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D'après M. Chipiez, la grandeur imposante des monuments égyptiens n'a
d'égale que la simplicité des moyens qui les a élevés; nous sommes heureux de
nous rencontrer avec lui sur ce sujet sans différer sur aucun point : « Les
premiers voyageurs qui ont visité l'Egypte, dit-il, étonnés de la grandeur colossale
des édifices et de l'énormité de certains monolithes, ont été disposés à croire les
Égyptiens très savants en mécanique et très habiles ingénieurs ; on a dit et
répété que ce peuple aurait possédé des secrets qui se seraient perdus plus tard. HIlWl1
Il y aurait eu là des Archimèdes inconnus qui, par la profondeur de leurs connais-
sances, auraient de beaucoup dépassé leur illustre successeur syracusain. Tout
cela n'est qu'illusion, fantasmagorie pure. Les seules machines que paraissent
avoir connues les Egyptiens, c'est le levier et peut-être une sorte de grue d'une
construction tout élémentaire. Tout le secret des Égyptiens a été la multiplica-
tion indéfinie de la force individuelle, l'emploi de bras que l'on ajoutait les uns
aux autres sans avoir à les épargner, et que le bâton contraignait à ne jamais se
détendre pendant tout le cours de l'opération. Les monolithes étaient chargés
sur des radeaux que l'on avait amenés au pied de la montagne où était située
la carrière; on leur faisait descendre le Nil au moment des grandes eaux, ou on
profitait de la crue pour conduire le bateau, par un canal, jusque dans le voisi-
nage de l'endroit où devait être dressé le colosse ou l'obélisque. Ensuite le
monolithe était placé sur un traîneau que des centaines d'hommes faisaient glisser
à l'aide de cordes sur un plancher frotté de graisse2. »
On comprend qu'il soit impossible d'examiner même superficiellement tous les
sujets, toutes les opinions contenues dans le premier volume de ^Histoire de l'art.
Nous devons pourtant nous arrêter encore aux chapitres dans lesquels l'auteur
a bien voulu nous citer, soit pour accepter et développer nos assertions sur l'art
égyptien, soit pour les combattre.
J'ai démontré dans un premier travail qu'il n'y a pas d'art hiératique en
Egypte,- que certaines poses, certaines particularités de facture sont dues avant
tout aux matériaux et à l'outillage employé par les sculpteurs des bords du Nil.
| Ce premier point est accepté par M. G. Perrot. Dans son volume il cite notre
travail, en donne de nombreux extraits, ce dont je le remercie vivement.
Il n'en est pas de même au sujet des éléments sémitiques que j'ai signalés en
Égypte dès les premières dynasties. Comme à M. Perrot, le fond de l'art égyptien
1. Voir l'Art, 9' année, tome II, pages 17 et 55.
2. Voir notre Sculpture égyptienne, chapitre : La Mécanique égyptienne.
Encadrement composé pour «l'Art» par Mary Labbé.
Tome XXXIII-
D'après M. Chipiez, la grandeur imposante des monuments égyptiens n'a
d'égale que la simplicité des moyens qui les a élevés; nous sommes heureux de
nous rencontrer avec lui sur ce sujet sans différer sur aucun point : « Les
premiers voyageurs qui ont visité l'Egypte, dit-il, étonnés de la grandeur colossale
des édifices et de l'énormité de certains monolithes, ont été disposés à croire les
Égyptiens très savants en mécanique et très habiles ingénieurs ; on a dit et
répété que ce peuple aurait possédé des secrets qui se seraient perdus plus tard. HIlWl1
Il y aurait eu là des Archimèdes inconnus qui, par la profondeur de leurs connais-
sances, auraient de beaucoup dépassé leur illustre successeur syracusain. Tout
cela n'est qu'illusion, fantasmagorie pure. Les seules machines que paraissent
avoir connues les Egyptiens, c'est le levier et peut-être une sorte de grue d'une
construction tout élémentaire. Tout le secret des Égyptiens a été la multiplica-
tion indéfinie de la force individuelle, l'emploi de bras que l'on ajoutait les uns
aux autres sans avoir à les épargner, et que le bâton contraignait à ne jamais se
détendre pendant tout le cours de l'opération. Les monolithes étaient chargés
sur des radeaux que l'on avait amenés au pied de la montagne où était située
la carrière; on leur faisait descendre le Nil au moment des grandes eaux, ou on
profitait de la crue pour conduire le bateau, par un canal, jusque dans le voisi-
nage de l'endroit où devait être dressé le colosse ou l'obélisque. Ensuite le
monolithe était placé sur un traîneau que des centaines d'hommes faisaient glisser
à l'aide de cordes sur un plancher frotté de graisse2. »
On comprend qu'il soit impossible d'examiner même superficiellement tous les
sujets, toutes les opinions contenues dans le premier volume de ^Histoire de l'art.
Nous devons pourtant nous arrêter encore aux chapitres dans lesquels l'auteur
a bien voulu nous citer, soit pour accepter et développer nos assertions sur l'art
égyptien, soit pour les combattre.
J'ai démontré dans un premier travail qu'il n'y a pas d'art hiératique en
Egypte,- que certaines poses, certaines particularités de facture sont dues avant
tout aux matériaux et à l'outillage employé par les sculpteurs des bords du Nil.
| Ce premier point est accepté par M. G. Perrot. Dans son volume il cite notre
travail, en donne de nombreux extraits, ce dont je le remercie vivement.
Il n'en est pas de même au sujet des éléments sémitiques que j'ai signalés en
Égypte dès les premières dynasties. Comme à M. Perrot, le fond de l'art égyptien
1. Voir l'Art, 9' année, tome II, pages 17 et 55.
2. Voir notre Sculpture égyptienne, chapitre : La Mécanique égyptienne.
Encadrement composé pour «l'Art» par Mary Labbé.
Tome XXXIII-