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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 9.1874

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Nr. 6
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Gonse, Louis: Salon de 1874, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.21838#0533

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

l’avoir lavé dans les eaux du fleuve, après l’avoir parfumé d’ambroisie et
revêtu d’habits immortels, de le remettre entre les mains des deux frères,
le Sommeil et la Mort, pour qu’ils le transportent en Lycie, où ses amis
et sa famille lui feront des funérailles magnifiques et lui élèveront un
tombeau orné d’une colonne, ce qui est, ajoute Homère, le plus grand
honneur que puissent recevoir les morts. M. Lévy a choisi le moment où
Sarpédon est enlevé dans les airs par le Sommeil et la Mort. — Nous ne
relèverons pas toutes les entorses que M. Lévy a fait subir au texte du
poète ; la tâche serait trop facile et, d’ailleurs, ne prouverait rien.
M. Lévy, qui s’est un peu égaré dans son sujet, le sait aussi bien que
nous. Mais nous regrettons vivement qu’il ait fait entrer dans la composi-
tion la figure de Jupiter ; elle est inutile d’abord, péniblement exécutée
et absolument contraire à la tradition antique. Le mouvement affectueux
et penché, qui pourrait convenir à un Christ compatissant, ne saurait
être celui du roi des dieux, surtout du redoutable Zeus des Grecs. Com-
bien le beau groupe emmêlé de Sarpédon, du Sommeil et de la Mort, avec
sa belle ondulation de lignes et son mouvement qui monte si bien, n’eût-il
pas gagné à être seul et isolé dans le champ du tableau ! — Quant à
M. Toudouze il s’est adressé à l’un des sujets les plus gracieux de la théo-
gonie païenne : Eros conduisant Aphrodite sur sa conque nacrée, attelée
de papillons bleus, et l’emportant, à l’éveil de l’aurore, à travers les pro-
fondeurs silencieuses de l’éther. Il a composé son sujet en poëte épris des
délicatesses et des raffinements étranges. Notre premier regard avait été
singulièrement offensé par les notes aiguës du coloris. Six mois se sont
écoulés, et l’aspect du tableau nous paraît avoir sensiblement gagné. Les
crudités des couleurs se sont un peu éteintes, la pâte s’est émaillée et la
figure de Vénus reste maintenant entière avec sa grâce charmante et ori-
ginale. M. Toudouze est remarquablement bien doué, mais qu’il prenne
garde de sophistiquer ses meilleures qualités par l’abus de la recherche
et de la préciosité.

L’un des caractères rassurants du Salon de 187A est de montrer les
efforts les plus nets et les plus courageux venant des nouveaux venus.
Parmi ceux-ci il en est deux qui se montrent déjà solidement armés pour
la lutte et qui, avec des tempéraments très-différents et même opposés,
s’affirment de plus en plus : nous voulons parler de M. Jean-Paul Lau-
rens, le peintre saisissant de la Mort du duc d'Engliien et la Piscine de
Bethsaïda, et de M. Humbert, qui s’était mis si fort en vue, au dernier
Salon, par un superbe portrait de M. Welles de Lavalette et par cette
étrange et troublante Dalila qui appartient aujourd’hui à M. Lepel-
Cointet. L’un et l’autre ont fait un grand pas.
 
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