SI LES ATHÉNIENNES
ASSISTAIENT A LA REPRÉSENTATION DES COMÉDIES
On a beaucoup discuté depuis soixante ans sur la présence des
femmes aux représentations dramatiques d’Athènes (1), et, même
pour les mieux informés, la question reste un peu incertaine. Ce
n’est pas cependant la réflexion ni les investigations qui ont fait dé-
faut: tous les anciens écrivains ont été consciencieusement feuilletés
et, quoi qu’on en ait dit, ces recherches n’ont pas été stériles; mais
la critique, influencée à son insu par des idées préconçues, a manqué
d’impartialité et d’intelligence. Elle n’a point compris que sous l’em-
pire d’une civilisation où la religion elle-même n’était qu’une déifi-
cation, souvent cynique, de la Nature, on pouvait, malgré une grande
sensibilité aux plaisirs de l’esprit et les raffinements d’un goût très-
développé, n’avoir ni le sentiment des obscénités ni la répugnance
des grossièretés. Elle ne voulait pas admettre qu’un peuple tout en-
tier ait associé à l’élégance du bien-dire et au bon goût de la pensée
une absence complète de ces susceptibilités morales et de ces pudeurs
de l’oreille que professent aujourd’hui les plus petits bourgeois, ceux
qui se récompensent de leurs économies de la semaine, en allant ad-
mirer M. Dennery le dimanche, et s’est efforcée d’échapper par une
dénégation systématique à des témoignages qui lui semblaient con-
traires à la nature des choses. L’impartialité nous sera plus facile :
nous ne croyons pas que l’histoire ait jamais besoin de parure; pour
(1) La question a été soulevée et résolue négativement par Bôttiger, Waren die
Frauen in Atlien Zuschauerinnen bei den dramatischen Vorstellungen? réimprimé
dans le Kleine Schriften archaeologischen und antiquarischen Inhalts, t. I, p. 295-
320. Des raisons de sentiment, beaucoup trop modernes, ont fait partager son opinion
à Mme de Staël {De la littérature, ch. ni), et, malgré sa connaissance intelligente de
l’Antiquité classique, Wachsmuth l’a soutenue de nouveau dans son Hellenische Alter-
thumskunde, t, IV, p, 75.
ASSISTAIENT A LA REPRÉSENTATION DES COMÉDIES
On a beaucoup discuté depuis soixante ans sur la présence des
femmes aux représentations dramatiques d’Athènes (1), et, même
pour les mieux informés, la question reste un peu incertaine. Ce
n’est pas cependant la réflexion ni les investigations qui ont fait dé-
faut: tous les anciens écrivains ont été consciencieusement feuilletés
et, quoi qu’on en ait dit, ces recherches n’ont pas été stériles; mais
la critique, influencée à son insu par des idées préconçues, a manqué
d’impartialité et d’intelligence. Elle n’a point compris que sous l’em-
pire d’une civilisation où la religion elle-même n’était qu’une déifi-
cation, souvent cynique, de la Nature, on pouvait, malgré une grande
sensibilité aux plaisirs de l’esprit et les raffinements d’un goût très-
développé, n’avoir ni le sentiment des obscénités ni la répugnance
des grossièretés. Elle ne voulait pas admettre qu’un peuple tout en-
tier ait associé à l’élégance du bien-dire et au bon goût de la pensée
une absence complète de ces susceptibilités morales et de ces pudeurs
de l’oreille que professent aujourd’hui les plus petits bourgeois, ceux
qui se récompensent de leurs économies de la semaine, en allant ad-
mirer M. Dennery le dimanche, et s’est efforcée d’échapper par une
dénégation systématique à des témoignages qui lui semblaient con-
traires à la nature des choses. L’impartialité nous sera plus facile :
nous ne croyons pas que l’histoire ait jamais besoin de parure; pour
(1) La question a été soulevée et résolue négativement par Bôttiger, Waren die
Frauen in Atlien Zuschauerinnen bei den dramatischen Vorstellungen? réimprimé
dans le Kleine Schriften archaeologischen und antiquarischen Inhalts, t. I, p. 295-
320. Des raisons de sentiment, beaucoup trop modernes, ont fait partager son opinion
à Mme de Staël {De la littérature, ch. ni), et, malgré sa connaissance intelligente de
l’Antiquité classique, Wachsmuth l’a soutenue de nouveau dans son Hellenische Alter-
thumskunde, t, IV, p, 75.