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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 1)

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Müntz, Eugène: Amateurs collectionneurs et archéologues florentins à l'époque de la première Renaissance, [3]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18607#0194

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AMATEURS ET ARCHÉOLOGUES FLORENTINS.

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sanctuaire de l'art et de la littérature. Sa Valderiniana, c'est le nom qu'il lui avait donné, ren-
fermait une salle spécialement destinée à la bibliothèque ; on y voyait de belles séries de manus-
crits grecs et latins. Une autre salle renfermait les antiques. Dans cette retraite, l'ancien secrétaire
apostolique, devenu chancelier de la République florentine, goûtait tour à tour les joies de la famille,
les plaisirs de l'étude, les charmes de la société de quelques amis éprouvés. Les lettres qu'il
écrivit à cette époque respirent une sérénité, un bonheur sans nuages ; il ne craignait qu'une
chose, c'est que le ciel ne lui enviât une félicité si grande. Qui aurait dit que ce parfait sage,
ce philosophe émérite, possédait au suprême degré le génie de la raillerie et de l'invective, qu'il
était le licencieux auteur des Facéties, le plus féroce des insulteurs, le précurseur, l'émule de
l'Arétin !

Le musée de la Valderiniana comprenait surtout des marbres. Les bustes remplissaient toute
une salle. Malheureusement, ils avaient presque tous le nez brisé. C'était de Rome, où il avait
résidé si longtemps, que le Pogge avait rapporté les morceaux les plus remarquables. Mais il
avait également mis à contribution les autres villes d'Italie. Grotta Ferrata, Tusculum, Albe,
Ferentino, le Mont-Cassin avaient fourni leur contingent. Ses recherches s'étendaient jusqu'aux îles
de l'Archipel. C'était alors l'âge d'or des collectionneurs. En une seule fois on découvrit à Chio,
dans une caverne, près de cent statues intactes, d'un travail exquis. Poggio, transporté de joie,
s'empressa de communiquer cette nouvelle à son ami Niccoli : il espérait bien avoir sa part du trésor.
Signalons, à ce sujet, les artifices employés par les marchands du temps. Pour tirer de leurs trou-
vailles un prix plus élevé, ils les plaçaient sous le patronage le plus illustre. Un buste romain
de la plus basse époque se transformait en une œuvre de Phidias; les noms de Polyclète et de
Praxitèle étaient prodigués aux productions les plus vulgaires. Mais le Pogge avait trop voyagé pour
ne pas être clairvoyant ; il n'était pas homme à s'en laisser imposer par ces charlatans de Grecs,
ces Grœculi, qui dans son estime occupaient une place plus infime peut-être encore que les Barbares
auxquels il avait, en Suisse ou en Allemagne, arraché tant de manuscrits précieux.

Eugène Muntz,

{La suite prochainement.) Bibliothécaire de l'Ecole nationale des Beaux-Arts.

CuL-DE-LAMPE

composé et gravé par A. de Saint-Aubin.
 
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