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La chronique des arts et de la curiosité — 1907

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Nr. 18 (4 Mai)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19764#0161
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ET DE LA CURIOSITE

151

EnfiD,M. Migeon, pénétré de l’importance qu’of-
frent les grès japonais au point do vue del’influence
qu’ils exercèrent sur nos meilleurs céramistes,
Carriès, Ohaplet, Delaherche, a offert vingt-cinq
pièces de céramique d’ateliers divers coréens ou
japonais, qui seront d’utiles éléments d’étude
comparative.

Toutes ces œuvres sont exposées depuis mardi
dernier dans une salle du musée d’Extrême-Orient,
du bout des salles de la collection Grandidier.

-fi--

Le Vernissage

DU

Salon de la Société des Artistes français

L’intérêt qui s’attachait naguère aux Salons
s’appauvrit à mesure qu’ils se dédoublent et puis-
que, aujourd’hui, l’on en compte , autant que de
saisons dans l’annce, nul d’entre eux ne saurait
légitimement prétendre fixer un instant de la vie
artistique. Sans souci du jeu des événements,
l’ancien Salon no se départ pas des allures graves
qui siéent à la doyenneté ; la tradition académique
s’y maintient.Vous ne rencontriez chez les Indépen-
dants qu’impressions rapides tracées au petit bon-
heur, dans la fougue du prime-saut; voici, à l’op-
posé, des ouvrages de vaste format et de longue
haleine,patiemment conduits à terme et dont l’exé-
cution ne s’écarte pas des règles admises. Eugène
Guillaume en fixa jadis le canon ; elles préconisent
la reproduction mathématiquement fidèle de la
réalité, et l’on sait qu'une volonté tantsoit peu tenace
met chacun à même d’atteindre la précision
scientifique. Soyons exacts d’abord et artistes après,
par surcroît, si le pouvoir en est laissé. De là,
toute la clientèle de diplômés et dévoyés dont notre
époque s’encombre ; de là aussi, à ce Salon sur-
tout, l’uniforme pléthore de ces devoirs d’élèves
consciencieux, appliqués, productions d’où toute
personnalité est absente, à l’élaboration desquelles
la sensibilité et le goût restent, toujours ou peu s’en
faut, étrangers. Pourtant, ayant de préparer tant
d’activités à une faillite certaine, ne vaudrait-il pas
mieux s’enquérir des inclinations du tempérament
et vérifier à quel point la vocation autorise un pa-
reil emploi des facultés ? Semence perdue, celle
que l’on confie au sable infécond du désert ! Tout
notre système d’enseignement est à modifier, dans
l’essence même de son principe, et on s’applaudit
de voir des initiateurs comme M. Guébin ou M.
Quénioux, en révolte contre les programmes offi-
ciels, inaugurer des méthodes éducatives qui
subordonnent la technique à la spontanéité de
l’observation et de l’instinct. Êtes-vous, deman-
dent-ils, de ces privilégiés pour lesquels, selon e
mot de Concourt, « le monde visible existe » ? Savez-
vous trouver l’accord entre l’univers et votre pro-
pre nature ? Possédez-vous le don de la mémoire
pittoresque ou plastique ? Si oui, tout est bien :
œuvrez à votre guise, le reste viendra de soi-même.
Ceux-là seuls n’arrivent point à s’exprimer qui
n’ont rien à -dire...

La physionomie de ce Salon ne se modifiera
qu’à la faveur cl’une émancipation esthétique, lors-
que l’art sera devenu la libre manifestation de
l’individualité en voie de développement intégral.
Pour l’instant on y assiste sans surprise au retour

périodique des pires errements ; le jury s’est illus-
tré, selon la règle, par mainte exclusion inique,
allègrement prononcée ; des artistes qu’une sym-
palliie aelive entoure, M. Henri Déziré, M. Stefa-
nicz, figurent cette année sur la liste de proscrip-
tion ;• cependant la cohue est telle que le tri n’est
guère moins oiseux, ni moins pénible au Grand
Palais que clans les Serres de la Ville de Paris.
Seules les apparences diffèrent. J’entends bien
qu’ici le savoir-faire s’oppose à la maladresse, et
que l’acquis est tout autre; mais de quel côté la
conviction semble-t-elle la plus sincère ? Nul ne le
saurait dire, en vérité. Les friands de nouveauté
auront profit à se dis(]aire au jeu paradoxal de
l’anti-cimaise et il n’est que la vertu investigatrice
d’une lente patience pour atténuer, par le rare
plaisir de la découverte, la sensation de fatal re-
commencement tout d’abord éprouvée à parcourir
l’enfilade de ces salles si pleines -- et le plus sou-
vent si vicies.

Roger Marx.

*

* *

Peinture

Salle I. — Dès la première heure, M. William
Laparra s’est classé parmi les prix de Rome éman-
cipés, et nul ne saurait traiter à la légère la pein-
ture à laquelle s’est donné le meilleur de son effort;
elle a trouvé asile dans ce hall que le rêve des
architectes érigeait en salon d’honneur du palais
et qui en est devenu, par une triste vicissitude, ce
que les peintres nomment irrévérencieusement, eu
leur jargon, le « dépotoir ». Parmi tant de grandes
machines, d’aspect intimidant, Tune contre l’autre
accolées, sans autre raison de rapprochement quo
leurs dimensions inusitées, un départ s’impose.
Prise en soi, la conception de M. Laparra ne
manque pas de générosité; elle s’est ainsi formu-
lée : Depuis le sol jusqu’au faîte du temple, où le
conquérant apparaît à cheval, drapé dans un man-
teau couleur de sang, chétif malgré sa superbe,
des cadavres superposés, pareils aux bois d’un
bûcher, s’échafaudent et rappellent par combien
de deuils s’achète la gloire d’un héros... Aux pro-
testations d’Adolphe Yvcn, de Fri tel, de Rcche-
grosse, qui entendaient vouer à l’exécration le
triomphe sanglant des armes, M. Laparra joint
la sienne; elle n’est ni la moins éloquente, ni la
moins pittoresque. M. Laparra ignore la sécheresse
habituelle aux peintres dits littéraires; la matière
est riche, par endroits; les morceaux de brio, de
bravoure, enlevés à la Hoffbauer, abondent. Mais,
si ces proportions monumentales n’étaient pas
commandées par la destination, le symbole était
assez suggestif pour ne rien perdre à se contenir
dans les limites d’une moins vaste image.

Né à Anzin, M. Jonas s’est institué, à bon droit,
peintre des mines et des mineurs; l’épisode de
grève qu'il met en scène, avec des qualités de vie
et une recherche de réalisme qui font souvenir de
Zola et de Germinal, sans faire oublier M. Adler,
est, certes, au nombre des représentations de la vie
sociale les plus tragiques et les plus émouvantes
qu’offre ce Salon : un groupe de grévistes, chassant
devant lui les roufions châtiés et honteux, s’avance,
au son du tambour et du clairon, la bouche ouverte
par le chant de Y Internationale, le drapeau rouge
déployé et flottant au vent sur le ciel de Flandre
bas et gris. Malgré une vague sensation d’instan-
 
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