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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 19.1893 (Teil 2)

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Molinier, Émile: Notes sur l'exposition de Madrid
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https://doi.org/10.11588/diglit.22769#0026

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i4 L'ART.

en trouvera ici la reproduction; mais ce dont il est impossible de donner une idée par le dessin,
c'est la couleur dont il est revêtu et qui en fait un des ivoires les plus curieux que Ton puisse
voir. Faut-il regretter que la plupart de nos bas-reliefs d'ivoire aient perdu cette décoration
polychrome, qui tient plus du bariolage que de la peinture? Peut-être que non, mais dans tous
les cas, on est heureux de rencontrer de temps en temps un témoin indiscutable de l'amour que
les artistes du Moyen-Age avaient pour la couleur. Dans cette même série de la sculpture en
ivoire, il me faudrait m'arrêter au Crucifix et au coffret de Léon, au Musée archéologique de
Madrid, œuvres barbares du xie siècle mais si précieuses pour l'histoire de la sculpture chré-
tienne dans la péninsule ; et surtout aux coffrets arabes si délicatement fouillés et montés en
orfèvrerie avec un goût exquis envoyés de Vérone, de Palencia et de Saragosse. Que de belles
choses les Musulmans ont laissées sur le sol de l'Espagne et ma foi, le dirais-je ? ces très humbles
vestiges vous inspirent tant de regrets que l'on a quelque peine à admirer l'œuvre des rois
catholiques. Regrets bien platoniques sans doute, mais qui sont encore plus vifs quand on considère
combien a été courte la prospérité de l'Espagne.

Très riche en orfèvrerie, si l'on en excepte quelques morceaux provenant de l'Escurial,
l'Exposition ne comptait en somme que peu de pièces dignes de remarque, énormément de
croix, calices, monstrances de la fin du xve et du commencement du xvie siècle, produits d'un art
gothique, dégénéré et exagéré, sur lequel, on ne saurait trop faire le silence; ou bien des œuvres
monstrueuses de taille et de goût telles que les aiguières et les vases exposés par la cathédrale
de Séville, ou l'orfèvrerie portugaise qui s'étalait dans une des salles du rez-de-chaussée : des
horreurs qu'il est bien regrettable d'avoir conservées jusqu'à notre époque alors que le creuset du
fondeur a servi de tombeau à tant d'œuvres d'art. Mais à côté de ces objets quelques-uns doivent
arrêter l'archéologue ou l'artiste : voici d'abord un monument vénérable du xie siècle, une
cassette venue d'Astorga et qui porte le nom du roi Alphonse ; c'est atrocement barbare, mais
d'une technique curieuse; puis voici un ex-voto en argent doré envoyé par un Français à Santiago,
au xve siècle, et apporté par un religieux de Paris en Espagne : œuvre médiocre, mais intéres-
sante pour nous. Enfin, voici la paix donnée en 1566 à la cathédrale de Valence par l'archevêque
D. Martin de Ayala et que l'on n'est pas peu surpris de voir attribuer à Benvenuto Cellini :
c'est une œuvre espagnole d'une finesse d'exécution admirable, et dont certaines parties cepen-
dant sont d'un goût douteux ; mais quel joli fauteuil d'or et quels beaux émaux ! L'Enfant Jésus
en relief, tout émaillé, assis sur un coussin, également émaillé, n'est à coup sûr jamais sorti du
cerveau d'un artiste italien.

Un autre baiser de paix de la Cathédrale de Valence, du milieu du xvie siècle, n'est peut-être
pas une œuvre irréprochable et je n'aime pas beaucoup la grosse perle baroque sur laquelle est
fixé le saint Jérôme d'or, qui forme le centre du monument. Mais c'est égal, m'est avis que voilà
deux monuments que plus d'un amateur voudrait faire sortir de la cathédrale, et plus d'une fois
déjà, paraît-il, on leur a fait la cour. Je n'ai pas de peine à le croire.

Toujours dans le même ordre d'idées je signalerai la belle paix en argent doré et en or
émaillé de Ciudad Real; l'architecture, de la fin du xvie siècle, toute surchargée de niches et de
statuettes, est peut-être un peu lourde, mais le camée byzantin en jaspe vert qui en occupe le
centre est un monument du plus haut intérêt ; on y voit le Christ délivrant des limbes les âmes
des patriarches; deux empereurs accompagnent le Sauveur. C'est là un des rares monuments de
ce style qu'ait révélés l'Exposition. Enfin pour finir, encore un baiser de paix : celui-là, petite
merveille de goût de la Renaissance italienne, a été envoyé par Tarragone. Cette dépouille d'un
Borgia pourrait bien être sortie de la boutique d'un orfèvre milanais fort en vogue à la fin du
xvc siècle.

Un beau stocco envoyé en i486 par le pape Innocent VIII à D. Inigo Lopez de Mendoza,
exposé par M. le marquis de Mondejar, fait peu d'effet auprès de l'épée dite de Boabdil, et une
autre du même genre envoyée par Mrae la marquise de Campotejar, tant les Morisques et les
Orientaux en général se montrent toujours plus habiles décorateurs que nous autres. Il y aurait
beaucoup à dire sur ces armes, dont la forme a une origine sans doute hindoue, sur les tapis
 
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