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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 19.1893 (Teil 2)

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Courrier musical
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Chronique de l'hôtel Drouot
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Courrier de l'art
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https://doi.org/10.11588/diglit.22769#0284

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228

L'ART.

En quoi il aurait eu tort, et ses amis serviraient bien mal
sa mémoire en cherchant à faire prévaloir cette opinion.
N'est-il pas déjà singulier, par exemple, de voir M. Gé-
rôme, parlant ici comme président de l'Académie des
Beaux-Arts, insinuer « que les compositions religieuses
de Gounod l'emportent, au point de vue intrinsèque, sur
ses œuvres profanes », en reconnaissant toutefois que ce
sont ces dernières qui lui ont acquis un si grand renom,
une popularité vraiment universelle? Après tout, ce sont
là paroles de peintre et qui n'ont pas grande autorité.

Mais la chose devient plus grave lorsque c'est M. Saint-
Saëns qui se prononce en des termes qui n'ont rien d'am-
bigu. « La postérité, dit-il, le verra peut-être autrement
que nous, pour qui Gounod est surtout l'auteur d'opéras
célèbres, applaudis dans le monde entier. Les œuvres de
théâtre sont plus ou moins éphémères et Gounod a mis
le meilleur de son génie dans des œuvres religieuses
qui lui conserveront l'admiration du public futur, quand
les siècles écoulés auront relégué dans les archives
de l'art les œuvres théâtrales qui nous passionnent aujour-
d'hui. Alors le monde musical appréciera à sa vraie valeur
le grand artiste que nous pleurons aujourd'hui... » Cette
affirmation est tellement audacieuse qu'on se prend,
malgré tout, à douter de la sincérité de l'orateur, ou plutôt
de sa clairvoyance d'esprit. Lui qui, malgré le sérieux
mérite de ses opéras, n'a jamais vu qu'un seul d'entre eux,
Samson et Dalila, obtenir les suffrages constants du public,
ne doit-il pas être enclin à penser que les œuvres sympho-
niques ou les compositions religieuses ont plus de valeur,
absolument, que les autres; ne doit-il pas être porté à
diminuer le prix des succès de théâtre et à formuler cette
loi du plus grand mérite et de la plus grande vitalité des
œuvres d'église ou de concert comparées aux créations de
la musique dramatique ? Et la mort de son illustre con-
frère lui aura paru une occasion très favorable pour enta-
mer ce plaidoyer tout personnel, en ayant l'air de dé-
fendre la cause de Charles Gounod.

IV

Singulier éloge, en vérité, car les compositions reli-
gieuses de Gounod,. inspirées, je le veux bien, par une
1 foi très fervente, sont, sous le double rapport de l'inven-

tion et de la facture, empreintes le plus souvent d'une
grande monotonie. L'auteur, y érigeant en système le
style et les procédés qu'il avait adoptés à mesure que
faiblissait son inspiration et les opposant, avec une illu-
sion touchante, aux envahissements progressifs de la
musique et des théories de Richard Wagner, prétendait
faire ici de la « musique plane et peinte à fresque »,
comme il disait; mais ces grands mots cachaient tout
simplement le déclin de son imagination fatiguée. Et
quand il avait constamment recours à ces grands ensembles
où les voix, doublées par les instruments, psalmodient
longtemps sur la même note, avec d'interminables batte-
ries d'accords; à ces longs crescendos amenant une- écla-
tante explosion après laquelle arrivait un pianissimo subit
ou même un brusque silence, il devait bien soupçonner,
pauvre grand musicien qui cherchait à se tromper lui-
même, qu'il n'avait plus ni la richesse d'idées, ni la fraî-
cheur d'imagination qui lui avaient fait écrire autrefois
Sapho, Faust, Pliilémon, Mireille et Roméo.

Certes, il y a de la noblesse et de la sérénité dans cer-
taines pages de Rédemption, de Mors et Vita, et ce n'est
pas un mince mérite pour le musicien que d'avoir pu
obtenir quelques effets de grandeur par la plénitude et la
largeur de certains accords, ou par la simplicité de la
déclamation, malgré ce parti pris de pauvreté qui semble
être une gageure; mais les belles pages sont très rares
dans ces œuvres de la fin de sa vie, et quand il s'y
montre vraiment touchant et personnel, c'est qu'il retombe
involontairement dans sa première manière et redevient
le Gounod des anciens jours. Mais alors il ne se soucie
aucunement de son nouveau système et fait tout tranquil-
lement chanter de façon identique et ses personnages
sacrés et ses héros d'opéras. C'est d'ailleurs ce qu'il pou-
vait faire de mieux et je ne crois pas qu'on puisse trouver,
par exemple, une différence sensible entre l'ancien Gounod
et celui qui a écrit dans Rédemption, soit le morceau de
la montée au Calvaire, soit la plainte de Marie au pied de
la croix, soit enfin quelques mesures qui peignent la
marche des Saintes Femmes allant en Galilée et qui rap-
pellent un peu le chœur qu'on entend dans la coulisse, au
premier acte de Faust. Allez donc parler d'un système
quelconque après avoir entendu ces morceaux-là.

(I.afin au prochain numéro.) ADOLPHE JuLLIEN.

CHRONIQUE DE L'HOTEL DROUOT

Le Samedi 18 Novembre aura lieu à l'Hôtel Drouot,
dans la salle n° 6, par le ministère de M0 Paul Chevalier,
assisté de M. Eugène Féral, expert, la première vente
exceptionnelle de la saison. Elle se compose principale-
ment de tableaux anciens et modernes parmi lesquels
deux toiles charmantes de Mlle Marguerite Gérard :

la Leçon de musique et la Leçon de géographie ; deux
excellents panneaux décoratifs du peintre Hubert Robert :
la Balançoire et la Promenade en bateau ; le Départ pour
la promenade, une des meilleures œuvres de Florent
Willems, etc. A signaler également la Cigale, marbre de
Jules Cambos.

COURRIER DE L'ART

BIBLIOTHÈQUE NATIONALE

Aux termes de l'inventaire général des collections de
la Bibliothèque nationale, commencé depuis 1875, sous
la direction du conservateur adjoint, M. Marchai, il
résulte que la Bibliothèque compte dans ses collections
2,1 5o ,000 volumes, sans parler des manuscrits, des jour-
naux, etc. L'agrandissement de la Bibliothèque s'impose.

C'est la conclusion d'un très remarquable rapport de
M. Paul Deschanel. A quand la mise à exécution?

Il est permis d'être sceptique à voir l'extrême lenteur
avec laquelle on a procédé jusqu'ici.

MUSÉE DE LAON
Il a reçu un nouveau don de M. le baron Alphonse de
Rothschild. L'éminent membre de l'Institut a offert à la
ville de Laon une toile de M. Alfred Guillou, récemment
nommé chevalier de la Légion d'honneur.

Pays-Bas. — La livraison de novembre de l'excellent
recueil mensuel qui se publie avec tant de succès à Ams-
terdam : Elsevier's Geïllustreerd Maandschrift, débute
par une très intéressante étude sur le peintre Johan
Anthonie Baltha\ar Stroebel, due à la plume autorisée
d'un lettré de grand talent, M. P. A. Haaxman Jr.

Le Gérant : E. M OR E AU .
 
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