nie la rendez en pièces, c'est donc
vous qui l'avez brisée, ou bien prouvez-moi le
contraire. »
Non ; la Cour de cassation me répond hy-
pocritement : « Je ne demande pas mieux que
de vous croire, mais dites-moi, s. v. p., où,
comment, que] jour et par qui la marchandise
fut brisée, et si le coupable est un agent de la
compagnie, soyez certain que je sévirai éner-
giquement. » J'aurai beau arguer de ce que je
ne puis suivre ma marchandise, que la com-
pagnie est maîtresse chez elle et n'autorisera
aucune enquête dans ses livres ni auprès de
son personnel, etc., tout cela fera bien rire ces
excellents juges et ils décideront que ma ré-
clamation n'a pas. de base suffisante et que,
si mes marbres sont brisés, c'est que, jusqu'à
preuve du contraire, ils auront par leur na-
ture même éclaté en route.
En présence de cette jurisprudence à la
mode de Turquie, qu'esit-il arrivé ? C'est que
les compagnies, déchargées du tracas de soi-
gner les marchandises dont elles ont la garde,
se soucient bien peu de les manœuvrer avec
le soin et la délicatesse qu'on serait en droit
d'exiger,vu tes tarifs élevés qui sont appliqués
aux transports de marchandises fragiles. On
brise et on n'a qu'à dissimuler les causes de
l'accident, ce qui est bien facile en raison de
l'éloignement et de i'absence des intéressés.
Les agents des compagnies et les chefs de gare
ont intérêt à nier les faits, car si leur compa-
gnie ne leur paye pas directement une prime
pour chaque réclamation qu'ils parviennent à
écarter, elle leur donne en tout cas de bonnes
notes qui serviront pour les gratifications de
fin d'année et pour l'avancement. 11 faut donc
que ces agents soient malhonnêtes, puisque
c'est l'intérêt de leur compagnie, et puis,
d'ailleurs, leurs juges sont là pour les absou-
dre. Nous avons nous-mêmes souffert assez de
cette insigne mauvaise foi des agents des com-
pagnies pour pouvoir en parler en connais-
sance de cause. Nous reviendrons plus tard
sur cette question,le jour où nous expliquerons
les moyens de défendre les droits du public
dans les cas d'avarie.
Or, pour obvier à tous ces inconvénients et
à toutes ces injustices, pour rappeler même
les juges de la Cour de cassation à une appré-
J3anc de jardin, n° 5002. Largeur totale, 2 m. 47 ; hauteur, 1 m. ; profondeur, 0 m. 70.
brisée, je ne puis pas dire d'une façon qui
semble pourtant aussi simple que logique :
« Je vous ai confié une marchandise en bon
état, vous nie la rendez en pièces, c'est donc
vous qui l'avez brisée, ou bien prouvez-moi le
contraire. »
Non ; la Cour de cassation me répond hy-
pocritement : « Je ne demande pas mieux que
de vous croire, mais dites-moi, s. v. p., où,
comment, que] jour et par qui la marchandise
fut brisée, et si le coupable est un agent de la
compagnie, soyez certain que je sévirai éner-
giquement. » J'aurai beau arguer de ce que je
ne puis suivre ma marchandise, que la com-
pagnie est maîtresse chez elle et n'autorisera
aucune enquête dans ses livres ni auprès de
son personnel, etc., tout cela fera bien rire ces
excellents juges et ils décideront que ma ré-
clamation n'a pas. de base suffisante et que,
si mes marbres sont brisés, c'est que, jusqu'à
preuve du contraire, ils auront par leur na-
ture même éclaté en route.
En présence de cette jurisprudence à la
mode de Turquie, qu'esit-il arrivé ? C'est que
les compagnies, déchargées du tracas de soi-
gner les marchandises dont elles ont la garde,
se soucient bien peu de les manœuvrer avec
le soin et la délicatesse qu'on serait en droit
d'exiger,vu tes tarifs élevés qui sont appliqués
aux transports de marchandises fragiles. On
brise et on n'a qu'à dissimuler les causes de
l'accident, ce qui est bien facile en raison de
l'éloignement et de i'absence des intéressés.
Les agents des compagnies et les chefs de gare
ont intérêt à nier les faits, car si leur compa-
gnie ne leur paye pas directement une prime
pour chaque réclamation qu'ils parviennent à
écarter, elle leur donne en tout cas de bonnes
notes qui serviront pour les gratifications de
fin d'année et pour l'avancement. 11 faut donc
que ces agents soient malhonnêtes, puisque
c'est l'intérêt de leur compagnie, et puis,
d'ailleurs, leurs juges sont là pour les absou-
dre. Nous avons nous-mêmes souffert assez de
cette insigne mauvaise foi des agents des com-
pagnies pour pouvoir en parler en connais-
sance de cause. Nous reviendrons plus tard
sur cette question,le jour où nous expliquerons
les moyens de défendre les droits du public
dans les cas d'avarie.
Or, pour obvier à tous ces inconvénients et
à toutes ces injustices, pour rappeler même
les juges de la Cour de cassation à une appré-
J3anc de jardin, n° 5002. Largeur totale, 2 m. 47 ; hauteur, 1 m. ; profondeur, 0 m. 70.